ARMES, héraldique
Le droit aux armes (composition dans un écu) et aux armoiries (l'écu plus ses ornements extérieurs) s'est progressivement dégagé au cours des siècles dans les diverses nations de l'Occident chrétien, mais de façon, parfois assez dissemblables. Prises par les chevaliers qui les arboraient sur écus et bannières (pour beaucoup d'armes, l'étoffe d'une bannière est visiblement antérieure à l'écu), cottes, housses de cheval, etc., les « connaissances » ou armes devinrent héréditaires dans les lignées mâles à partir de 1130 environ, alors que l'importance de celles-ci se renforçait durant tout le xiie siècle. Des femmes assumèrent les armes de leurs pères et de leurs époux, puis les ecclésiastiques s'intégrèrent au système durant le xiiie siècle. Ce signe n'est nullement réservé à la noblesse en France, le blason (ou les armes) s'appliquant aux roturiers dès le début du xiiie siècle : les bourgeois sont suivis par les simples paysans dès le xive siècle. À la fin du xiie siècle déjà, certaines villes portent des armes. Les corps de métiers semblent bien faire de même à partir du xiiie siècle. Il fut admis en France que les nobles avaient seuls formellement droit au heaume timbrant l'écu, mais que tout un chacun avait le droit de prendre les armes qu'il désirait à condition de ne pas usurper celles d'autrui. La « capacité héraldique » est ainsi très « démocratique » en France, alors que d'autres pays réservent les armes à ceux qui font partie de la noblesse ou encore à ceux qui en ont reçu l'autorisation écrite d'un héraut ou d'un collège d'armes. Il y eut, cependant, plusieurs tentatives de réglementation très stricte sous la Renaissance et l'Ancien Régime : l'Armorial général de 1696, à but fiscal, enregistra et créa des dizaines de milliers d'armes dans le royaume de France ; l'ordonnance de Louis XV qui restreignait considérablement la capacité héraldique ne fut pas enregistrée par le Parlement comme contraire aux usages du royaume, elle resta donc lettre morte (1760). Diverses juridictions étaient compétentes en matière d'héraldique : les rois, les hérauts et poursuivants d'armes, très actifs au Moyen Âge, mais qui eurent dès le xvie siècle une réputation d'ignorance et qui disparurent sous la Révolution. Les hérauts de Napoléon Ier et de la Restauration, réservés à la parade, disparurent en 1830.
Dès 1615, Louis XIII créait un juge d'armes de France, dont l'office dura jusqu'en 1790 (sauf entre 1696 et 1701) et resta dans les mains des membres de la famille d'Hozier après 1641. L'héraldique officielle française s'incarna ensuite dans l'autorité du conseil du Sceau des titres, qui préparait les lettres patentes portant concessions d'armoiries des titrés et des villes. La commission du Sceau, créée par le roi en 1814, prépara le travail du garde des Sceaux du souverain ; elle fut supprimée en 1830 par la monarchie de Juillet et le conseil du Sceau fut à nouveau créé en 1859, puis aboli une nouvelle fois en 1872 par la IIIe République qui le remplaça par la direction des Affaires civiles et du Sceau au ministère de la Justice. Les tribunaux sont compétents pour juger toutes questions relatives aux armoiries qui sont considérées, de même que le nom et le titre, comme des attributs de la personne : l'armoirie, c'est le complément du nom, « c'est le nom sculpté et gravé » (Berryer). Normalement, les armes étant signe d'identité, seul le chef de famille a droit à les posséder « pleines », ou pures, les cadets devant « briser », ou modifier plus ou moins la composition ; les familles ont abandonné cette pratique dès le début de l'Ancien Régime, hors les très grandes maisons et la première d'entre[...]
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Écrit par
- Hervé PINOTEAU : vice-président de l'Académie internationale d'héraldique
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