HITTITES
La découverte des Hittites est le résultat d'une longue enquête philologique et archéologique qui débute au temps du déchiffrement des hiéroglyphes égyptiens. Le nom d'un grand pays, en relation avec la cour égyptienne de la XVIIIe dynastie, apparaît dès les premiers textes que lit Champollion : le « Heta », dont les pharaons disent avoir reçu le tribut et dont Ramsès II affirme qu'il le vainquit à Qadesh, en Syrie du Nord. Dans la mesure où l'Orient s'ouvre à la recherche archéologique européenne, on retrouve ici et là, en Syrie du Nord en particulier, d'étranges textes rédigés dans un système d'écriture inconnu, lequel paraît être un système « hiéroglyphique ». Faute d'en connaître l'origine exacte, à tout hasard, on attribue cette écriture aux « Hittites ». En 1887, la découverte fortuite, à Tell el-Amarna, site de l'antique capitale du pharaon hérétique Akhenaton, de la correspondance diplomatique de la cour égyptienne avec ses vassaux de Syrie et les cours de Babylone et d'Assyrie, allait relancer le problème hittite : cette correspondance faisait état des mouvements de l'armée hittite en Syrie et, qui plus est, y figurait également une lettre du roi hittite Souppilouliouma, adressant ses vœux à Akhenaton à l'occasion de son accession au trône.
Deux de ces lettres (dont l'une adressée à un roi d'Arzawa) étaient rédigées dans une langue inconnue, mais dans le système d'écriture cunéiforme mésopotamien, donc lisibles. Bien inspiré, mais s'en repentant presque aussitôt, le savant norvégien Knudtzon, en reconnaissait l'origine indo-européenne et en fournissait une première traduction approchée. En 1906, une expédition allemande, dirigée par Hugo Winkler, obtenait la concession des fouilles sur le site de Boghaz-Köy, connu depuis 1839, énorme ensemble de ruines qui paraissait particulièrement prometteur. Après quelques semaines de travail, Winkler recueillait environ dix mille tablettes, écrites pour la plupart en cette langue que la correspondance de Tell el-Amarna désignait comme étant celle d'Arzawa. Rédigés en cunéiforme, la plupart des textes pouvaient être lus mais non interprétés, d'autres, par contre, étaient rédigés en babylonien, et il apparut bientôt que le site sur lequel ils avaient été découverts était celui de la capitale des Hittites, portant alors le nom de Hattousas, et que les textes recueillis constituaient une partie des archives des rois hittites. En 1915, le savant tchèque B. Hrozny démontrait que la langue dans laquelle étaient rédigés les documents originaux des archives de Boghaz-Köy était un dialecte indo-européen, confirmant ainsi l'intuition de Knudtzon. Dès lors se créait une nouvelle discipline de l'orientalisme : l'hittitologie.
Partir d'infimes commencements pour parvenir aux plus hauts destins impériaux, tel a été le sort des Hittites. Si l'aventure s'est achevée par une tragédie, la raison en est à chercher non dans une défaillance de volonté, mais dans la simple loi du nombre qui fait que les civilisations ne peuvent résister à l'assaut des Barbares.
Les Hittites et des groupes apparentés parvinrent en Anatolie d'une antique demeure où, sans doute, ils communiquaient avec leurs cousins indo-européens au travers des plaines eurasiennes ; ils y arrivèrent par vagues successives ou parallèles, alliés en particulier à leurs proches parents, les Louwites, à d'autres tribus encore moins certainement identifiées. Ils apparaissent dans l'histoire au moment où, au xixe siècle avant notre ère, les marchands assyriens ouvrent leurs comptoirs à Kanesh (aux environs de l'actuelle Kültepe, au sud de la boucle du Halys), dans la plaine qui entoure le mont Argée, et en d'autres lieux, sur la route qui mène de la capitale assyrienne[...]
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Écrit par
- Maurice VIEYRA : chargé de recherche au C.N.R.S.
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