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CUBA

Nom officiel République de Cuba
Chef de l'État Miguel Díaz-Canel - depuis le 10 octobre 2019
Chef du gouvernement Manuel Marrero Cruz - depuis le 21 décembre 2019
Capitale La Havane
Langue officielle Espagnol
Population 11 019 931 habitants (2023)
    Superficie 109 880 km²

      Article modifié le

      Histoire jusqu’à la révolution cubaine

      Domination et exploitation espagnoles

      Conquête, pillage et oppression

      La colonisation destructrice

      Si l'on en croit le père Bartolomé de Las Casas – qui a eu entre les mains une copie du journal de bord du premier voyage de Christophe Colomb et en a transcrit des passages –, ce serait le dimanche 21 octobre 1492 que fut mentionnée pour la première fois une « île très grande » que les indigènes appelaient Cuba. Il est dit plus tard (24 octobre) qu'on fait beaucoup de commerce dans cette île ; il paraît qu'on y trouve de l'or et des épices, de grands navires et des commerçants. La grande île est atteinte le 28 octobre au voisinage du golfe de Bariay, à l'est du port actuel de Gibara. Colomb, qui croit être à Cipangu, c'est-à-dire au Japon, cherche la Chine et le grand khan pour lui remettre un message au nom des souverains espagnols. Il explore les côtes de Cuba, qu'il nomme Juana, jusqu'au 5 décembre, désireux d'une part de poursuivre sa mission d'ambassade en direction de l'Asie, d'autre part d'inventorier les richesses d'un pays qui entre dans sa juridiction d'amiral et de vice-roi comme le stipulent les capitulations de Santa Fe (17-30 avril 1492). Persuadé que Cuba fait partie du continent, le 4 novembre Colomb pénètre dans la province de l'Oriente où existent « des hommes qui avaient un seul œil, et d'autres qui avaient des museaux de chien et qui se nourrissaient de chair humaine : sitôt qu'ils en capturaient un, ils le décapitaient et buvaient son sang, et ils lui coupaient la nature ». Ce sont les terribles Karibs ou « Cannibales » qui apparaissent dès ce premier document comme des anthropophages. Au cours de son second voyage, Colomb, après un simulacre d'enquête, fait rédiger un acte devant notaire affirmant que Cuba n'est pas une île, le 12 juin 1494. Cependant, Cuba apparaît bien en 1500 comme une île sur la célèbre carte de Juan de la Cosa, mais ce n'est qu'en 1508 que Sebastian de Ocambo en fit le tour complet.

      En 1511 s'ouvre le procès d'occupation de Cuba. Comme dans les autres îles , les Espagnols commencent par s'approprier les terres et par soumettre les Indiens au travail esclavagiste. Trois groupes d'hommes, sous la direction de Diego Velázquez de Cuellar et Panfilo de Narváez, se lancent dans la conquête et le pillage. C'est la phase de conquête destructrice qui va de pair avec l'accaparement de l'or accumulé par les indigènes. La société indo-cubaine comptait 500 000 individus, selon les estimations de l'époque. Elle était organisée en caciquats dont certains sont mentionnés dans la lettre au roi de Velázquez (1er avr. 1514) : Camagüey, Savanaque, Guamuhaya, Habana, Baracoa, Bayamó. Appartenant au groupe des Arawaks, sauf les Guanahacabibes du cap San Antonio, les Indo-Cubains avaient une agriculture à haut rendement pratiquée en conucos(petites propriétés), à base de manioc, de patates douces, d'ignames, de haricots et de maïs. Ils cultivaient également le coton, le tabac, la papaye et se nourrissaient du produit de leur pêche.

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      Les premières localités espagnoles, les villas, s'établirent dans les zones de population indigène abondante et sur l'emplacement des mines d'or : Bayamó, Trinidad, Sancti Spiritus, Puerto Príncipe (Nuevitas), San Cristóbal de la Habana, Baracoa et Santiago de Cuba. Entre 1511 et 1520, c'est-à-dire en moins d'une décennie, la population indigène de Cuba s'amenuise de manière catastrophique. En 1571-1572, il n'existe plus que 270 foyers d'Indo-Cubains qui vivent dans une situation de misère extrême. Cet effondrement démographique lié à l'épuisement du cycle de l'or – qui s'achève au milieu du siècle – explique le rôle que va jouer Cuba dans la conquête du Mexique et de la Floride. De 1519 à 1522, la plupart des Espagnols qui n'ont plus d'indigènes pour travailler la terre s'engagent derrière Hernán Cortés dans l'entreprise de la Nouvelle-Espagne.

      Économie sucrière et esclavage

      Du milieu du xvie siècle au milieu du xviiie, Cuba renouvelle très lentement sa population sur la base d'une économie esclavagiste. On compte en 1544 – au moment le plus aigu de la dépression démographique – quelque 322 foyers européens (surtout espagnols, mais également des Italiens, des Allemands et des Portugais), 1 000 naborías, Indiens employés au service domestique, et 800 esclaves nègres et indiens. Deux siècles plus tard, en 1755, on recense environ 170 000 habitants dont 30 000 esclaves. Certains traits de l'économie et de la société cubaines, perceptibles au cours de cette phase, vont s'imposer pendant longtemps :

      – Le choix du port de La Havane comme station de transit du système des flottes de retour qui s'organisent vers 1540 pour convoyer les navires marchands jusqu'à Séville va favoriser la concentration du commerce.

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      – Une économie sucrière s'établit à partir des premiers ingenios de azúcar (moulins à broyer la canne) et des trapiches (petits moulins à sucre) qui sont construits au cours de la première moitié du xvie siècle. La main-d'œuvre est fournie par un apport irrégulier de travailleurs originaires du continent africain transportés par le canal de la traite négrière. Les Nègres esclaves qui travaillent aussi bien sur les cañaverales(champs de canne à sucre) que dans les ingenios et les mines de cuivre deviennent un facteur déterminant de la production et de l'exportation orientée vers l'Espagne. Leur nombre s'accroît au xviie siècle en fonction des besoins du commerce colonial d'exportation des sucres qui passe par La Havane surtout après 1580. Le développement d'une économie sucrière et du nombre des Nègres ne se fait pas sans poser de graves problèmes à la colonie. La résistance des Nègres fugitifs – les Nègres cimarrones – s'intensifie, provoquant la constitution de groupes spécialisés de chasseurs d'esclaves accompagnés de chiens, les rancheadores. Parallèlement, le nombre des Nègres libres s'accroît : 31 000 en 1774, 60 000 en 1804.

      – La culture du tabac se pratique dans de petites fermes établies dans des plaines (vegas), de préférence près des cours d'eau. Les planteurs de tabac (vegueros) se heurtent aux commerçants pour exporter leurs récoltes et aux propriétaires fonciers, les latifundiaires, parce qu'ils doivent leur payer la rente des terres. Très combatifs, ces agriculteurs ont également à se défendre contre le Trésor royal qui, vers 1680, cherche à contrôler les prix. Malgré un décret royal qui établit le monopole des tabacs au début du xviiie siècle, les vegueros se soulèvent à trois reprises contre l'autorité coloniale en 1717, 1721 et 1723, allant jusqu'à menacer La Havane pour faire entendre leurs revendications.

