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COMMERCIAL DROIT

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Le droit commercial est une branche du droit privé qui, par dérogation au droit civil, réglemente de manière spécifique certaines activités de production, de distribution et de services. Il englobe à la fois le commerce au sens courant du terme, c'est-à-dire les activités d'échange, et l' industrie, donc des activités de transformation. Le droit commercial ne régit cependant pas l'ensemble de la vie économique. Pour des raisons socio-historiques, les agriculteurs, les artisans et les membres de professions libérales demeurent soumis au droit civil, même si leur statut tend à se rapprocher de celui des commerçants. Si cette évolution continue, la distinction traditionnelle du droit civil et du droit commercial sera remplacée par celle du droit des activités économiques ou professionnelles, d'une part, et du droit des relations personnelles et de la consommation, d'autre part.

Le droit commercial a pour acteurs des personnes physiques, les commerçants, mais aussi des sociétés, notamment les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés anonymes. Ces deux catégories sont parfois désignées sous le vocable d'entreprises commerciales. Mais il ne s'agit que d'une commodité de langage, sans valeur juridique. Le droit commercial ne régit pas les entreprises, mais seulement les personnes.

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L'existence du droit commercial se révèle lorsque, face à une situation de fait identique (par exemple, l'établissement d'un bail ou la cessation des paiements d'un débiteur, etc.), un système juridique prévoit l'application alternative de deux règles, l'une relevant du droit commun, l'autre d'un droit exceptionnel, selon la nature de l'acte envisagé ou la qualité de son auteur.

En revanche, il est plus difficile d'en définir l'essence. Une querelle interminable, et en partie stérile, oppose ceux qui voient dans le droit commercial le droit des commerçants (conception subjective) et ceux qui en font le droit des opérations ou des actes de commerce (conception objective). Il est d'autant plus délicat de trancher que le Code de commerce (art. 1) définit le commerçant comme celui qui accomplit des actes de commerce à titre de profession habituelle. Compte tenu de l'incertitude de ces bases doctrinales, certains proposent de parler non plus de droit commercial, mais de droit des affaires, de droit de l'entreprise ou de droit des activités économiques. Cette nouvelle terminologie est encore mal fixée, alors que les mots « commerçant » et « commercial » ont, pour les juristes, une signification technique précise.

Historique

Ce sont des considérations historiques qui expliquent en bonne partie l'existence d'un droit commercial distinct du droit civil.

Les commerçants ont toujours été régis par un droit spécifique, car ils avaient recours au crédit beaucoup plus systématiquement que les simples particuliers. En effet, l' acte de commerce le plus habituel est l'achat pour revendre, ce qui implique presque toujours que le commerçant acheteur initial paye son vendeur non pas au comptant, mais avec les sommes qu'il a lui-même retirées des reventes à sa clientèle.

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Les premières traces d'un droit commercial remontent à la très haute antiquité, avec notamment le Code d'Hammourabi (près de deux mille ans av. J.-C.). Toutefois, cet apport se limite au droit maritime et au droit bancaire. Il faut attendre la fin du Moyen Âge pour voir apparaître un droit commercial complet et autonome dans les villes d'Italie (Gênes, Pise, Florence, Venise), de Flandres (Bruges, Amsterdam, Gand, Anvers) et de Champagne (Provins, Troyes, Bar-sur-Aube). Notamment à l'occasion des foires, les communautés de marchands mettent sur pied à la fois des mécanismes simplifiés de paiement, par l'utilisation des lettres de change, et des procédures d'exécution à l'égard des défaillants (faillites).

Les Temps modernes voient la création des tribunaux de commerce par un édit de Michel de L'Hospital (1563). Ceux-ci appliquèrent un droit de plus en plus autonome, distinct du droit romain, du droit canonique et des coutumes d'origine germanique. À la fin du xviie siècle, Colbert et Savary codifièrent ce nouveau droit. Mais, si l'ordonnance sur la marine de 1681 est un texte d'une qualité technique remarquable, l'ordonnance sur le commerce de terre de 1673 se présente essentiellement comme un recueil de recettes pragmatiques.

À la fin de l'Ancien Régime, le droit commercial manque de logique et d'idées générales. Contrairement au droit civil, il n'a pas bénéficié des réflexions fondamentales de juristes qualifiés comme Domat ou Pothier. Ce caractère réglementaire est encore accentué par l'influence des corporations, hostiles à la liberté d'établissement et à l'abrogation d'une réglementation tatillonne, qui décourage les innovations.

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La Révolution réalise un double progrès en proclamant le principe, toujours en vigueur, de la liberté du commerce et de l'industrie et en supprimant définitivement les corporations. Ce renouveau allait être sans lendemain, car Napoléon négligea la rédaction du Code de commerce qui, promulgué à la hâte en 1807, est d'une qualité très inférieure à celle de l'admirable Code civil de 1804. En effet, ses rédacteurs se sont bornés à reproduire l'ordonnance de 1673, sans se rendre compte que celle-ci reposait sur le système des corporations, qui avait été abrogé. Toujours en vigueur, le code de 1807 est à l'origine des contradictions et des inexactitudes qui ont grevé et qui minent encore le droit commercial, écartelé entre une application limitée aux seuls commerçants et un domaine qui s'étendrait aux actes de commerce, même accomplis par de simples particuliers.

Le libéralisme triomphant du xixe siècle fut spécialement favorable à l'essor des moyens juridiques qui ont permis le développement du capitalisme moderne : sociétés par actions, chèques, droit de la banque et de la Bourse, ventes commerciales internes et internationales, reconnaissance du fonds de commerce, etc. C'est à cette époque que se mirent en place les principales techniques qui constituent encore aujourd'hui les bases du droit commercial.

À partir de 1914, celui-ci a subi les conséquences de l'interventionnisme de l'État. Il est devenu plus réglementaire et plus impératif. Il a fait une place plus large aux sanctions pénales et a dû admettre, tant bien que mal, à côté des commerçants privés, les activités commerciales des personnes morales de droit public, notamment des sociétés nationales et des sociétés d'économie mixte.

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Le traité de Rome, en 1957, a ouvert une nouvelle étape. Le droit commercial a pris en compte le développement de la concurrence provoqué par la création d'un marché européen unique. Il s'est également engagé, mais de manière plus timide, dans la voie de la déréglementation. La période la plus récente est marquée par l'influence croissante, et en partie déraisonnable, des techniques financières et boursières sur le droit commercial. Les spécialistes de l'ingénierie financière inventent de nouveaux modes de financement, de nouveaux contrats, de nouveaux produits d'épargne sans se préoccuper de l'orthodoxie juridique de leurs constructions.

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne

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