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LUTHERIE

Le mot lutherie provient de luth, instrument si célèbre qu'il en vint à symboliser la musique. Les facteurs de luths fabriquant également d'autres instruments à cordes, le mot lutherie dériva de cet usage. C'est à partir de 1750 environ que les documents officiels mentionnent les « luthiers ». L'almanach Dauphin de 1777 (cité par P. Loubet de Sceaury) donne de ceux-ci une définition assez large : « Les luthiers sont ceux qui ont l'art de faire et le droit de vendre toutes sortes d'instruments de musique, soit à cordes, ou à vent... » Définition encore valable de nos jours, bien que le terme puisse être pris dans plusieurs acceptions. Il désigne en effet un métier, à condition qu'il présente un caractère artisanal. Lorsqu'il s'agit de production industrielle ou semi-industrielle, le terme de lutherie n'est pas approprié. En revanche, la définition de Sibire (1806) qui restreint l'acception de lutherie à « ce qui se rapporte au violon et à sa famille », bien qu'approuvée par certains luthiers, est par trop exclusive. Lutherie sert également à caractériser la facture instrumentale ou à désigner l'ensemble de la production d'un pays, toutes périodes confondues.

Le métier lui-même est pratiqué à tous les degrés : la réflexion, le bon sens, la culture, l'habileté manuelle ont conduit des luthiers amateurs à innover dans ce domaine, avec des bonheurs divers, ou à susciter des recherches, notamment dans le domaine acoustique. Mais la grande majorité des instruments valables est le fruit d'une solide expérience transmise du maître à l'élève. De nos jours, on assiste en France à un renouveau de la lutherie, sous l'impulsion de quelques maîtres qui ont réussi à imposer leurs modèles au lieu des fades copies de Stradivarius. Les musiciens apprécient le fait de pouvoir choisir parmi les instruments contemporains ceux qui possèdent une personnalité en plus de leurs qualités sonores. En ce qui concerne ces maîtres, dont la production est volontairement limitée, on peut parler de « lutherie d'art », dans la mesure où chaque instrument est un unicum.

Toutefois, si la lutherie d'aujourd'hui, dans la production d'instruments de grande classe, se porte bien, c'est à une longue tradition de savoir-faire qu'elle le doit. On distingue en Europe des écoles qui ont été florissantes sur des périodes différentes, dans des centres où l'on était luthier de père en fils. C'est ainsi que l'on observe des dynasties comme celles des Amati, Stradivari, Testore, Grancino, Guadagnini, Klotz, Hill et bien d'autres encore. Certains ateliers ont fonctionné sans interruption depuis le xviiie siècle jusqu'à nos jours, passant du père au fils et du patron au contremaître. Les pays où la lutherie a toujours représenté une activité importante sont l'Italie, l'Allemagne, la France ; puis, à un degré moindre, l'Angleterre, la Belgique et les Pays-Bas, l'Espagne et le Portugal.

La caractérisation et l'identification de la lutherie du passé constituent un exercice d'une grande difficulté, mettant en jeu chez l'expert toutes ses capacités d'observation, de mémoire, de déduction : un ensemble de connaissances théoriques et pratiques qui, après un entraînement de plusieurs années sur des centaines d'instruments, lui permet de percevoir, par une analyse et une synthèse presque intuitives, le processus de création d'un instrument, l'école à laquelle il appartient, l'atelier, la main qui l'a exécuté. Les caractéristiques de facture concernent surtout le patron (modèle, avec ses contours, ses proportions), les fournitures, les épaisseurs, la courbure et la conduite des voûtes, l'exécution des coins, la pose des filets, la forme, la nature et la pose du vernis. Certains[...]

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Écrit par

  • : conservateur en chef honoraire du patrimoine au musée de la Musique

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