      – L'instauration du monopole espagnol à La Havane provoque les entreprises des adversaires de cet exclusif colonial. L'étendue des côtes cubaines facilite la contrebande avec la course étrangère. Aventuriers, flibustiers et boucaniers anglais, hollandais, français viennent tenter les colons du sud et de l'est de Cuba en leur portant les produits européens qui leur manquent. C'est ainsi que ces éleveurs et agriculteurs, en majorité des créoles, nés dans l'île, plus cubains qu'espagnols, producteurs de cuirs, de viande boucanée, de tabac, d'indigo, peuvent vivre pendant longtemps de manière autonome, les communications avec l'autorité centrale étant difficiles. Cette classe de grands propriétaires jouera plus tard, au xixe siècle, un rôle dirigeant dans le processus d'émancipation coloniale.

      Triomphe du capital commercial

      Des transformations notables interviennent dans l'agriculture et dans l'économie cubaines, entre 1760 et 1840. C'est en premier lieu l'occupation de La Havane par les Anglais en 1762 au cours de la guerre de Sept Ans. Pendant ces dix mois d'occupation, l'ouverture du grand port au commerce international est un puissant facteur de stimulation pour l'économie de l'île. Les Anglais font venir plus de 10 000 Africains et s'entendent avec des colons pour d'autres importations illégales. L'accumulation du capital commercial et la montée des forces productives déclenchent un « boom » commercial que reflètent nettement les comptes de La Havane. Les exportations, qui doublent de 1763 à 1774, passent de 612 000 pesos en 1763 à 11 millions en 1790. À l'instigation du roi Charles III, des réformes libèrent le commerce entre Cuba et les ports espagnols (1765-1778). Avec l'autorisation de l'Espagne, un commerce en droiture peut même s'effectuer de 1779 à 1783 entre Cuba et les États-Unis d'Amérique. C'est la guerre d'indépendance haïtienne qui, à partir de 1791, en ruinant les plantations françaises de Saint-Domingue, fait triompher sur les marchés européens les produits cubains, avec de fantastiques hausses de prix. Dernier facteur de changement : les guerres de libération coloniale des colonies sud-américaines, qui profitent de l'occupation de l'Espagne par les Français. Des Français réfugiés installent des plantations de café dans l'est de l'île. Grâce à un approvisionnement en esclaves africains plus régulier (cédule royale du 28 février 1789), le nombre des ingenios se multiplie dans la partie occidentale autour de Matanzas et de La Havane. La population s'accroît de manière significative au cours de cette période, passant de 273 000 habitants en 1791 à 645 000 en 1820 et à plus d'un million en 1840. Les conditions de plus en plus dures de l'exploitation esclavagiste entraînent le soulèvement des Nègres, dont le nombre s'est accru de manière considérable. Plusieurs révoltes éclatent en 1795 (André Morales), en 1812 (José Antonio Aponte), en 1825 et en 1843 dans la région de Matanzas. Dans les montagnes de l'Est, particulièrement la Sierra del Cristal, et dans les montagnes de Pinar del Río se sont constitués des palenques(campements fortifiés) de Nègres fugitifs qui résistent à toutes les attaques.

      Après 1820, la traite négrière se réfugie dans la clandestinité : c'est l'ère de la contrebande des Africains qui subsiste jusqu'en 1886 malgré le traité de 1817 passé avec l'Angleterre qui proclame l'arrêt du commerce des esclaves. Le trafic négrier va durer encore pendant plus d'un demi-siècle avec la triple complicité de commerçants et d'aventuriers nord-américains, anglais et espagnols auxquels se joignent des trafiquants cubains, de hauts fonctionnaires de l'appareil d'État colonial résidant soit à Madrid soit à Cuba même (gouverneurs, fonctionnaires coloniaux) et des membres de la classe des possédants, planteurs, industriels ou financiers qui voient dans ce commerce illégal la possibilité de prélever des bénéfices considérables. Seule la crainte d'une insurrection d'esclaves qui prendrait la forme de celle de Saint-Domingue oblige certains éléments de la classe des propriétaires terriens tels que Félix Varela en 1823, Francisco de Arango y Parreño en 1828 et José A. Saco à réfléchir sur les conséquences de la contrebande et à évoquer timidement sa suppression. Ce qui préoccupe surtout ces propriétaires esclavagistes, c'est l'augmentation des esclaves qui, à partir de 1840, deviennent plus nombreux que les Blancs dans l'île. On recense en effet, en 1841, 436 495 Nègres esclaves et 152 838 gens de couleur libres face aux 418 291 Blancs. Au vrai, toute l'oligarchie blanche de Cuba se complaît dans ce commerce frauduleux et dans ce système qui lui est si bénéfique. Ce n'est donc pas elle qui arrêtera le commerce interlope ni qui mettra fin au mode de production esclavagiste. Car la fin de celui-ci équivaut pour elle à la fin du profit esclavagiste. Le travail et le surtravail gratuits ayant disparu, la classe des propriétaires terriens perd, en définitive, la possibilité de se reproduire comme classe économique et sociale.

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      Il existe des rapports fonctionnels réciproques entre la production, le commerce et la population d'esclaves, qui expliquent par exemple que la croissance d'un de ces facteurs ait des répercussions obligatoires sur les deux autres et réciproquement. À Cuba, c'est le commerce qui a stimulé l'augmentation des esclaves et provoqué le développement de la production.

      Crises économiques

      La décennie 1830-1840 voit progresser les terres à sucre d'ouest en est. Vers 1837, après l'inauguration du chemin de fer et du canal de Guines, les plantations de canne à sucre s'installent dans la vallée du même nom. Puis les sucreries s'étendent vers l'est, occupent l'intérieur des plaines de La Havane, Matanzas et vont ainsi jusqu'à Colón. Le Centre et l'Est demeurent en marge de ce mouvement quoique apparaissent de nouvelles sucreries à Sancti Spiritus, Nuevitas et Puerto Príncipe par où le sucre peut s'exporter directement. Dans la province de l'Oriente, l'industrie sucrière reste encore prisonnière des structures du passé.

