NOTATION MATHÉMATIQUE
Pour connaître une langue naturelle, il n'est pas nécessaire d'en apprendre l'histoire ni, pour comprendre sa littérature, de faire l'étude historique de la grammaire et du vocabulaire. À cet égard, le langage mathématique, en raison de son caractère plutôt artificiel, se présente bien différemment. Alors que l'accord qui est à la base d'une langue naturelle n'a jamais été exprimé explicitement, les conventions du langage mathématique l'ont toujours été. Cet état conventionnel du langage mathématique permet des manipulations qui ont parfois conduit à des changements fondamentaux et même brusques. Si, sous le terme de formalisation, la manipulation consciente du langage mathématique est devenue de nos jours une activité mathématique importante, elle est, à vrai dire, aussi ancienne que la mathématique elle-même. L'histoire des notations mathématiques montre une foule de tentatives, dont la plupart n'ont influencé le développement de cette science que par la démonstration de leur insuffisance. Si l'on rappelle dans cet article l'histoire des notations, c'est pour expliquer l'état présent des choses et justifier les différents choix qui y ont conduit. On ne mentionnera guère les tentatives qui ont été désavouées par l'histoire. D'autre part, on donnera au concept de notation mathématique une interprétation plus vaste que celle contenue dans les exposés traditionnels. Ce ne sont pas seulement les nombres, les variables, les fonctions, les êtres géométriques qui demandent une expression linguistique, mais aussi les propositions, les questions, les raisonnements, qui sont exprimés dans un langage naturel, manipulé ou totalement formalisé. Ces habitudes de notation qui caractérisent le style mathématique, quoique plus intéressantes que le système des symboles isolés, n'ont pas, à ce jour, été suffisamment étudiées.
L'arithmétique élémentaire
Les nombres naturels
En dehors des plus primitives, toutes les langues connaissent un système de mots numéraux pour désigner les premiers nombres (en général jusqu'à 9) et des unités supérieures (en général quelques puissances de 10), avec lesquels on forme des noms pour d'autres nombres par des procédures qui doivent refléter l'addition et la multiplication. Notons cependant qu'on rencontre parfois dans la formation des numéraux des principes soustractifs ; ainsi en latin : duodeviginti, deux de vingt, pour 18.
Ces systèmes de formation de noms numéraux sont limités par le nombre restreint de noms d'unités supérieures. Au contraire, la représentation des nombres naturels sur l'abaque est plus algorithmique et est illimitée ; les nombres y sont rendus au moyen de jetons d'après un principe positionnel : la valeur du jeton est déterminée par la colonne où il se trouve. Un petit nombre est rendu par le nombre correspondant de jetons dans la première colonne ; dans la colonne suivante (vers la gauche), la valeur d'un jeton égale l'unité suivante du système (par exemple 10), etc. Souvent on trouve des unités intermédiaires (5 entre 1 et 10, 50 entre 10 et 100, etc.).
La plupart des systèmes de notation numérale furent un compromis entre le système linguistique et celui de l'abaque. La figure montre le nombre 1971 écrit d'après divers systèmes.
Le système égyptien est strictement additif ; dans l'exemple choisi, on voit, à droite, le symbole de 1 000, suivi par neuf symboles de 100, sept de 10 et une unité.
La notation grecque archaïque connaît les unités intermédiaires de l'abaque ; les symboles mêmes sont des lettres initiales de noms numéraux (le Χ de chilioi pour 1 000, le Δ de déka pour 10, avec le signe multiplicatif Γ pour penta = 5). Le système grec classique est celui des nombres alphabétiques : on indique les nombres 1, 2,[...]
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Écrit par
- Hans FREUDENTHAL : professeur à l'université d'Utrecht, directeur de l'Institut pour le développement de l'enseignement mathématique
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Média
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