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LANGAGE ACQUISITION DU

Le langage humain est un dispositif complexe qui assure à la fois des fonctions de communication et des fonctions de représentation. Le langage est spécifique de l’espèce humaine. Comprendre les mécanismes qui en sous-tendent le développement, c’est jeter une lumière cruciale sur les capacités humaines.

La plupart des enfants maîtrisent les structures de base de leur langue maternelle aux environs de quatre ans, en même temps qu’ils réalisent des performances considérables dans d’autres domaines du développement cognitif et social qui semblent jouer un rôle important dans l’émergence du langage lui-même. Il résulte de ce prodigieux développement que l’enfant de quatre ans est un être extrêmement sophistiqué. Comment cet accomplissement peut-il être réalisé normalement, dans un délai si bref, chez tous les enfants, dans toutes les cultures ? Il est difficile d’éviter la conclusion que le langage est une part de notre héritage biologique, un accomplissement qui dépend des caractéristiques spécifiques du cerveau humain.

Branche de la psycholinguistique, l’acquisition du langage sollicite différentes disciplines : linguistique, psychologie, anthropologie, éducation, neurosciences cognitives, intelligence artificielle, modélisation. C’est un domaine marqué par une tradition de débats autour de l’innéisme, abandonnés au profit de l’identification des contraintes complexes qui orchestrent l’acquisition. C’est aussi un domaine doté de méthodes d’investigation très performantes à l’origine de connaissances décisives pour de nouvelles théorisations.

Perspectives théoriques sur l’acquisition du langage

Acquisition du langage - crédits : Evgeny Atamanenko/ Shutterstock

Acquisition du langage

Au cœur des débats sur l’acquisition du langage sont inscrites trois grandes questions : quelle est la nature des capacités initiales à la source du processus d’acquisition ? Les mécanismes sont-ils spécifiques du langage ou sont-ils à l’œuvre dans d’autres domaines de la cognition ? Quelle est la nature de l’input (déterminants socio-cognitifs, déterminants linguistiques) qui permet au système de progresser ? Deux approches théoriques offrent des réponses contrastées à ces questions.

Les approches formelles : la grammaire universelle et les théories du « bootstrapping »

Noam Chomsky - crédits : Ulf Andersen/ Hulton Archive/ Getty Images

Noam Chomsky

L’approche structurale du langage humain proposée par Chomsky a bouleversé la linguistique et a durablement influencé les travaux des psycholinguistes. Selon Chomsky et ses disciples, l’enfant aurait une connaissance innée de la grammaire universelle (GU), constituée par des « principes », des propriétés invariantes très structurées (les universaux) et des « paramètres » qui rendent compte des variations syntaxiques entre les langues. Le traitement du langage relèverait d’un module cognitif spécialisé indépendant des autres systèmes de la cognition. La GU ne serait pas à apprendre, elle serait présente et prête à l’emploi dans notre équipement biologique de base. L’argument essentiel pour étayer cette conception est l’argument dit de « la pauvreté du stimulus » : l’input fourni à l’enfant par l’environnement langagier serait trop incomplet et inconsistant pour permettre l’accès à la complexité grammaticale. De plus, les rares corrections de l’adulte aux erreurs de l’enfant ne permettraient pas d’expliquer les progrès rapides conduisant aux performances remarquables atteintes durant les trois ou quatre premières années. Ces arguments viennent renforcer le postulat selon lequel les informations linguistiques abstraites seraient codées au niveau des gènes et disponibles presque sans recours à l’expérience.

Plus récentes, les théories du bootstrapping (« facilitation ») s’accordent également sur l’existence de connaissances linguistiques innées. Ces connaissances spécifiques d’un domaine (phonologie, prosodie, syntaxe ou sémantique) peuvent fournir des passerelles pour l’accès aux[...]

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Acquisition du langage - crédits : Evgeny Atamanenko/ Shutterstock

Acquisition du langage

Noam Chomsky - crédits : Ulf Andersen/ Hulton Archive/ Getty Images

Noam Chomsky

Les grandes étapes de l’acquisition du langage - crédits : Encyclopædia Universalis France

Les grandes étapes de l’acquisition du langage

Autres références

  • DÉBUTS DE L'ACQUISITION DU LANGAGE

    • Écrit par et
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    De la naissance jusqu’à l’âge de trois ans en moyenne, l’enfant apprend, apparemment sans effort, une ou plusieurs langues maternelles. Pour ce faire, il doit apprendre le répertoire des sons spécifiques à sa langue (les consonnes et les voyelles), le sens des mots et la manière dont ils se combinent...

  • ACQUISITION DE LA PRAGMATIQUE DU LANGAGE

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    L’acquisition de la pragmatique du langage (S. Ervin-Tripp) correspond à l’acquisition des usages du langage considérés du point de vue cognitif, social et culturel. Les recherches sont réalisées dans le cadre théorique de la philosophie du langage. Tout énoncé est considéré comme un acte...

  • ACQUISITION DU LANGAGE CHEZ LES MALENTENDANTS

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    • 2 573 mots
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    Un des aspects les plus marquants du langage est qu’il peut être traité et appris aussi facilement par l’œil et la main que par l’oreille et la bouche – en d’autres termes, le langage peut être construit à partir de signes manuels ou à partir de mots parlés. Aujourd’hui, cette idée n’est plus controversée...

  • ACQUISITION DU LEXIQUE

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    L’acquisition lexicale s’amorce vers un an avec la production des premiers mots conventionnels. Comment l’enfant parviendra-t-il aux 50 000 mots en moyenne utilisés par l’adulte cultivé ? Ce processus implique l’apprentissage conjoint de la forme sonore des mots, de leur sens et conditions d’emploi...

  • ACQUISITION DE LA SYNTAXE

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  • ACQUISITION DU NOMBRE ET DU CALCUL

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    ...différencier deux collections plus grandes, par exemple de huit et seize objets, d’après l’impression de quantité ou de grandeur que donnent ces collections. C’est seulement avec le développement du langage (premiers mots vers un an) que les nombres symboliques pourront se développer. Les mots de nombre...
  • ACQUISITION DU RÉCIT

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    Le récit est une forme de discours relatif à une séquence d’au moins deux événements ou actions réels ou fictifs qui sont généralement situés dans un cadre spatial et temporel. Il serait une forme universellement disponible ne nécessitant pas d’enseignement spécifique, au moins sous sa modalité...

  • APPRENTISSAGE, psychologie

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    ...certaines acquisitions sont prodigieusement « surapprises » : les auteurs qui accordent de l'importance au rôle de l'apprentissage dans le développement du langage diront, par exemple, que le sens d'un mot ou l'utilisation d'une règle grammaticale simple reçoivent des milliers, voire des millions de confirmations...
  • APPRENTISSAGE IMPLICITE

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    ...l’article et de l’adjectif avec le nom, sont apprises dans le cadre scolaire. Mais cet apprentissage n’intervient que vers l’âge de huit ans, alors que les productions verbales de l’enfant semblent se conformer à ces règles bien plus tôt. Un enfant de trois ans pourra dire correctement « une voiture verte...
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