      Les plantations de tabac se maintiennent de plus en plus difficilement dans les riches vegas octroyées par le monopole d'État et le décret royal du 11 mars 1797, et dans les régions de La Havane et de Matanzas. L'abolition du monopole par décret royal du 23 juin 1817 relance la production sur des bases nouvelles (nouveaux marchés américains). L'industrie du tabac se fractionne en industrie des cigares, qui se diffuse de manière spectaculaire dès la fin du xviiie siècle, et en industrie de la cigarette, qui se répand à la même époque. Les ateliers se multiplient et, vers 1830, se développe une grande industrie capitaliste du tabac orientée vers l'exportation en direction des États-Unis. Les transformations techniques qui interfèrent vers 1840 ont des répercussions profondes sur la production. Des innovations telles que les broyeurs horizontaux à triple cylindre, la machine à vapeur, les chaudrons de cuisson et de cristallisation par le vide augmentent considérablement le rendement. Des brevets sont appliqués avec succès (brevet Rillieux et brevet Derosne) pour réduire les pertes occasionnées par les anciennes techniques de type « train jamaïcain » (système d'engrenages). Les usines dotées de ces perfectionnements ont davantage besoin de terres de culture pour alimenter leur plus grande capacité de production. La mécanisation apparaît aussi dans l'industrie du tabac et dans les mines, et a des conséquences graves : chômage, formation d'une classe d'ouvriers spécialisés obligés souvent de s'expatrier, mouvement ouvrier organisé qui surgit vers 1860-1870.

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      Vers 1860, les États-Unis s'attribuent une part prépondérante dans le commerce d'exportation avec 62 %, la Grande-Bretagne en ayant 22 % et l'Espagne 3 %. Dans le commerce d'importation, en revanche, la part de l'Espagne représente 30 %, celle des États-Unis et de la Grande-Bretagne, 20 % chacune. La crise économique de 1857-1866 freine le développement de ce capitalisme colonial en diminuant les crédits injectés dans le processus de rénovation industrielle. La main-d'œuvre est donc également touchée et, avec elle, la production qui se trouve paralysée. Le chômage devient une composante constante de l'économie cubaine : 5 000 ouvriers du tabac vers 1860. Cette crise a pris naissance en Grande-Bretagne en 1845-1847 et se répercute à Cuba sous la forme d'une baisse soudaine et forte des prix et du volume des exportations de sucre. Le processus s'accentue avec la spéculation et l'inflation qui sèment la panique aux États-Unis en 1855-1856, et aboutit en 1857 à des faillites et à des banqueroutes spectaculaires. L'exportation du sucre s'en ressent durement en raison de la dépression qui frappe de plein fouet les économies nord-américaine et britannique jusqu'en 1866. La guerre de Dix Ans, en 1868-1878, masque la crise financière qui frappe les banques (Banque espagnole, Crédit territorial et Caisse d'épargne et d'escompte), mais, en dévastant les provinces de Las Villas, Camagüey et Oriente, elle détruit l'agriculture et toutes les anciennes formes d'exploitation de la terre, laissant donc la place vacante après 1878 pour les grands centres industriels qui réclament de vastes plantations (latifundia).

      Destruction du système esclavagiste

      La guerre de Dix Ans, qui pour certains est la première guerre de libération, commença le 10 octobre 1868 par la réunion du groupe de manzanilleroscommandés par Carlos Manuel de Céspedes sur son domaine de la Demajagua et par la proclamation d'un manifeste. Ceux qui refusent de voir dans ce conflit une guerre de libération évoquent à l'appui de leur thèse l'incertitude et l'ambiguïté des aspirations politiques formulées par les responsables, la tiédeur de leur sentiment abolitionniste et surtout les limites de leurs revendications strictement économiques. Il suffit de lire le manifeste d'octobre 1868 que lancent Céspedes et ses amis pour comprendre la réalité et l'importance des contradictions qui minent le mouvement dès sa naissance. La fraction des classes dominantes qui dirige la guerre ne parvient pas à dépasser ses intérêts de classe et à poser clairement le problème de l'indépendance et de la rupture définitive avec la puissance coloniale. Cette hésitation finira par des négociations avec les représentants de l'armée espagnole en 1878 et marque de son sceau la fin de la guerre (pacte du Zanjón : 10 février 1878). Le développement de la guerre va modifier considérablement la situation économique et sociale en inaugurant un processus de destruction du système esclavagiste, en provoquant une transformation des structures économiques et en favorisant le passage du capitalisme colonial à l'impérialisme. Enfin, il est la cause de l'apparition des partis de classes qui sont les illustrations d'une forme originale de la lutte des classes, exacerbée au cours de cette période. La transition du capitalisme colonial à l'impérialisme s'opère vers 1880 avec la domination des trusts américains, qui ne cesse de s'accentuer. José S. Jorrín note en 1881 l'achèvement du procès de concentration des forces productives et la perte du pouvoir économique de la classe traditionnelle des anciens maîtres esclavagistes. Ce n'est là pourtant que le début d'un processus qui touche les trois secteurs déterminants de l'économie cubaine : sucre, tabac et mines. Vers 1880, les États-Unis ont organisé dans l'Est leur industrie de raffinage de manière à pouvoir traiter le sucre brut en provenance de Cuba. Cette nouvelle orientation du marché américain s'accompagne de dispositions financières qui visent Cuba. Les investissements américains s'accroissent et provoquent une véritable mutation économique dans tous les secteurs clés de la production de l'île. Dans l'industrie sucrière, ils se concentrent et finissent par imposer en 1887 l'organisation de la Sugar Trust créée par le magnat Henry C. Havemeyer. L'esclavage est définitivement aboli en 1886.

      Domination et exploitation

      L'augmentation du capital financier en provenance des États-Unis se manifeste dans les mines par l'installation à Cuba, en 1883, de la Bethlehem Pennsylvania Steel, sous le nom de Juragua Iron Co., qui obtient la concession de l'exploitation exclusive du fer de la province de Santiago. À partir de ce moment, les grands trusts américains remplacent les compagnies anglaises et possèdent le monopole absolu d'exploitation des minerais de l'île. La concentration financière réussit à réunir sous la couverture des trusts les plantations de tabac (vegas) et les manufactures de cigarettes (tabaquerías). Les Tobacco Trusts se constituent en 1888 autour du géant, la puissante Henry Clay & Bock Co. Ils rachètent d'importantes vegas et pratiquent le salariat libre. Il faut souligner la ponction fiscale massive opérée par l'Espagne et le cadre dans lequel évolue ce prélèvement : le cadre des structures coloniales. Cuba est devenue certes une colonie économique des États-Unis, mais elle reste, jusqu'en 1898, une colonie politique de l'Espagne. Et cette dernière veut profiter jusqu'au bout de sa situation de puissance coloniale comme toutes les autres puissances placées dans la même situation d'exploitation.

