CONSTANTINE, anc. CIRTA
Constantine(en arabe Qacentina), l’antique Cirta, est la ville principale du nord-est de l’Algérie. Troisième ville du pays en population (environ 500 000 habitants au recensement de 2008), elle rayonne sur une aire métropolitaine qui dépasse le million d’habitants depuis les années 2010.
La ville occupe une position charnière au contact de deux mondes : les montagnes telliennes au nord, qui font écran avec le littoral méditerranéen, et les Hautes Plaines céréalières et semi-arides au sud, qui ouvrent sur l’Atlas présaharien. Cette position explique en grande partie sa permanence dans l’histoire, permanence qu’elle doit également à son site. La ville est perchée sur un immense piton et s’étend sur un plateau rocheux à 650 mètres d'altitude. Elle est ceinturée par des gorges atteignant jusqu’à 300 mètres de profondeur, dans lesquelles coule l'oued Rhummel. Cette position unique est chargée d’histoire. C’est à partir de ce site, d’abord village fortifié puis grande cité des Massyles, que naîtra, au xxe siècle, une vaste agglomération.
Dès le iiie siècle avant J.-C., Cirta est la capitale des rois de Numidie, parmi lesquels Syphax, Massinissa et Jugurtha. Après l’annexion du royaume par Rome au milieu du ier siècle avant notre ère, elle devient la capitale de la province d’Africa Nova. En 313, Cirta prend le nom de Constantine en hommage à l’empereur éponyme qui la fit restaurer et embellir après sa mise à sac en 311.
Après la conquête arabe (viie siècle), elle continue de jouer un rôle important dans les différents royaumes qui se sont succédé. Jusqu’au début du xvie siècle, elle dépend des Hafsides de Tunis. Elle est conquise en 1535 par les Turcs qui en font le siège d’un vaste beylik (province) ; Salah Bey reste le plus célèbre et le plus populaire des beys constantinois (1771-1792). Ahmed Bey, le dernier bey, résiste à la conquête française jusqu’à la chute de la ville en 1837. Celle-ci devient alors le chef-lieu d’un des trois départements coloniaux un siècle durant, les deux autres étant ceux d’Alger et d’Oran.
Au moment de la conquête française, la ville compte 30 000 habitants et joue un rôle considérable dans l’économie régionale, comme l’atteste l’existence de plus de quarante corporations de métiers. Durant toute la période coloniale, Constantine concentre les fonctions administratives et de services liées à son statut de chef-lieu de département et de capitale de l’Est algérien. Elle est également un important marché de gros des produits agricoles et accueille dans sa proche périphérie (El Khroub) le plus important marché à bestiaux de l’Est algérien. De nombreuses petites unités artisanales participent à la vie économique locale. Sa population atteint 142 000 habitants en 1954 (à la veille de la guerre d’indépendance), dont 27 000 Européens, 13 000 juifs et 102 000 musulmans. Constantine abrite alors la plus importante communauté israélite d’Algérie (qui compte 87 000 personnes).
Cette dynamique entraîne une série de transformations du paysage urbain marqué par une séparation entre les quartiers européens et les quartiers musulmans. Au milieu du xixe siècle, la percée de trois artères dans la médina (la Casbah) convergeant vers le nouveau centre administratif (la place de la Brèche et le Coudiat) réorganise le tissu urbain. Dès la fin du siècle, la ville sort de son rocher. Les premiers faubourgs (Saint-Jean, Bellevue, Sidi Mabrouk, Faubourg Lamy), reliés au centre par la construction de nouveaux ponts, accueillent la population européenne. Dans la Casbah, une grande communauté juive est historiquement implantée (avant son départ massif dans les années 1960) et cohabite avec les musulmans. Dans la périphérie immédiate de la ville, des bidonvilles, où commencent à affluer les ruraux déracinés, apparaissent dès la première moitié[...]
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Écrit par
- Saïd BELGUIDOUM : sociologue, maître de conférences à l'université d'Aix-Marseille, chercheur à l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman (IREMAM)
Classification
Médias
Autres références
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ALGÉRIE
- Écrit par Charles-Robert AGERON , Encyclopædia Universalis , Sid-Ahmed SOUIAH , Benjamin STORA et Pierre VERMEREN
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