CALAS AFFAIRE (1762)
L'erreur judiciaire de l'affaire Calas, commise par le parlement de Toulouse en 1762, s'explique par l'intolérance religieuse persistant au siècle des Lumières. Louis XV considère les protestants avec une relative bienveillance : l'exercice de leur culte est devenu pratiquement libre, mais Choiseul applique encore, de temps à autre, les dispositions de l'édit de 1724 toujours en vigueur. Calas, négociant calviniste, marchand d'indienne établi à Toulouse depuis quarante ans, bien considéré dans les milieux protestants, trouve son fils aîné, Marc-Antoine, âgé de vingt-neuf ans, pendu dans le magasin en octobre 1761. Le père dissimule le suicide, considéré alors comme un déshonneur. La calomnie, attisée par la passion religieuse, accuse Jean Calas d'avoir étranglé son fils pour prévenir sa conversion au catholicisme. L'enquête est menée avec malveillance comme un procès de sorcellerie : les parlementaires et la population toulousaine s'acharnent à démontrer le crime ; la cité allait fêter le bicentenaire du massacre des protestants en 1562. Bien que le curé ait affirmé que Marc-Antoine n'avait pas fait acte de catholicité, le parlement entend quatre-vingt-sept dépositions relatives à sa conversion ; Marc-Antoine Calas reçoit des funérailles catholiques solennelles ; une procession réunit vingt mille fidèles à Toulouse.
L'affaire Sirven (Élisabeth, élève des Dames noires de Castres se jette dans un puits pour ne pas entrer au couvent) aggrave la situation ; Calas est condamné, rompu vif sur la roue, étranglé, brûlé.
Un mouvement d'opinion se dessine en sa faveur ; Marc-Antoine, dans une crise de neurasthénie, aurait cédé au désespoir parce qu'il ne pouvait pas terminer une licence de droit, réservée aux catholiques. Après le comte de Maurepas, Villars (fils du vainqueur des Camisards) et Vallerangue avec son pamphlet : L'Asiatique tolérant, Voltaire intervient de façon décisive. Il recueille à Ferney la veuve Calas et deux enfants et demande la réhabilitation. Avec l'aide des avocats de Calas, il en appelle au Conseil du roi, il ameute la cour, élabore son Traité sur la tolérance (1763), alerte tous ses amis en France et à l'étranger. En 1764, un tribunal comprenant le chancelier d'Aguesseau, le cardinal de Bernis, l'intendant de La Michodière révise le procès, le Conseil du roi casse le jugement du parlement de Toulouse et le supplicié est réhabilité en 1765.
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Écrit par
- Louis TRENARD : docteur ès lettres, professeur à l'université de Lille
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