      C'est dans le domaine fiscal que s'observe le plus clairement l'insatiabilité de l'Espagne. L'État péninsulaire absorbe en moyenne annuelle un budget d'État colonial de La Havane équivalent au tiers de son propre budget. Or, Cuba ne représente pas 6 % de la population espagnole. Ce budget d'État colonial est entièrement dépensé par Madrid pour ses propres besoins, en particulier pour financer ses guerres coloniales (guerre de Dix Ans, guerre hispano-cubaine de 1895-1898). À partir de 1880, une aggravation de la fiscalité sur les revenus du capital se traduit par de nouvelles taxes industrielles (1881), la loi des relations commerciales de 1882 et la double augmentation du profit colonial global et du profit colonial d'État. Le profit colonial global se décompose en profit colonial (revenus fiscaux ou budget), profit administratif, profit commercial, profit industriel, etc. La fraude prend une dimension internationale après la promulgation de la loi de cabotage de 1882. Les pays étrangers (Grande-Bretagne, France, États-Unis) prennent l'habitude d'envoyer leurs marchandises d'abord en Espagne, pour qu'elles repartent ensuite sur des navires espagnols en direction de Cuba. Elles pénètrent ainsi exemptées de tout droit sous nationalité espagnole. Ce qui augmente singulièrement les revenus de l'État espagnol et fait la fortune des ports de la Catalogne, de Santander, de La Corogne et de Cadix. Par contre, les finances cubaines n'ont pas tardé à ressentir cruellement les effets de cette ingénieuse combinaison. Ces facteurs entraînent l'accroissement du chômage dans tous les domaines : vegas,cañaverales. La situation sociale devient alarmante, voire explosive, comme dans le secteur industriel du tabac où 100 000 ouvriers se retrouvent sans emploi après la création des trusts et la mécanisation. Les salaires sont très bas, le salaire nominal n'a pas varié de 1850 à 1890. Or, le coût de la vie, qui était déjà très élevé dans la première moitié du siècle, atteint un sommet. Les produits manufacturés viennent des grandes puissances étrangères et se vendent à prix d'or sur le marché cubain.

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      Peut-on chiffrer le montant des investissements américains vers 1895 ? Le président Cleveland, dans son message sur l'état de l'Union en décembre 1876, ne cache pas que les États-Unis entretiennent avec Cuba des « rapports qui, en aucun cas, ne sont d'un caractère sentimental ou philanthropique ». Il constate la progression de la balance commerciale américano-cubaine qui s'élève de 64 millions de dollars en 1889 à 103 millions en 1893. Soit une augmentation de 62 %. Sur la foi des chiffres exposés par le président des États-Unis, on évalue le capital global des États-Unis à Cuba à 50 millions de dollars. Une analyse plus minutieuse des sources montre qu'il faut multiplier ce chiffre par au moins dix pour obtenir le montant réel des intérêts américains. On peut d'ailleurs comparer ces investissements à ceux qu'engage la France dans les affaires espagnoles qui relèvent de la dette coloniale et atteignent vers 1897 plus de 4 milliards de francs (exactement 4 milliards 384 millions de francs). Il y a en outre une énorme dette contractée par la Péninsule qui demeure encore inchiffrable. Dans cette phase de l'impérialisme, les États-Unis se taillent la part du lion ; la France n'arrive qu'en seconde position, surtout comme créancier de l'Espagne pour l'aider dans la lutte qui l'oppose aux révolutionnaires cubains.

      Partis des classes dominantes

      Vers 1890-1895, quatre classes sociales s'opposent à Cuba : une classe de gens de couleur libres, une classe d'anciens propriétaires terriens qui se retrouvent ruinés par la transition impérialiste et la destruction du système esclavagiste, une classe de technocrates employés dans l'appareil d'État colonial et qui sont les piliers de la domination – et de l'oppression – espagnole, une classe de capitalistes, négociants, gérants de trusts américains, anglais, allemands, français, qui détournent à leur profit une grosse part des revenus du capital de Cuba. La destruction du système esclavagiste pose à la société cubaine un redoutable problème politique. Comment répondent les partis ?

      Le Parti de l'union constitutionnelle, créé en 1878 au sortir de la guerre de Dix Ans, regroupe tous les gros commerçants, les boutiquiers et les employés de commerce. Il fournit à l'État colonial le contingent habituel de fonctionnaires et de volontaires de la répression, organisés en milice d'une cruauté sanguinaire. Le PUC vise essentiellement à conserver le statut colonial de l'île sous la tutelle de l'Espagne.

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      Le Parti réformiste naît d'une scission du PUC le 30 octobre 1893, mais à cette date il a déjà derrière lui une longue tradition de réformisme. L'historiographie cubaine ne cesse pas de chanter les louanges de ce parti, qui serait le creuset du mouvement de libération. Cela n'est pas si sûr. Le réformisme dont il s'agit n'a-t-il pas commencé par être une simple doctrine économique prônant le libre « laissez-passer » des esclaves sur le marché colonial ? Depuis la prohibition de la traite négrière en 1820, les réformistes se recrutent parmi ces hacendados et ces señores de ingenio qui n'hésitent pas à dépenser annuellement 30 millions de dollars pour se procurer du « bois d'ébène ». Ce réformisme résolument esclavagiste se retrouve dans la seconde moitié du siècle dans le mouvement réformiste qui donne quelques-uns de ses membres à la commission de la Junte d'information érigée de 1865 à 1867 par l'État espagnol pour gagner du temps. Les réformistes sont à cette époque des propriétaires de moyens de production qui veulent tenter de trouver un compromis avec les technocrates de la métropole. Ils comptent parmi leurs membres de brillantes personnalités créoles : José Antonio Saco, José Miguel Ángulo Y Heredia, Manuel de Armas, Manuel Ortega, Calixto Bernal, le comte de Pozos Dulces, José Morales Lemus. Il est significatif que le ManifiestodelPartidoreformista publié à La Havane le 12 mai 1865 se termine par ces mots : « Notre cause ne peut être perdue face à la grande nation espagnole au sein de laquelle nous aspirons à voir croître et se perpétuer le destin de cette importante et glorieuse Antille. » Le programme en deux points que publie le parti le 30 octobre 1893 n'est pas si éloigné de ce manifeste. Le parti demande une application stricte de la Constitution de l'État monarchique, seule garante des droits du citoyen. Il réclame sur le plan économique une réorganisation du système administratif, la réforme des tarifs douaniers et un programme d'assainissement financier (suppression de la loi des relations commerciales, de l'impôt sur le tabac, de l'impôt industriel sur le sucre, libre vente du tabac en Espagne, liquidation de la dette). Il est important de souligner que, comme leurs anciens amis du PUC, les réformistes n'ont qu'une seule nation : l'Espagne.

      Le Parti autonomiste se constitue le 1er août 1878, mais il traîne également avec lui un passé doctrinaire. C'est en 1811 que le père José Agustín Caballero rédige une Exposición a las Cortes españolas, qui devait être présentée par le député cubain de La Havane, Andrés de Jauregui, aux Cortes. Cet exposé comprend quarante-cinq considérations et quinze propositions, dont un projet de gouvernement autonome pour Cuba. Cette même année 1811, le consulado de Agricultura y Comercio de La Havane met au point un plan d'autonomie non publié. Aux Cortes, le père Félix Varela (1788-1853), qui représente Cuba depuis 1822 – avec Leonardo Santos Suárez et le Catalan Tomás Gener –, dépose un Proyecto de gobiernoautonómico pour les provinces d'outre-mer. Un autre projet est aussi préparé par Domingo del Monte en 1838 pour être présenté à la reine régente par l'ayuntamiento de La Havane. Tous ces projets sont refusés et tombent dans l'oubli.

