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ATLANTIDE

Île dont parle Platon dans le Timée et le Critias, l'Atlantide se serait située au-delà des colonnes d'Hercule (Gibraltar) et aurait été engloutie par un cataclysme gigantesque, que Le Politique tente d'expliquer par les révolutions astrales chères aux Anciens. Ces événements, dont Platon précise qu'ils se sont passés 9 000 ans auparavant, sont rapportés par Critias, qui les a entendus de son grand-père, lequel les tenait d'un vieux prêtre égyptien.

Immense, regorgeant de toutes les richesses du sol et du sous-sol, fourmillante d'hommes, l'île des Atlantes, rois nés de Poséidon et d'une mortelle, Cleito, a connu au cours des siècles une prospérité inouïe. Divisée en districts, quadrillée de canaux convergeant vers la cité, irriguée par les eaux descendues de ses montagnes ou retenues dans des bassins, l'île était, selon Platon, le séjour atlantique (l'Océan étant alors franchissable) d'une race conquérante. Cette race aurait soumis la Libye jusqu'à l'Égypte, et l'Europe jusqu'à la Tyrrhénie. Une sage administration, sous une royauté juste et héréditaire, avait fait de la cité des Atlantes une ville magnifique.

Telle est la première version d'une légende dont le mystère, rehaussé par la beauté du texte platonicien, a tenté bien des auteurs, notamment : Francis Bacon, qui, dans son roman scientifique, La Nouvelle Atlantide (1627), décrit la cité idéale des savants ; le Suédois Olof Rudfeck, auteur d'un ouvrage au patriotisme « hyperboréen » intitulé Atland ou Manheim (1679-1702) ; le poète catalan Verdaguer, qui imagine Christophe Colomb à la recherche de l'île perdue (Atlántida, 1876) ; P. Benoit, qui situe l'action de son Atlantide (1919) dans le Hoggar. Mais le récit du Critias pose un double problème : celui de l'existence de l'île des Atlantes et, si cette existence est admise, celui de sa localisation géographique. Sur ce dernier point, une abondante littérature a été répertoriée par V. Bérard (Navigations d'Ulysse, t. III, 1927). Michel de Grèce a publié La Crète, épave de l'Atlantide (1972). Certains volcanologues, d'ailleurs, pensent que l'éruption du Santorin en Crète, dont l'explosion projeta des cendres jusqu'en Asie Mineure, expliquerait à la fois la disparition de la civilisation crétoise et le mythe de l'Atlantide. En 1964, P. Vidal-Naquet est revenu à la thèse bien souvent avancée de la pure allégorie, mais en donnant au mythe de l'Atlantide la valeur d'une affabulation destinée à cristalliser la double notion d'unité et d'altérité, chère à Platon : l'Athènes antique, terrienne, sage et prospère, se désagrège sous le raz de marée d'une nouvelle civilisation, maritime, commerçante (Platon répugnait à tout trafic), indisciplinée et livrée aux démagogues et aux luttes intestines ; ainsi, sous l'effet de la mer, qui engendre l'altérité, se disloque la belle cité dont les gardiens vivaient dans une absolue communauté (conformément aux doctrines de La République), c'est-à-dire dans l'unité.

— Marie-Rose MAYEUX

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