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CASSE-TÊTE

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On appelle casse-tête une forme de jeu intellectuel en solitaire nécessitant une réflexion logique suivie d'une action manuelle ou non. Les casse-tête font partie des récréations mathématiques dont ils forment aujourd'hui une branche active. Il ne faut cependant pas les confondre avec les énigmes et autres jeux mathématiques. Nous ne traiterons ici que des casse-tête mécaniques. On peut en proposer la définition suivante : un casse-tête mécanique est un problème mathématique traduit sous la forme d'un objet spécialement construit et dont la ou les solution(s) font appel à des manipulations guidées par le raisonnement et/ou par la chance. C'est dire que les jeux de dextérité, tel le bilboquet, relèvent d'une autre catégorie ludique. Rappeler le caractère solitaire du jeu n'est peut-être pas le plus important : il existe des concours de casse-tête où plusieurs joueurs s'efforcent de résoudre le même problème ; a gagné celui qui a découvert la solution le premier ou avec le minimum de manipulations .

Les casse-tête n'ont vraiment pris leur essor que depuis un siècle environ. Ils le doivent à l'intérêt croissant des mathématiciens et à la publication du premier livre qui leur a été consacré, celui du « Professeur Hoffmann » (A. J. Lewis), Puzzles old and new, paru à Londres en 1893. Depuis lors, inventeurs et fabricants n'ont cessé d'alimenter le marché.

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Les assemblages se répartissent entre ceux à deux dimensions et ceux à trois dimensions. Parmi les premiers, le plus ancien est la boîte d'Archimède, faite de quatorze morceaux plats aux formes géométriques permettant de façonner des figures diverses. La tradition attribue ce précurseur du tangram à Archimède (287-212 avant J.-C.). Le tangram, ou casse-tête chinois, qui lui ressemble comme un frère mais n'a que sept pièces, est sûrement venu de Chine où il est attesté, ainsi qu'au Japon, au xviiie siècle. Arrivé on ne sait trop comment autour de 1800 en Europe, il fait alors l'objet d'une véritable mode.

La famille des assemblages comprend aussi les puzzles ou images « disséquées », longtemps appelés en français jeux de patience. Comme pour nombre de jeux éducatifs, le xixe siècle fut celui de l'expansion. Autres casse-tête apparentés mais plus récents, les polyminos sont des pièces formées de carrés associés, dont le mathématicien américain Solomon W. Golomb a montré en 1953 tout l'intérêt pratique et théorique.

Les assemblages à trois dimensions comprennent les très anciennes bagues à secret, faites d'anneaux entrelacés que l'on ne peut séparer si l'on n'en connaît le principe d'assemblage, mais aussi les pyramides ou encore les Soma-cubes, pentominos tridimensionnels, imaginés par le physicien et poète danois Piet Hein en 1936.

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Les mécanismes cachés sont des casse-tête où il faut retirer une pièce soigneusement dissimulée pour démonter le tout ou ouvrir un réceptable. Telles sont les serrures invisibles, les boîtes à secret – comme celles que fabrique le Japonais Akio Kamei – ou les serrures à système.

Les imbriqués sont peut-être les casse-tête les mieux connus. Parmi eux, les « cristaux » (nommés en anglais burrs), le plus souvent faits en bois et formés de plusieurs pièces imbriquées, constituent des objets fort décoratifs. Le jeu consiste à trouver la clé qui permet de défaire ce qui est si bien imbriqué. Ces casse-tête sont connus en Europe depuis au moins le xviiie siècle, et sans doute en Extrême-Orient depuis plus longtemps.

Les démontages sont des casse-tête à démêler. Sans nécessairement remonter au légendaire nœud gordien, on rappellera la longue carrière des clous emmêlés, anneaux magiques et autres « nœuds » métalliques. Le baguenaudier est généralement placé parmi les démontages, bien qu'on puisse aussi le considérer comme un casse-tête à séquences de mouvements. Le jeu consiste à découvrir comment séparer la navette des anneaux des tiges qui la retiennent.

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Les casse-tête à séquences de mouvements sont plus proches des jeux réglés à deux joueurs. De fait, le solitaire n'est pas sans évoquer un jeu de pions mais ici joué seul devant le tablier. Ces casse-tête supposent en effet des règles précises pour être mis en œuvre. Fort à la mode sous le règne de Louis XIV, le solitaire a inspiré à Leibniz une étude publiée en 1710 dans les Mémoires de l'Académie de Berlin. Les casse-tête à blocs coulissants sont surtout représentés par le taquin. Le taquin classique – en anglais 15 puzzle – existait sûrement avant 1870, car Sam Loyd eut peu après l'idée d'en proposer une version plus difficile (en fait, impossible !), appelée « 14-15 ». La récompense promise, que personne ne toucha, fit pour beaucoup dans le succès du nouveau jeu. Seul l'architecte hongrois Ernö Rubik peut prétendre à une semblable notoriété. Son cube articulé, créé en 1974, fut breveté deux ans plus tard et commercialisé en Hongrie sous le nom de Büvös Cocka (« cube magique »). La firme américaine Ideal Toys en fit un succès mondial.

Les images à changements et les pliages offrent la possibilité, en manipulant une image, d'en créer plusieurs autres. Il suffit parfois de masquer partiellement la figure, de la replier ou de la retourner pour faire apparaître une image cachée. Enfin, les objets impossibles sont des tours de force, telle la flèche traversant une bouteille de part en part, dont le concepteur se garde bien de révéler le secret. Il est d'ailleurs rare qu'on le découvre.

— Thierry DEPAULIS

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Écrit par

  • : licencié ès lettres, ingénieur du Conservatoire national des arts et métiers, historien du jeu

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