      Le Parti libéral (1878 à 1881), devenu Parti libéral autonomiste à partir du 1er avril 1882, a un programme en trois parties qui couvrent les questions sociales, politiques et économiques. Sur le plan social, le parti réclame une indemnisation pour les anciens propriétaires d'esclaves, une réglementation simultanée du travail des gens de couleur libres et leur éducation sociale, morale et intellectuelle, une immigration exclusivement blanche. Le Parti libéral autonomiste se désintéresse de la question des indemnités pour les anciens esclaves qui sortent de quatre siècles d'oppression et de labeur continus. Seule la situation des maîtres blancs le préoccupe au moment où s'effondre le mode de production esclavagiste à Cuba. Il veille aussi à contenir la pression des Nègres et se propose de les confier aux doctes mains des religieux qui tiennent les registres de l'éducation en Espagne. Derrière la liaison entre éducation et travail apparaissent clairement des motivations idéologiques. L'idéologie dominante des maîtres blancs veut se perpétuer grâce à l'aliénation des nouveaux hommes libres, alors que ceux-ci tiennent encore leurs armes, les armes de leur propre libération.

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      Le dernier aspect laisse percer le racisme viscéral qui anime les membres du Parti libéral autonomiste. Ils sont tous saisis par la peur : peur de l'augmentation de la population afro-cubaine, peur qu'elle n'impose ses volontés sur le marché du travail, salaires élevés, refus de travailler, etc. Comme aux États-Unis à la même époque – à la fin de la Reconstruction –, les Blancs veulent contrebalancer la montée des Nègres libres en prônant une immigration blanche en provenance d'Europe principalement. Les immigrés reçoivent des terres, trouvent des emplois, et leur présence neutralise ainsi la poussée des Afro-Américains à qui devraient aller, en toute logique, ces emplois et ces terres.

      La question économique se formule en quatre points : suppression du droit d'exportation sur tous les produits de l'île, réforme des tarifs douaniers, abaissement des droits de douane à l'entrée en Espagne des sucres et miels de Cuba, traité de commerce entre l'Espagne et les nations étrangères, particulièrement les États-Unis. Les trois partis précédents : Parti de l'union constitutionnelle, Parti réformiste et Parti libéral autonomiste représentent en somme des nuances variées de la juridiction coloniale, approuvée par tous leurs membres. Pour eux tous, Cuba est et doit rester une partie de l'Espagne : colonie ou province. Or, le consul français Monclar le dit brutalement en 1886, il existe « dans l'île un groupe de cinq cent mille Noirs que l'Espagne aura toujours de la peine à considérer comme hidalgos ».

      Le Parti révolutionnaire cubain

      À Cuba se constitue très tôt, forgé au combat, un Parti révolutionnaire cubain qui entreprend sous la direction d'hommes lucides, tels José Martí et Antonio Maceo, d'appliquer sa théorie révolutionnaire pour sortir Cuba du guêpier colonialiste et impérialiste. Les bases du Parti révolutionnaire cubain sont jetées en novembre-décembre 1891 en Floride à Cayo Hueso et à Tampa où résident de nombreux émigrés cubains. Un programme d'action en neuf articles est alors adopté, avec un objectif déterminé : « l'indépendance absolue de l'île de Cuba » ; le Parti révolutionnaire cubain s'appuie sur le peuple des opprimés. De plus, c'est un parti clandestin régi par des statuts secrets. Quatre ans plus tard, le projet de guerre révolutionnaire d'indépendance devient une réalité et les événements se précipitent. Le 29 janvier 1895, le soulèvement armé est proclamé de New York, le 24 février l'étincelle est mise dans l'île et, le 25 mars, José Martí et Máximo Gómez rédigent le manifeste de Montecristi pour justifier leur lutte.

      José Martí (1853-1895), dont le nom reste attaché aux destinées du Parti révolutionnaire cubain, est né à La Havane le 28 janvier 1853 ; il a eu une carrière aventureuse de révolutionnaire dès son plus jeune âge, n'ayant pas dix-huit ans quand il fut forcé d'émigrer au début de la guerre de Dix Ans (15 janvier 1871) après avoir été enfermé, les fers aux pieds, sous le numéro matricule 113 aux carrières de San Lázaro. Martí acquiert dans l'exil – il vit d'abord en Espagne (1871-1874), puis au Mexique (à partir de février 1875), au Guatemala (à partir de janvier 1877), au Venezuela et aux États-Unis (à partir de janvier 1880) – une expérience révolutionnaire qu'il s'empresse de mettre en pratique pour libérer son pays. Le manifeste de Montecristi est un document exceptionnel dans lequel se déploient la sagacité politique et la vision extraordinaire de Martí. Le Parti révolutionnaire cubain souligne certains objectifs décisifs : la nouvelle phase de guerre de la révolution d'indépendance commencée à Yara. Le Parti révolutionnaire cubain entreprend une guerre d'indépendance « inextinguible », il veut éviter les erreurs commises par les « républiques féodales théoriques de l'Amérique espagnole ». Il préconise une guerre du peuple menée démocratiquement, avec l'appui des masses opprimées afro-cubaines. Martí s'emploie à réunir toutes les énergies. Il commence par s'appuyer sur des bases sociales constituées de groupes d'exilés politiques et de travailleurs émigrés. Patiemment, il tisse un impressionnant réseau de comités, de sous-comités et de cellules à travers tout le continent américain. Les États-Unis viennent en tête avec une soixantaine de sous-comités : à Philadelphie, à La Nouvelle-Orléans et dans plusieurs villes du littoral de la mer des Caraïbes. Il y a aussi des cellules dans les pays suivants : Mexique, Chili, Pérou, Colombie, Brésil, Bolivie, Venezuela, Saint-Domingue. Tous ces groupements sont coiffés par un comité révolutionnaire dirigé par un comité central présidé par José Martí. Sa clairvoyance va si loin qu'il parvient dans un saisissant raccourci prophétique à identifier les deux adversaires irréductibles de toute tentative pour former une nation cubaine. Le parti se donne pour mission secrète de combattre l'État colonial jusqu'à l'indépendance pour se libérer de la pesante tutelle de l'Espagne, et d'éviter de tomber dans le piège de l'intervention des États-Unis, qui n'attendent que cette occasion pour s'installer à Cuba car « ... une fois les États-Unis à Cuba, qui les en sortira ! ». Or Martí sait qu'il existe « un plan plus ténébreux que ceux que nous avons connus jusqu'à présent. C'est le projet infâme qui consiste à contraindre l'île, à la précipiter dans la guerre, pour avoir le prétexte d'y intervenir et, paré du prestige de médiateur et garant, d'y rester. »

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      Son objectif économique à court terme est d'abattre les sources de profit de l'État colonial en portant la guerre dans les riches provinces de l'Ouest (Pinar del Río, La Havane, Matanzas), qui n'avaient pas été touchées par la guerre de Dix Ans, et en s'attaquant ainsi au commerce d'exportation. À plus long terme, il projette de réorienter l'économie cubaine en réformant les structures de production considérées non plus en fonction des marchés de consommation des métropoles dominantes, mais par rapport aux nécessités du marché intérieur.

