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KORELIS PETROS (1955- )

Compositeur d'origine grecque installé à Paris depuis la fin des années 1970, Petros Korelis est un créateur indépendant dont l'œuvre demeure en marge des idéologies musicales et des institutions qui les relaient. C'est d'ailleurs pourquoi il fonda en 1982 son propre ensemble de musique contemporaine, l'Ensemble Denojours. Depuis 1992, il dirige l'école de musique de Crépy-en-Valois.

Malgré les professeurs occasionnels qu'il a pu avoir, Petros Korelis est un autodidacte qui ne se reconnaît débiteur que des grands maîtres qui l'ont précédé et dont il a su tirer les enseignements, tant dans le domaine de l'écriture que dans celui de l'orchestration, à savoir, principalement, Bach et Debussy.

Qu'il ait tenté – et réussi – l'improbable synthèse entre la verticalité statique de Debussy et l'horizontalité dynamique de Bach n'a guère, dès lors, de quoi surprendre. À cet héritage s'ajoute celui, culturel, de la Grèce antique ainsi que son admiration pour Bernd Alois Zimmermann, avec qui il partage le sens de la rigueur dans l'écriture allié à une liberté créatrice absolue.

Ce qui définit Petros Korelis ? Sa passion pour l'architecture, son intérêt pour la symbolique des nombres, pour la mythologie, pour les mathématiques ésotériques. Depuis le début des années 1990, son travail s'est orienté vers l'utilisation de plus en plus poussée des carrés (des nombres 5 et 7). Et c'est dans Tetrakty, pour piano et saxophone (1991), que, pour la première fois, il soumet la totalité de son matériau (intervalles, harmonies et rythmes) à cette technique d'écriture éminemment contrapuntique, dont certains musicologues, comme Giancarlo Bizzi, dans son ouvrage Miroirs invisibles des sons (Les Belles Lettres, 1986), sont persuadés que Bach l'utilisait en son temps.

Cependant, malgré les contraintes qu'il s'impose ainsi – et qui confèrent à sa musique une rigueur wébernienne – Korelis a su préserver la fraîcheur de son inspiration et la fluidité de son discours, qui caractérisent déjà ses premières œuvres : Hymne à Apollon, pour soprano, baryton et dix-sept instruments (1985) ; Thoth, pour flûte, clarinette, alto et harpe (1986) ; Fouilles de Delphes, mini-opéra pour deux voix et vingt-deux instruments (1987) ; Anakreon, pour quatuor à cordes (1989) ; Xloy, pour flûte et guitare (1990).

De fait, la liberté dont semble animée sa musique n'est que le résultat – rien moins qu'exigeant – d'une maîtrise de l'écriture mise au service du principe selon lequel c'est « ce que l'oreille entend qui fait sens ». Ainsi, la rigueur qui sous-tend son écriture contrapuntique n'est point finalité mais humus organique, biologiquement intégré à son imaginaire sonore, à sa pensée musicale personnelle, par exemple dans Irialk, pour orchestre (1988), Ikaros, pour huit instrumentistes (1988), Eolos, pour orchestre (1990). C'est d'ailleurs peut-être là ce qui explique le sentiment d'équilibre et de plénitude que ressent l'auditeur à l'écoute de cette musique.

Transparence des lignes, harmonie dynamique, rythmique ondoyante, palette de timbres raffinée autant que colorée, mobilité du discours, richesse d'invention, clarté de la polyphonie, évidence des idées thématiques sont les qualités propres à cette musique jubilatoire, dont on ne donnera que deux exemples : Ekavi, pour orgue de barbarie et ensemble (1991), et Histoires naturelles, sur un texte de Jules Renard, pour récitant et cinq instruments (1994).

Petros Korelis ne récuse ni les éléments mélodiques ni l'usage de réminiscences quant au matériau qui lui sert de thématique. Rien d'étonnant non plus à ce que l'on trouve chez lui, au sein de son harmonie, octaves et doublures (ces diabolus in musica modernes).[...]

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Écrit par

  • : compositeur, critique, musicologue, producteur de radio

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