BARBIZON ÉCOLE DE
Une des innovations les plus remarquables de la peinture européenne du milieu du xixe siècle réside dans la dévotion presque exclusive de peintres de grand talent à l'art du paysage. C'est là un fait que la critique et le public averti avaient reconnu comme une des manifestations majeures de l'art vivant. En France, cette découverte s'identifie avec les efforts de plusieurs artistes ; on groupe les idées qu'ils ont défendues et les styles qu'ils ont définis sous l'étiquette d'« école de Barbizon ». En fait, Barbizon, petit village en lisière de la forêt de Fontainebleau, devint le centre géographique et spirituel d'une colonie de peintres paysagistes de 1825 jusqu'aux années 1860-1870, années qui consacrèrent l'impressionnisme, mouvement découlant en partie de l'exemple des peintres de Barbizon.
La peinture de paysage avant l'école de Barbizon
Vers 1800 déjà, l'attention pour la peinture de paysage prenait figure de découverte. Certes, les peintres des époques antérieures n'étaient pas restés insensibles au spectacle de la nature, sachant s'en imprégner et l'analyser en termes susceptibles d'évoquer une expérience picturale. Le « paysage » avait donc été intégré dans les divers genres de la peinture : peinture à « sujet », peinture d'« histoire » illustrant les sujets sacrés ou profanes, portrait, peinture de genre, ou autres catégories. Toutefois, le paysage « pur », où présence et action de l'homme sont négligeables ou seulement accessoires, n'avait presque jamais paru devoir retenir l'attention des peintres et devenir la matière et le sujet d'un tableau. Néanmoins, et de tout temps, les peintres adonnés aux « grands genres » – peinture d'histoire ou portrait – n'avaient pas manqué de noter les émotions suscitées par la nature. Leurs œuvres, dont certaines étaient exécutées sur le motif, restaient toutefois de petit format, et souvent réalisées selon des techniques jugées sommaires : lavis ou crayon. De telles restrictions ne privent en rien ces œuvres des qualités poétiques et picturales que nous leur reconnaissons aujourd'hui. En tout cas, l'expérience sensible de la nature, considérée comme « inférieure », ne pouvait prendre le pas sur l'expérience intellectuelle dont on pensait que la peinture d'histoire faisait la démonstration.
La peinture de paysage aux environs de 1800
Pendant le dernier tiers du xviiie siècle, en Angleterre et, à un degré moindre, en France, une tendance favorable au paysage s'amorça, qui fut définitivement acceptée à la fin des premières décennies du xixe siècle. Dès lors, c'est à la peinture de paysage que de nombreux peintres se consacreront. Les meilleurs artistes lui reconnaissent le pouvoir d'exprimer leur expérience poétique ainsi que des réalités précises, en particulier le retrait de l'artiste loin de la société urbaine et le refuge qu'il cherche dans la nature. Pendant près de cinquante ans, les peintres de Barbizon – Corot, Théodore Rousseau, Jean-François Millet, Daubigny, Troyon, Diaz, Dupré – ont affirmé, défendu et illustré cette vue nouvelle. La plupart atteignirent leur maturité vers les années 1830, et leur activité se prolongea bien au-delà. Le style qu'ils ont défini ensemble ne peut être enfermé dans une formule étroite, car non seulement chacun d'eux se caractérisa, au cours des ans, par des « manières » diverses, mais tous eurent, face à la nature, une attitude très personnelle. Ce n'est qu'au niveau des quelques conceptions qui leur étaient communes et des caractères généraux qu'offrait leur style qu'on peut les grouper en « école ». Il faut, enfin, souligner qu'aucun membre du groupe n'a jamais enfermé son art dans les cadres d'une doctrine ou d'une théorie.[...]
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Écrit par
- Jacques de CASO : professeur émérite à l'université de Californie, Berkeley (États-Unis)
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Médias
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