      Le mouvement annexionniste

      L'historiographie cubaine a consacré le terme anexionismo (annexionnisme) pour caractériser une impulsion politique partie simultanément de Cuba et des États-Unis dans le premier quart du xixe siècle et qui trouva en Jefferson et en John Quincy Adams des promoteurs très intéressés. Leur projet avorta par peur d'avoir à affronter l'Angleterre dans une guerre. Mais le mouvement réapparut, très vivace, vers 1840, sous la pression de l'aggravation de la fiscalité coloniale, du capitalisme colonial associé à l'accroissement du capital américain dans l'île, des courants abolitionnistes et de la peur d'une rébellion des Afro-Cubains et d'une transformation des rapports de production esclavagistes.

      De violentes insurrections d'esclaves qui éclatent en 1840-1850 jettent une grande partie de la classe des propriétaires terriens, effrayés mais accrochés à leurs profits esclavagistes, dans les bras du Sud des États-Unis, seul capable à leurs yeux de les protéger efficacement et de les aider à perpétuer le système. La fidélité à l'Espagne, qui jusqu'ici a été l'apanage de cette classe qui attendait des réformes de la métropole, s'en trouve très compromise. Deux groupes s'affrontent : ceux qui prônent l'annexion aux États-Unis, comme le général Don Narciso López, et qui n'ont qu'un désir : maintenir l'appareil d'État colonial et écraser le nationalisme naissant, révolutionnaire, de la classe des gens de couleur ; ceux qui refusent de jouer la carte des États-Unis et veulent rester à l'ombre de l'Espagne, comme José Antonio Saco, qui rédige en 1848 contre l'annexion une brillante diatribe intitulée Idées sur l'incorporation de Cuba aux États-Unis.

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      Répression contre les Nègres et promesses de réformes faites aux maîtres blancs affaiblissent le mouvement annexionniste dans la décennie 1855-1865, mais la guerre de Dix Ans remet tout en cause. Le problème se repose avec éclat, dans la décennie 1880-1890, avec la crise économique qui marque une période de transition du capitalisme colonial à l'impérialisme où dominent les grands trusts américains. Entre 1890 et 1895, l'annexionnisme se découvre de nombreux adeptes qui n'hésitent pas à envoyer en délégation un groupe de planteurs et d'hommes d'affaires qui vont de Cuba à Madrid pour « justifier et appuyer la représentation de Mr. Forster ». C'est le moment des préliminaires du traité de réciprocité hispano-américain, en 1891. La délégation, à son retour, manifeste ouvertement ses inclinations annexionnistes par des discours partisans. De connivence avec ces bourgeois cubains pressés de se mettre au service des États-Unis, on trouve des « Espagnols riches qui se montrent de plus en plus annexionnistes, moins en haine des Cubains que par besoin de garantie pour leur sécurité et leurs biens ». Un observateur français, le consul Paul Martin, déclare à ses supérieurs en septembre 1898 : « J'ai tenu Votre Excellence au courant du mouvement d'opinion qui porte les Espagnols péninsulaires à désirer l'annexion aux États-Unis. »

      José Martí a sévèrement fustigé ceux qui s'apprêtent à vendre leur pays aux États-Unis et à changer de maîtres : « Jamais n'ont été si près de converger les annexionnistes aveugles de l'île et les annexionnistes yankees. » Quant aux annexionnistes yankees, ils se démènent dans la voie nouvelle que leur offre la diplomatie du dollar inaugurée au milieu du xixe siècle. En 1854, Cuba est mise aux enchères : la mise à prix est fixée à 120 millions de dollars maximum. Les vendeurs sont les ministres des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de la France et de l'Espagne qui signent le manifeste d'Ostende fixant l'opération. Les enchères commencent aussitôt, justement aux États-Unis, par la voix du président Pierce qui offre 100 millions de dollars et laisse entendre qu'il peut y ajouter de 20 à 30 millions. Cinq ans plus tard, le Sénat des États-Unis envisage trois solutions pour Cuba : la possession de l'île par une puissance européenne, l'indépendance ou l'annexion. Seule la dernière solution est retenue et la voie de la négociation est conseillée de préférence à celle de la conquête, coûteuse en définitive. Beaucoup de sudistes en 1858 pensent, comme ce notable (Stephen A. Douglas), que « notre destin est de posséder Cuba et c'est une folie de discuter la question. Elle appartient naturellement au continent américain. » Leur défaite et la destruction du système esclavagiste dans le Sud provoquées par la guerre de Sécession repoussent le problème de l'annexion. L'Espagne refuse ces propositions et ce n'est qu'en 1898 que, battue sur le terrain militaire, ruinée financièrement, ne voulant pas perdre la face, elle consent à passer la main, sous le manteau, aux États-Unis, après un simulacre de guerre de trois mois.

      La guerre hispano-cubaine (1895-1898)

      Artillerie de marine - crédits : Hulton-Deutsch/ Corbis Historical/ Getty Images

      Artillerie de marine

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      Au début des hostilités, en février 1895, les Espagnols s'imaginent qu'ils vont mater l'insurrection en expédiant « une armée de cent mille hommes car, affirme le Premier ministre Cánovas del Castillo, nous voulons mettre fin à cette lutte une fois pour toutes ». L'Espagne possède dans l'île 21 777 soldats sur place. Quelques mois plus tard, en octobre 1895, Madrid a déjà dépêché 80 000 soldats et se dispose à en envoyer 35 000 autres en novembre, commandés par les généraux Marín et Prado. Les forces espagnoles s'évaluent à 150 000 hommes en juin 1896 et comptent 40 000 soldats de plus en août de la même année. À ce moment, les troupes de répression sont commandées par trois lieutenants généraux (Marín, Prado et Valera), dix généraux de division et vingt-cinq généraux de brigade. En décembre 1896, l'armée péninsulaire compte près de 300 000 hommes en opération. Si l'on compare ce nombre au chiffre de la population cubaine évaluée à 1 800 000 habitants, on trouve un rapport de un soldat pour six habitants à Cuba, record inégalé dans l'histoire mondiale de la répression.

