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LÉGALITÉ DES DÉLITS & DES PEINES

Le principe de la légalité des délits et des peines est la garantie fondamentale des droits de la personne devant les juridictions répressives. Il s'énonce par l'adage nullum crimen, nulla poena sine lege : il n'y a pas de crime, il n'y a pas de peine sans une loi qui les prévoie. Énoncé dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ce principe se retrouve dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et dans la Constitution du 4 octobre 1958 qui y renvoie. L'article 4 de l'ancien Code pénal français disposait lui-même : « Nulle contravention, nul délit, nul crime ne peuvent être punis des peines qui n'étaient pas prononcées par la loi avant qu'ils fussent commis. » L'article 111-3 du Code de 1993 reformule le même principe : « Nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi, ou pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis par le règlement. » Le principe de la légalité appelle un certain nombre de précisions : le terme loi est un terme générique qui comprend aussi bien les lois proprement dites, c'est-à-dire votées par le pouvoir législatif, que les actes du pouvoir exécutif (décrets, ordonnances, arrêtés et décisions prises par le président de la République en vertu des pouvoirs conférés par l'art. 16 de la Constitution). Le principe de la légalité s'applique à l'incrimination des infractions, à celle de l'état dangereux et à celle des infractions politiques (haute trahison, atteintes à la sûreté de l'État). Par contre, il ne s'applique pas aux infractions disciplinaires.

Le principe de la légalité ne concerne pas seulement les incriminations ; il régit en effet aussi la détermination des peines et des mesures de sûreté : nulla poena sine lege. Appliqué aux peines, le principe de la légalité a été maintes fois battu en brèche : par les dictatures, dans le sens de l'atténuation des garanties attachées aux droits de la personne ; par le jeu des circonstances atténuantes ; par les pouvoirs impartis à l'administration, qui peut modifier une sanction prononcée par l'organe judiciaire, voire prononcer elle-même certaines sanctions administratives. Le principe de la légalité signifie encore, appliqué aux mesures de sûreté, que celles-ci doivent être subordonnées à la constatation préalable d'un état dangereux. La règle nullum crimen, nulla poena sine lege admet deux conséquences très importantes : les magistrats doivent interpréter la loi pénale de manière stricte ; les lois pénales ne rétroagissent pas.

La première conséquence est traditionnellement reprise dans le brocard latin : poenalia sunt restringenda, principe signifiant que, si le législateur a prévu telle peine pour telle infraction, ou la réunion de tels autres éléments pour constituer telle autre infraction, le tribunal ne peut pas passer outre à la volonté dudit législateur en interprétant largement, voire par analogie, la loi pénale ; ainsi, par exemple, le législateur a dû créer une loi spéciale pour incriminer les grivèleries et les filouteries qui ne rentraient ni dans le cadre du vol, ni dans celui de l'escroquerie, ni dans celui de l'abus de confiance. La règle connaît cependant des atténuations : lorsque la loi pénale est favorable au prévenu ou à l'accusé, la jurisprudence peut interpréter la loi de manière extensive. C'est ainsi que certains faits justificatifs ont acquis droit de cité malgré le silence de la loi à leur égard. Cette atténuation n'est cependant pas absolue, et l'on a vu des lois favorables à l'inculpé être interprétées de façon restrictive : ainsi, entre autres, les lois d'amnistie. De toute façon, il est un domaine où le juge possède un certain champ de[...]

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