CALVOS ANDRÉ (1792-1867)
Poète de la Grèce moderne, révélé au monde vingt ans après sa mort par Costis Palamas, André Calvos est le témoin douloureux de la guerre d'indépendance que mène son pays. En 1824, il donne La Lyre, dix odes en grec moderne qui rappellent la langue éolienne antique et, en 1826, les Odes nouvelles. Puis un silence mystérieux de quarante-trois ans. Son élan fut-il brisé par l'incompréhension du public grec ? Son extrême idéalisme ne lui permit-il pas de rompre le cercle où l'enfermait une intense vie intérieure ? Sa volonté fut-elle mise à l'échec d'exprimer le drame de son peuple au travers d'une langue alourdie de termes archaïques et dialectaux, et parfois même vulgaires ? On ne sait. Il reste en tout cas controversé non sans quelque raison par les fidèles de la tradition poétique, inaugurée par Dionysios Solomos, son contemporain, tandis que les partisans de la poésie moderne reconnaissaient en lui un précurseur.
Un destin agité
Calvos est né à Zante. Alors qu'il n'est âgé que de dix ans, son père, un aventurier, le sépare de sa mère, aristocrate de naissance mais pauvre. Il ne devait plus la revoir. À Livourne, où le conduit son père, il mène ses études au milieu de la riche colonie grecque de la ville qui compte parmi ses membres les frères Zossima, mécènes dévoués à la cause des lettres grecques. Sa vie est celle d'un pauvre, d'un laissé-pour-compte. La frustration de l'amour maternel, la nostalgie de son île rongent ses jours. À Florence, où il se rend à l'âge de vingt ans, il rencontre, dans le cercle d' Ugo Foscolo, poète italien né lui aussi à Zante, un climat plus favorable. Élève et secrétaire du poète, il en devient l'ami et le disciple : même goût pour la fraternité, mêmes convictions libérales, mépris de « l'éclat des sceptres » et dévotion à la Grèce classique. Ces valeurs qu'il pressentait, encore enfant, lors de l'occupation de Zante par Bonaparte, lui inspirent des odes, des tragédies et des essais écrits en italien. En juin 1816, il rejoint Foscolo qui s'est réfugié en Suisse et, en septembre de la même année, ils gagnent tous deux Londres. En raison sans doute de leur caractère irritable, ils se brouillent pour toujours. Calvos vit de leçons et de traductions, il donne des conférences. En mai 1819, il épouse une Anglaise, Marie Thérèse Thomas, qui le laisse veuf quelques mois plus tard. En 1820, il retrouve Florence et y devient membre d'une société secrète que des carbonari réfugiés à Londres lui ont fait connaître. Expulsé en avril 1821, il se réfugie à nouveau en Suisse. En 1824, il publie à Genève La Lyre et, en 1826, à Paris les Odes nouvelles, aussitôt traduites en français respectivement par Stanislas Julien et Pauthier de Censay. « Je quitte la France avec regret, lance Calvos à l'adresse du général La Fayette, mon devoir m'appelle dans ma patrie pour exposer un cœur de plus au fer des musulmans. » La Grèce insurgée ne le retient que quelques semaines, il passe à Corfou, où il se fixera vingt-six ans, y enseignant la philosophie et l'italien, se mêlant aux luttes politiques, polémiquant avec les lettrés. Solitaire, hautain, irascible, il s'habille de noir et fait peindre en noir ses meubles. Le cercle de Dionysios Solomos l'ignore. Calvos retourne, en 1852, en Angleterre où il épouse Charlotta Augusta Wadams, sa cadette de vingt ans, directrice d'une école de jeunes filles. Depuis 1960, les cendres de Charlotte et d'André reposent à Zante. Il n'existe pas de portrait du poète.
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Écrit par
- Stratis TSIRKAS : écrivain
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GRÈCE - Langue et littérature
- Écrit par Christophe CHICLET , André MIRAMBEL et Panayotis MOULLAS
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