      La guerre révolutionnaire

      José Martí, Antonio Maceo et les autres chefs du Parti révolutionnaire cubain ont élaboré une théorie politique de la guerre du peuple, qu'ils expérimentent, en s'appuyant sur une stratégie de guerre « inextinguible », sur les masses cubaines, en particulier sur la population afro-cubaine qui a l'expérience de la résistance des negros cimarrones, et sur les cadres du parti formés à l'extérieur. Les insurgés cubains veulent épuiser l'Espagne, la ruiner financièrement et pour cela comptent sur le temps qui joue en leur faveur. Le manifeste de Montecristi parle sans détour d'une « guerre inextinguible » qui doit aboutir inexorablement à une « victoire rationnelle ». Le déploiement des opérations militaires se fait donc à la campagne, de préférence dans des zones montagneuses et boisées. C'est ainsi que se trouve privilégiée la province de Santiago de Cuba où s'élève la sierra Maestra qui sert, comme en 1868, de point d'appui de la guérilla. Trois régions militaires sont délimitées ; Maceo commande à Santiago, Gómez à Puerto Príncipe, Roloff à Santa Clara. Les objectifs stratégiques de Maceo sont très clairs : d'abord consolider sa base d'appui principale (à Santiago), créer une multitude de bases secondaires, organiser le pouvoir politique du peuple en armes autour de chaque base d'appui, détruire le pouvoir colonial et encercler les centres urbains où subsiste l'oppression tentaculaire du gouvernement colonial. La mobilisation et la politisation des masses sont entreprises pour aider les insurgés ; en particulier une intense campagne idéologique vise des régions moins évoluées politiquement : Pinar del Río, Matanzas, La Havane. Le recrutement des militaires s'effectue beaucoup mieux dans les zones de résistance afro-cubaine : Palenque de Sigua, Palenques de Limones, Gran Palenque del Frijol, Palenque de Moa, Palenques de Toa, Rumna, Maluala, Todos Tenemos, Caujerí, Vengan, Sábalos et La Palma. La révolution s'étend également dans la région sucrière de Matanzas, où les autorités constatent avec inquiétude que même les Nègres « sont disposés à se joindre aux forces insurrectionnelles », des Nègres qu'ils croyaient à jamais abrutis par quatre siècles d'esclavage. Toutes les catégories sociales mécontentes de l'État colonial sont touchées par la propagande politique des révolutionnaires ; on signale le départ de nombreux habitants des villes et la disparition de médecins, d'avocats, de propriétaires fonciers qui vont rejoindre les insurgés. La situation s'aggrave à mesure que s'effectue la mobilisation des masses, et les autorités de répression s'aperçoivent qu'il ne s'agit plus « d'une insurrection mais d'une véritable révolution qui inquiète au plus haut point le gouvernement espagnol ». Les combattants du Parti révolutionnaire cubain ont élaboré une technique d'invasion par mer qui a un triple objectif : procéder au débarquement des principaux chefs militaires qui vivaient en exil, prévoir l'approvisionnement en matériel, armes, munitions, médicaments, assurer la communication avec les bases étrangères (finances). L'Espagne a beau renforcer la surveillance des côtes cubaines avec l'aide du gouvernement fédéral qui lui vend des canonnières ou qui l'aide avec ses propres navires, les insurgés parviennent à déjouer les lignes de défense avec une grande facilité. L'armée des insurgés se compose de troupes spéciales levées en des points déterminés par des chefs locaux dont la réputation a su grouper autour d'eux un certain nombre de partisans. Du point de vue de la hiérarchie, le commandement supérieur est exercé sans conteste par Máximo Gómez, né à Santo Domingo en 1836 et surnommé El Chino Viejo. Il porte le titre de général en chef de l'armée de la liberté. Après lui vient le mulâtre Antonio Maceo, jouissant lui aussi d'un pouvoir très étendu et d'un grand prestige. Il est né à Santiago en 1848 ; d'abord muletier puis volontaire de l'insurrection de 1868, il a gagné ses galons de major-général à la fin de la guerre. Derrière ces deux têtes pensantes viennent d'autres cabecillas tels que José Maceo, le frère d'Antonio, né en 1850, les généraux Bartolomé Masso, Carrillo et García, le Polonais Roloff, cubain de cœur, et des chefs militaires comme Zerafín, Sánchez, Zayas, Lácrez, José Races, Quintín Banderas. Sur le front proprement dit, la tactique de guerre de guérilla comporte chez les révolutionnaires cubains trois niveaux d'exécution, la guerre de mouvement, la guerre de souplesse et la guerre clandestine.

      Défaite de l'armée espagnole et intervention des États-Unis
      Insurrection anticoloniale à Cuba, 1896 - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

      Insurrection anticoloniale à Cuba, 1896

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      Quant à l'Espagne, elle livre une guerre coloniale qui se déroule de son point de vue en trois phases, chacune placée sous la houlette d'un généralissime. Trois chefs militaires prestigieux, valeureux, qui vont pourtant échouer lamentablement dans leur effort de « pacification ». Trois échecs retentissants qui causeront leur perte d'abord, et celle de l'Espagne ensuite : échec du maréchal Martínez Campos ; échec du général Weyler ; échec du maréchal Blanco. Malgré la guerre à outrance que fait Weyler de février 1896 à octobre 1897 et qui conjugue le pillage systématique, la destruction de la production et de la propriété, les camps de la mort (camps de concentration), les troupes insurgées transforment leurs opérations militaires et s'engagent dans un processus de guerre de position caractérisée par des mouvements de combat de corps d'armée, en 1896. L'effondrement de l'État colonial est tel à la campagne – alors que les villes sont encerclées et que le pouvoir de l'État colonial s'asphyxie – que l'Espagne dépêche à Cuba en octobre 1897 le maréchal Blanco avec l'intention secrète de concéder l'autonomie. C'est compter sans la bourgeoisie conservatrice qui entend faire appel aux États-Unis. En septembre 1895, les insurgés se sont donné une constitution, celle de Jimaguayu, et un gouvernement provisoire. Deux ans plus tard, alors que Martí et Maceo sont tombés au champ d'honneur, une assemblée des représentants se réunit le 2 septembre 1897 pour modifier la constitution (Constitution de Yara) et nommer un nouveau Conseil de gouvernement.

      Guerre hispano-américaine à Cuba, 1898 - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

      Guerre hispano-américaine à Cuba, 1898

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      Au début de l'année 1898, les Espagnols, battus sur le terrain, n'ont plus qu'une solution, comme le rapporte l'ambassadeur de France à Madrid, qui apprend au cours d'une entrevue avec la reine d'Espagne que des « préoccupations dynastiques et la crainte d'une révolution dans la Péninsule » font que « des esprits sages pensent qu'il vaudrait mieux en finir de suite et voient dans l'attitude des États-Unis une ressource ». Depuis 1896, la situation s'est dégradée brutalement dans la Péninsule. L'Espagne est menacée par une crise économique et financière, par une crise sociale – des soulèvements ont lieu à l'occasion du départ des réservistes en Navarre, en Aragon, en Catalogne et dans les ports d'embarquement à destination de Cuba – et par une crise politique qui se caractérise par le réveil des carlistes. La monarchie espagnole est en péril, il lui faut trouver une échappatoire pour sortir la tête haute du piège cubain. Après l'explosion du croiseur Maine – navire chargé par l'État fédéral américain d'une mission de protection des intérêts de Washington –, le 15 février 1898, dans le port de La Havane, le gouvernement espagnol poursuit une politique systématique de provocation envers les États-Unis. Enfin la décision d'intervention militaire est prise le 11 avril 1898 par le président Mac Kinley, se fondant sur l'incapacité évidente de l'Espagne à terminer la lutte, l'éventualité imminente de l'indépendance de Cuba, le principe de l'incapacité des Cubains à s'autodéterminer. Les hostilités vont durer à peine trois mois ; un simulacre de combat sur mer et sur terre s'achève par une substitution des pouvoirs à Cuba et par la signature du traité de Paris le 10 décembre 1898. L'importance des investissements français dans la guerre hispano-cubaine de 1895-1898, engagés surtout en Espagne, explique le rôle de médiateur que joue Paris.

