SMITH ADAM (1723-1790)
Adam Smith, « le père de l'économie politique » : qualification bien connue et qui, sous une forme concise, a le mérite de bien exprimer ce que cette discipline lui a dû à ses véritables débuts, c'est-à-dire dans le dernier tiers du xviiie siècle, mais qualification insuffisamment précise, car il ne paraît pas exagéré d'avancer que ses idées et ses propositions ont bouleversé le monde. En effet, dans un livre célèbre, La Richesse des nations, paru en 1776 et toujours étudié depuis, il a, en synthétisant le savoir de son temps, exposé les causes de cette richesse ainsi que les mesures les plus propres à favoriser son accroissement, ou encore, en termes actuels, une théorie détaillée de la croissance d'une économie nationale, ouvrant ainsi la voie à une lignée d'économistes et provoquant l'établissement de nouvelles conditions de l'activité économique qui n'ont subi de modifications qu'à une époque relativement récente.
L'homme et l'œuvre
Smith n'a toute sa vie été qu'un universitaire. Né à Kirkaldy (Écosse), il entra à quatorze ans au collège de Glasgow, à dix-sept ans à Oxford où, pendant six années, il étudia la philosophie et la littérature. Il fut nommé professeur de littérature à Glasgow à vingt-huit ans et occupa à partir de 1753 la chaire de philosophie morale, professant entre autres l'économie politique et publiant la Théorie des sentiments moraux. En 1763, tuteur du jeune duc de Buccleugh, il passa trois ans en Europe, principalement en France, où il rencontra les physiocrates. Revenu en Écosse en 1767, il se consacra à la rédaction de La Richesse des nations, ainsi qu'à ses devoirs officiels et aux rééditions de son œuvre. Il mourut à Édimbourg.
L'ouvrage de Smith est d'abord l'exposé du mécanisme de la croissance d'une nation. En premier lieu, il présente un certain nombre de notions. Ainsi distingue-t-il trois facteurs de production : le travail, rémunéré par le salaire, dont la division est synonyme de spécialisation et de productivité accrue ; le capital, qui fournit un profit et provient de l'épargne et donc du revenu des particuliers ; la terre, dont le propriétaire perçoit la rente. Il en résulte que le montant du produit est fonction de la quantité et de la qualité du travail mis en œuvre par le capital, que le coût de production d'un bien est formé de salaires, de profit et de rente (le produit du travail n'appartient donc pas en totalité au travailleur) ; la richesse se définit comme une puissance d'achat ; l'utilité d'un objet est sa valeur d'usage, et son pouvoir d'acheter, sa valeur d'échange.
Le processus général de croissance provient alors de l'accumulation du capital qui permet un accroissement de la division du travail et de sa productivité, tandis que la hausse de la demande de travail en résultant entraîne celle du salaire. Mais, au fur et à mesure que le temps passe, la rente augmente par suite de la hausse de la demande et des prix des produits agricoles, et le profit diminue, ce qui amène une baisse de l'épargne et une stagnation. Cette fin est inévitable, même si la baisse du profit peut être retardée par l'introduction de nouvelles branches d'activité et par l'exploitation de nouveaux territoires.
Les recommandations de Smith sur la politique à suivre sont de deux sortes.
D'une part, il s'attache au système économique et son examen du mercantilisme l'amène à en faire ressortir les défauts : l'accumulation de métaux précieux n'est pas la vraie richesse ; les restrictions de toutes sortes aux importations entraînent une mauvaise répartition du capital et une insuffisante division du travail ; les encouragements aux exportations provoquent une structure économique différente de celle qui[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jacques WOLFF : professeur à l'université de Paris-II.
Classification
Autres références
-
ENQUÊTE SUR LA NATURE ET LES CAUSES DE LA RICHESSE DES NATIONS, Adam Smith - Fiche de lecture
- Écrit par Françoise DUBOEUF
- 1 272 mots
- 1 média
Pour Adam Smith (1723-1790), « l'économie politique, considérée comme une branche de la science de l'homme d'État » se propose de fournir un revenu abondant au peuple et au souverain. Or, An inquiry into the Nature and Causes of the Wealth of Nations (plus communément appelée...
-
ANTHROPOLOGIE ÉCONOMIQUE
- Écrit par Maurice GODELIER
- 5 153 mots
L'anthropologie économique en tant que branche spécialisée des recherches anthropologiques devint possible et nécessaire au début du xxe siècle avec la découverte par Boas et Malinowski du potlatch des Indiens Kwakiutl et du kula ring des Mélanésiens de l'île de Trobiand.
Pour...
-
COMMERCE INTERNATIONAL - Théories
- Écrit par Lionel FONTAGNÉ
- 7 228 mots
...analyse scientifique au tournant du xviiie siècle, s'opposant à la doctrine mercantiliste alors en vigueur, qui y voyait un jeu à somme nulle. Amorcée par le « père de l'économie politique », Adam Smith, cette nouvelle analyse du commerce international, visant à montrer au contraire... -
COMMERCE INTERNATIONAL - Avantages comparatifs
- Écrit par Matthieu CROZET
- 5 804 mots
...David Hume (1711-1776), qui décrit en 1752 (Political Discourses) un mécanisme d'ajustement automatique des balances des échanges internationaux, Adam Smith (1723-1790) investit le champ de l'économie internationale et développe dans La Richesse des nations (1776) une critique sévère des... -
COMMERCE INTERNATIONAL - Division internationale du travail
- Écrit par Lionel FONTAGNÉ
- 3 945 mots
À l'image de la célèbre manufacture d'épingles dépeinte par Adam Smith (La Richesse des nations, 1776), dans laquelle chaque ouvrier se voyait affecté à une tâche précise participant à la production de l'atelier, la notion de division internationale du travail (D.I.T.) fait référence...
- Afficher les 38 références