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LA TRAGÉDIE DU ROI CHRISTOPHE, Aimé Césaire Fiche de lecture

Aimé Césaire - crédits : Sergio Gaudenti/ Sygma/ Getty Images

Aimé Césaire

Publiée pour la première fois en 1963, La Tragédie du roi Christophe est, avec le Cahier d'un retour au pays natal, l'œuvre majeure du Martiniquais Aimé Césaire (1913-2008). Elle fut créée l'année suivante au festival de Salzbourg, dans une mise en scène de Jean-Marie Serreau, avec l'acteur sénégalais Douta Seck dans le rôle principal, traduite en de multiples langues et représentée dans de nombreux pays. Elle est entrée en 1991 au répertoire de la Comédie-française, dans une mise en scène du cinéaste burkinabé Idrissa Ouedraogo et avec, selon le vœu d'Antoine Vitez, des acteurs blancs, pour signifier la portée universelle de la pièce.

La loi du tyran

Aimé Césaire avait inséré en 1946 dans son recueil poétique Les Armes miraculeuses un texte dramatique en prose, « Et les chiens se taisaient », sous-titré « Tragédie », lancé par une première phrase programmatique : « Bien sûr qu'il va mourir le rebelle. » En 1956, année décisive de sa rupture avec le Parti communiste français, l'écrivain en donne une version mieux adaptée à la scène. Comme s'il éprouvait la nécessité de produire un théâtre qui allie vocation poétique et action politique, qui permette de toucher plus directement le public que cherchent ses poèmes, où dominent les formes du vocatif et de l'impératif. Le souci de l'efficacité scénique du texte se manifeste dans les transformations introduites dans la réédition, en 1970, de La Tragédie du roi Christophe, pour tenir compte de l'effet des représentations.

Le sujet de la pièce est pris dans l'histoire d'Haïti, que Césaire connaît bien : il a fait en 1944 un séjour de plusieurs mois dans ce pays « où la négritude se mit debout pour la première fois » ; il a publié en 1960 une étude historique fort documentée et très neuve sur Toussaint Louverture, la Révolution française et le problème colonial. Sa pièce fait la chronique du nouvel État indépendant entre 1806 et 1820, quand, après la mort de Dessalines, vainqueur des Français et fondateur, sous le nom de Jacques Ier, de l'Empire d'Haïti, celui-ci se scinde en deux entités : une république dirigée par le mulâtre Pétion dans la capitale Port-au-Prince et un royaume noir, autour de la ville de Cap-Haïtien, sous la direction de Christophe, « ancien esclave, ancien cuisinier, ancien général ».

La tragédie commence quand Christophe se fait proclamer roi sous le nom de Henri Ier et qu'il organise son royaume sur le modèle des États européens : « Allons/ de noms de gloire je veux couvrir vos noms d'esclaves,/ de noms d'orgueil nos noms d'infamie,/ de noms de rachat nos noms d'orphelins !/ C'est d'une nouvelle naissance, Messieurs, qu'il s'agit ! » Il institue une cour avec une noblesse à laquelle un maître de cérémonies (blanc) inculque les bonnes manières. Il impose au peuple la contrainte d'un bon plaisir despotique, l'oblige à construire dans des conditions effroyables la colossale citadelle La Ferrière. Mégalomane sanguinaire, abandonné de tous, victime d'une attaque de paralysie, Christophe se suicide à la fin de la pièce.

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Aimé Césaire - crédits : Sergio Gaudenti/ Sygma/ Getty Images

Aimé Césaire

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  • CÉSAIRE AIMÉ (1913-2008)

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    Le chef-d'œuvre de Césaire, La Tragédie du roi Christophe (1963), représenté dans le monde entier, prend son sujet dans un épisode de l'histoire haïtienne, le destin de Christophe, « ancien esclave, ancien cuisinier, ancien général, roi d'Haïti ». Cette didascalie résume tout l'enjeu de la tragédie...