      Néo-colonialisme et dictatures

      Après la reddition de l'armée espagnole à Santiago de Cuba, les États-Unis mettent en place un gouvernement militaire d'occupation jusqu'en 1902. L'indépendance formelle est accordée le 20 mai 1902, mais dans la Constitution l' amendement Platt donne aux États-Unis des bases navales (Guantánamo) et le droit d'intervenir à Cuba. Après la dissolution de l'armée de libération cubaine, une armée de mercenaires est créée par les occupants. Des présidents corrompus, véritables fantoches imposés par l'État fédéral nord-américain, s'empressent de remplir leur mission qui est de livrer les richesses du pays au maître étranger. C'est ainsi que les meilleures terres arables, les sucreries les plus importantes, les réserves minérales, les industries de base, les chemins de fer, les banques, les services publics et le commerce extérieur passent sous le contrôle étroit du capital monopoliste des États-Unis. Des interventions militaires nord-américaines ont lieu en 1906-1909 à la demande du premier président de Cuba, Tomás Estrada Palma, farouche partisan de l'annexion, et en 1917-1919. Cela n'empêche pas la montée des luttes populaires entre 1915 et 1933, surtout dans le secteur ferroviaire. Un Parti communiste est fondé en 1925 par Balino et Mella. Apparaissent également à cette époque les premiers syndicats nationaux tels que le Syndicat national des ouvriers de l'industrie sucrière (SNOIA). Pour tenter d'endiguer les luttes ouvrières, une dictature féroce est instaurée avec Gerado Machado (1925-1933). La crise de 1920-1925 et celle de 1926-1929 s'accompagnent de la dépression de 1929 à 1933, qui se traduit par la réduction du commerce extérieur, surtout des exportations de sucre, la réduction de la production de sucre (176 sucreries en 1926, 135 en 1933), la réduction de la durée de la récolte, qui passe de 120 à 66 jours en 1933, et par la réduction des revenus. Après la chute de Machado le 12 août 1933, le gouvernement Grau San Martín, sous la pression populaire, parvient à obtenir l'abrogation de l'amendement Platt par le traité de 1934. Un ministère du Travail est créé, les femmes ont le droit de vote, l'autonomie universitaire est garantie et l'île des Pins retourne sous la souveraineté cubaine. De plus, un régime répressif freine le mécontentement populaire. Le fer de lance de cette répression est l'armée de mercenaires organisée par les Nord-Américains pendant la première occupation. Elle devient en septembre 1933 l'instrument docile d'un groupe de sergents insurgés et de leur caudillo Fulgencio Batista. Un nouveau président, le colonel Carlos Mendiota, succède à Grau, déposé par l'armée le 4 septembre 1933. En voulant s'attaquer aux syndicats, il provoque une grève massive en mars 1935.

      Fulgencio Batista, 1955 - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

      Fulgencio Batista, 1955

      En mai 1936, Miguel Mariano Gómez est élu président. Mais cet ancien maire de La Havane se heurte immédiatement aux militaires. Il est destitué la même année et c'est son vice-président, Laredo Brú, qui s'emploie à obéir à Batista. Ce dernier, l'homme fort du régime depuis 1933, réussit à se faire élire président après la promulgation de la Constitution de 1940. Il ne réussit pas cependant à obtenir un second mandat en 1944 et doit se retirer à Miami pour jouir en paix des millions qu'il a accumulés. Le vainqueur des élections est Grau San Martín, chef du Parti authentique, auquel succède Prío Socarras (1948-1952) ; tous deux réussissent à combiner répression et corruption dans une caricature grotesque de la démocratie représentative. Le 10 mars 1952, le coup d'État de Batista met fin à la constitution : les partis sont proscrits et la corruption est portée à son degré le plus élevé. La dictature de Batista dure jusqu'au 31 décembre 1958. La répression et le pillage atteignent un paroxysme. Les groupements nord-américains possèdent en 1956 90 % des services publics du téléphone et de l'électricité, 50 % des chemins de fer et 40 % de la production sucrière. Le capital monopoliste qui s'était investi dans les banques contrôle les industries minières, le tabac, le commerce extérieur et le tourisme. Cuba est alors complètement sous la dépendance économique et financière des États-Unis. Cette dépendance est telle que Cuba doit importer en 1958 des États-Unis près de la moitié de ses légumes et fruits, frais et en conserve. Vu la faiblesse de sa production vivrière, elle est obligée de consacrer plus de 200 millions de dollars à l'achat d'aliments ou de matières premières d'origine agricole. À La Havane se concentre une classe de privilégiés vivant dans le confort au milieu d'une population en augmentation croissante depuis 1925 (4,8 millions en 1943). Le chômage s'aggrave partout, touchant 600 000 ouvriers agricoles.

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      Écrit par

      • : enseignante ATER de science politique à l'Institut des hautes études de l'Amérique latine, chargée de cours à Sciences Po Poitiers (cycle ibéro-américain de Sciences Po Paris)
      • : maître de conférences, chargée de cours à l'Institut des hautes études de l'Amérique latine
      • : professeur d'histoire, directeur du Centre de recherches Caraïbes-Amériques
      • : agrégé de géographie, maître de conférences à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
      • : licenciée en géographie
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      Cuba : carte physique - crédits : Encyclopædia Universalis France

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      • CUBA, chronologie contemporaine

        • Écrit par Universalis
      • AFRIQUE (Histoire) - Les décolonisations

        • Écrit par
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        ...raison immédiate tenait, semble-t-il, à l'évolution de la situation en Angola, où une guerre de succession opposait maintenant le M.P.L.A., appuyé par les Cubains, à l'U.N.I.T.A., soutenue par l'Afrique du Sud. Des flots de réfugiés et de jeunes recrues vinrent grossir les rangs de la S.W.A.P.O. en Zambie...
      • ALLIANCE POUR LE PROGRÈS

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      • ALONSO ALICIA (1920-2019)

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        La danseuse et chorégraphe cubaine Alicia Alonso a marqué l’histoire du ballet classique du xxe siècle. Légende de son vivant, interprète hors du commun et à forte personnalité, elle a su faire du Ballet national de Cuba l’une des meilleures compagnies du monde et fonder « l’école cubaine...

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