INITIATION
L'emploi du terme « initiation » s'est généralisé aujourd'hui pour signifier le fait de mettre au courant un individu aussi bien d'une science, d'un art que d'une profession (par exemple : initiation aux mathématiques), alors qu'il désignait primitivement et surtout l'ensemble des cérémonies par lesquelles on était admis à la connaissance de certains « mystères ». Il est facile de comprendre d'ailleurs comment et pourquoi l'on est passé du sens plus ancien au plus moderne, les pratiques de divers métiers (ceux de forgeron, d'alchimiste, de maçon par exemple) étant gardées secrètes par les maîtres qui ne les révélaient que peu à peu à leurs apprentis. Les ethnologues ont été amenés à distinguer trois types d'initiations : celles qui font entrer les jeunes gens dans la catégorie d'adultes (initiations tribales), celles qui ouvrent l'accès à des sociétés secrètes ou à des confréries fermées (initiations religieuses), celles qui font abandonner la condition humaine normale pour accéder à la possession de pouvoirs surnaturels (initiations magiques). Si le premier type comporte toujours une partie religieuse et fonde le rituel sur des archétypes mythiques, il constitue un rite de passage profane, au contraire du deuxième ; si le premier a pour fonction d'intégrer l'individu dans la société, le troisième au contraire l'en sépare (J. Cazeneuve) ; malgré ces différences, il est possible de trouver une définition générale valable pour les trois : l'initiation est toujours un « processus destiné à réaliser psychologiquement le passage d'un état, réputé inférieur, de l'être à un état supérieur » (S. Hutin).
Les sociétés archaïques et historiques
Pour l'Antiquité orientale et gréco-romaine, seule est connue l'initiation de type religieux, qui permet l'affiliation à des confréries religieuses, comme celles des curètes, des dactyles, des corybantes ou des cyclopes, et l'admission à des cultes à mystères, comme ceux d'Isis et d'Osiris, de Bacchus et de Déméter, de Mithra, enfin, qui va s'opposer au « mystère » chrétien (le baptême, entrée initiatique dans l'Église chrétienne ayant été d'abord un rituel secret). Cependant, par derrière ces confréries religieuses, on pressent l'existence de la « maison des hommes » caractéristique d'une société tribale, de même que les « mystères », anciens cultes nationaux dénationalisés, laissent aussi deviner à l'arrière-plan des initiations de type tribal. Non que l'on puisse parler d'une évolution logique du premier des trois types d'initiation au deuxième ; il s'agirait plutôt, d'après H. Hubert et M. Mauss, de toute une série de phénomènes de désintégration et de réintégration : « Les idées et les pratiques religieuses, en se détachant du système social auquel elles ont appartenu, changent de caractère. » Quoi qu'il en soit de ce problème qui reste toujours discuté, faute de témoignages historiques suffisants, les cérémonies d'initiation paraissent toujours suivre, dans l'Antiquité, un ordre déterminé.
La première étape était constituée par les rites préalables de purification. Même pour les éranes et les orgeons, associations ouvertes aux femmes, aux étrangers et aux esclaves, des interdits empêchaient les personnes trop profondément souillées de s'approcher des mystères : bâtards, criminels, courtisanes ; et ceux qui pouvaient s'en approcher devaient auparavant se soumettre à des rites, publics, de purification (y compris quelquefois la « confession des péchés »). Les rites, également publics, de sacrifices préparatoires, de processions, accompagnés de chants et de danses, établissaient le cheminement du profane au sacré[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Roger BASTIDE : professeur honoraire à l'université de Paris-I
Classification
Média
Autres références
-
AFRIQUE NOIRE (Culture et société) - Religions
- Écrit par Marc PIAULT
- 9 622 mots
- 1 média
...terminologies, son autel, sa maison, son époux, son cheval. Lorsque le dieu aura manifesté son choix en provoquant toute une série de troubles chez l'individu, une initiation sera nécessaire afin que soient connues les intentions du dieu. Selon les cas, l'esprit possesseur est apaisé et expulsé de l'homme qu'il... -
AFRIQUE NOIRE (Arts) - Histoire et traditions
- Écrit par Jean DEVISSE , Encyclopædia Universalis , Francis GEUS , Louis PERROIS et Jean POLET
- 6 690 mots
...Habituellement chargées de préserver des regards importuns les reliques elles-mêmes, certaines statues servaient occasionnellement de marionnettes rituelles lors des cérémonies d'initiation des adolescents. L'officiant sortait alors les crânes, les présentait aux jeunes garçons à initier et les nommait tout... -
ALCHIMIE
- Écrit par René ALLEAU et Encyclopædia Universalis
- 13 647 mots
- 2 médias
...était déjà engagée dans son sujet matériel, réel, qui, nécessairement, ressentait un désir d'interpénétration entre ses propres qualités et les natures élémentaires primordiales. C'est du désir éprouvé par l'âme pour les éléments que dérive le principe qui est à l'origine des Balances (mawāzin). -
AMÉRIQUE LATINE - Les religions afro-américaines
- Écrit par Roger BASTIDE
- 3 176 mots
- 1 média
...appelés, suivant les régions, candomblés, xangô ou batuques – par des confréries, surtout féminines, dans lesquelles on entre par un rituel d' initiation, identique, en plus ramassé dans le temps, à celui qui est pratiqué au Bénin et au Nigeria. Au cours de danses extatiques, les dieux sont appelés,... - Afficher les 58 références