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SAMUEL USQUE (XVIe s.)

Historien juif originaire du Portugal, auteur d'un classique de la littérature portugaise, Consolation aux tribulations d'Israël(Consolaç ao as tribulaç oes de Israel, Ferrare, 1553). Sa biographie est mal connue : issu d'ancêtres castillans, Samuel Usque avait reçu une éducation humaniste au Portugal, où il aurait vécu en marrane jusqu'à son expatriation, en 1531 ; il gagna alors Salonique, refuge par excellence des Juifs exilés de la péninsule Ibérique ; sans doute était-il apparenté à l'imprimeur ferrarais Abraham Usque, qui produisit son livre. Dédié à doña Gracia Nasi, la grande dame du judaïsme de Constantinople, celui-ci s'adresse aux Juifs portugais dispersés. Il comprend trois sections majeures, portant respectivement sur l'époque du premier Temple, sur celle du second Temple, sur le Moyen Âge (dans ce troisième dialogue, certainement le plus important, sont retracées les dernières années du judaïsme portugais et la conversion forcée de 1497 : l'expérience personnelle de l'auteur s'y reflète probablement).

L'ouvrage se présente sous la forme conventionnelle de dialogues faisant intervenir les personnages suivants : Zicaero (le prophète Zacharie), Numeo (le prophète Nahum), Ycabo (Jacob). L'objectif de Samuel Usque est double : décrivant les épreuves historiques d'Israël, il veut montrer qu'elles furent suivies de consolations (les unes et les autres étant annoncées par les prophètes) et que la consolation par excellence qui est l'avènement messianique ne saurait tarder ; s'exprimant en portugais (et non en castillan, pourtant plus répandu parmi les Juifs séfarades), il exhorte, par le moyen de la narration historique, les « nouveaux chrétiens » portugais à revenir au judaïsme. Il puise à diverses chroniques espagnoles, portugaises, latines et françaises. Les abréviations L.I.E.B. et E.B. qu'il cite comme sources sont diversement interprétées (Livro Ebraico, une chronique perdue de Prophiat Duran, Souvenir des calamités [Zikhron ha-Samadot] ; ou Liber Iehuda Eben Berga, la chronique de Salomon ibn Verga, Le Fléau de Juda[Šebet Yehuda] ; ou encore Leone Iehuda Ebreo, Juda Abrabanel, auteur d'une chronique ?).

La Consolation semble avoir été largement diffusée parmi les marranes : un dossier de l'Inquisition de Lisbonne révèle en 1558 que le livre circulait dans les milieux des « nouveaux chrétiens » portugais de Bristol et de Londres. Une réédition parut à Amsterdam en 1599, inaugurant une intense production littéraire juive espagnole et portugaise dans les Provinces-Unies. Longtemps négligée par les historiens ne connaissant pas le portugais, l'œuvre de Samuel Usque est maintenant accessible grâce à la traduction de Martin A. Cohen intitulée Samuel Usque's Consolation for the Tribulations of Israel (Philadelphie, 1965). Par sa langue et sa composition poétique, elle constitue un monument de la littérature portugaise. Par l'insertion qu'elle réalise dans l'économie de la rédemption des drames survenus au peuple d'Israël, elle exprime à merveille la conception juive — orientée et non purement descriptive — de l'histoire.

— Gérard NAHON

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Écrit par

  • : directeur d'études émérite à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)

Classification

Autres références

  • YERUSHALMI YOSEF HAYIM (1932-2009)

    • Écrit par
    • 932 mots

    Issu d'une famille originaire de Russie, Yosef Yerushalmi est né à New York le 20 mai 1932. Il reçoit une formation rabbinique à la Yeshiva University, puis au Jewish Theological Seminary of America, qui l'ordonne rabbin en 1957. Après avoir exercé comme rabbin à la synagogue Beth Emeth (Maison de vérité)...