HILDEBRANDT JOHANN LUKAS VON (1668-1745)
Une génération sépare Hildebrandt et Fischer von Erlach, moins par l'effet de l'âge (Hildebrandt n'est le cadet de Fischer que d'une dizaine d'années) qu'en vertu d'une différence très profonde d'orientation stylistique. Hildebrandt naît à Gênes, séjourne autour de 1690 à Rome auprès de Carlo Fontana et ne s'installe à Vienne que dans les toutes dernières années du xviie siècle. Les exemples rencontrés en Italie du Nord, et particulièrement ceux de Guarini, semblent l'avoir beaucoup plus impressionné que la tradition classique maintenue par Fontana ; il apporte en Autriche une manière bien différente du grand style monumental de Fischer. Ingénieur militaire à l'origine, Hildebrandt avait été amené à servir sous les ordres du prince Eugène, lequel restera son patron et lui permettra de trouver une clientèle plutôt dans l'aristocratie de Vienne qu'auprès de la Cour. Des palais qu'il a élevés (le palais Schwarzenberg en 1697, le palais Daun Kinsky en 1713-1716), le plus célèbre est le Belvédère, ou plutôt les deux Belvédères ; le Belvédère inférieur date de 1714-1715 et le Belvédère supérieur de 1721-1722. L'accent est mis dans les deux cas sur les surfaces ; pas de pavillons décrochés, pas de courbes, seules les différences de hauteur marquent l'articulation des corps de bâtiment et le jeu des toitures aux formes mouvementées vient la souligner. L'effet est essentiellement décoratif, accusé encore au Belvédère supérieur par le miroir d'eau où se reflète le palais. Dans la construction des églises, Hildebrandt se plaît à jouer sur les arcs à la courbe complexe engendrés par la pénétration de volumes sphériques ou elliptiques ; tel est le cas de l'église Saint-Laurent à Gabel (aujourd'hui Jablonné v Podještědí) de 1699. Ce goût des surfaces ondulantes et des enchevêtrements d'espaces est tout à l'opposé des claires définitions de volumes que recherche Fischer von Erlach. La savante élégance des édifices construits par Hildebrandt semble préluder aux réalisations de Neumann et constitue l'une des réussites les plus parfaites de l'esprit autrichien.
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Écrit par
- Georges BRUNEL : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de lettres, conservateur des objets d'art des églises de la Ville de Paris
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