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IBN GABBAY MEIR BEN EZECHIEL (1480-1540)

On ne sait que peu de chose concernant l'existence de Meir ben Ezechiel ibn Gabbay, sinon qu'il naquit en Espagne et qu'il en fut expulsé avec ses autres coreligionnaires en 1492, qu'il vécut d'une manière très précaire et, après diverses pérégrinations, qu'il s'établit en Turquie et mourut peut-être en Terre Sainte. Il composa trois ouvrages. Le premier, rédigé en 1507 et intitulé Tōla ‘at Yaaqōb (Vermisseau de Jacob), est un commentaire kabbalistique sur les prières. Son opus magnum, intitulé ‘Abōdat ha-Qodeš (Service sacré), fut rédigé de 1521 à 1531. Meir ibn Gabbay composa enfin en 1539, à l'intention de son disciple Joseph Levi ben Isaac, un commentaire du Šaar ha Šō‘el d'Azriel de Gérone, sous le nom Dērēk ‘Emūnah (Chemin de la foi).

Dans son ‘Abōdat ha-Qodeš, il fournit la synthèse la plus réussie des enseignements de la kabbale hispanique avant l'éclosion du centre de Safed. Contre les tenants du courant intellectualiste tels qu'Abraham Bibago, il se fait le porte-parole d'un fidéisme rigoureux excluant tout compromis entre la mystique et l'investigation rationnelle. À l'allégorie philosophique proposée par Maimonide il substitue la lecture symbolique de la Torah pratiquée par le Bahir et le Zohar. Il soutient qu'En Sof est distinct de la première Sefira, quoique Keter (La Couronne) lui soit coéternelle. S'opposant à une vision purement instrumentale des Sefirot, il affirme que l'émanation est la substance de la Divinité.

Contrairement à la plupart des théologiens médiévaux, Ibn Gabbay considère que l'homme a une dignité plus élevée que celle des anges, car son âme a une origine divine. L'homme est investi de la fonction de mener la création à son achèvement (Tiqqūn). Le culte rendu par la créature à Dieu n'a pas pour but premier de servir ses besoins, mais il répond à une demande de Dieu (‘Abōdah ṣōrekh gabōah) ; ce service divin culmine dans l'unification (Yihūd) du Nom divin.

L'œuvre d'Ibn Gabbay se répandit rapidement comme l'attestent, entre autres, les écrits du Maharal de Prague et le Shenē Lūhōt ha-Běrit d'I. Horowitz, ainsi que les nombreuses citations d'Ibn Gabbay que l'on peut découvrir chez les kabbalistes chrétiens du siècle suivant.

— Roland GOETSCHEL

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Écrit par

  • : professeur des Universités, directeur du département d'études hébraïques et juives de l'université de Strasbourg-II, professeur associé à l'Université libre de Bruxelles

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