RENÉ-JACQUES (1908-2003)
Le photographe René-Jacques est né le 29 mai 1908, sous le nom de René Giton, à Phnom Penh, où son père occupe un poste d'administrateur colonial. Il fait ses études en France, à Royan, puis au lycée Buffon à Paris. Élève sérieux, remarqué pour ses dispositions littéraires, il se passionne pour la photographie, obtenant, en 1927, un premier prix au concours de photographie amateur de Royan. Son service militaire accompli, le jeune homme entreprend les études de droit qui devraient lui ouvrir une carrière politique. Cependant, sans autre formation qu'un stage d'assistant chez le photographe Gilbert Boisgontier, il décide de faire de son loisir favori son métier, adoptant bientôt son nom d'artiste : René-Jacques.
Dans les domaines alors ouverts du portrait et du reportage, il bénéficie d'un début de notoriété, conforté par la publication, en 1932 dans L'Intransigeant, de ses images du championnat du monde de boxe. René-Jacques continue cependant ses recherches personnelles, notamment sur Paris, qu'il photographie de jour comme de nuit, dans un registre à la fois impressionniste et poétique. Remarqué pour ses compositions équilibrées, pour les tonalités subtiles de scènes de rues souvent désertes, il participe en 1933 à une exposition de groupe à la galerie de la Pléiade. Dès lors, les publications se suivent, dans Plaisir de France, dans le supplément annuel d'Arts et Métiers graphiques et dans les revues américaines U.S. Camera Annual, Fortune, Harper's Bazaar ou Photography.
Travailleur infatigable, régulièrement sollicité par la publicité qui apprécie son style élégant et novateur, René-Jacques ne renoncera jamais à son œuvre d'auteur. Des écrivains comme Léon-Paul Fargue ou Francis Carco recourent à lui pour illustrer leurs ouvrages, appréciant sa vision singulière du paysage urbain – comme si la carrière littéraire envisagée dans sa jeunesse trouvait son aboutissement dans l'expression du photographe. Le cinéma lui offre une nouvelle voie quand, en 1938-1939, il devient le photographe de plateau de Georg Wilhelm Pabst et de Jean Grémillon. L'image qu'il prend de Jean Gabin dévalant un escalier sous la pluie, dans Remorques de Grémillon, est la plus célèbre de cette période exceptionnellement vouée à la fiction, que René-Jacques interrompt de lui-même, retrouvant son indépendance de créateur.
Marié en 1935 avec Jane Mary Collomé, dont il aura quatre enfants, le photographe est mobilisé en 1939 et sert comme sous-officier sur la ligne Maginot. Libéré l'année suivante, il reprend aussitôt son activité. Il illustre le Voyage dans Paris de Pierre Mac Orlan (1941), publie La Seine à Paris (1944), illustre encore Les Olympiques d'Henry de Montherlant (1948) et expose deux fois à la galerie Paul Magné à Paris. Après avoir intégré le groupe Rectangle en 1941, René-Jacques milite pour la défense des droits de sa corporation. En 1945, il fonde l'association des Photographes publicitaires, qu'il préside, et participe l'année suivante à la création du Groupe des XV, tout en acceptant la présidence du groupe des auteurs photographes à la S.P.A.D.E.M. L'ouverture de son propre atelier, en 1947, est suivie d'un grand nombre de commandes de journaux, tels que Plaisir de France, Fortune, Holiday Life, Le Jardin des arts et Harper's Bazaar. En 1949, le Stuttgarter Illustrierte lui confie un vaste reportage sur la jeune R.F.A. Sur le terrain commercial, René-Jacques signe en 1951 son premier catalogue du magasin des Trois Quartiers, début d'une collaboration qui durera vingt ans, sans entraver son succès d'illustrateur pour des ouvrages célébrant Paris ou la France.
En 1975, le photographe met un terme à ses activités pour se consacrer à la gestion et à la diffusion d'une œuvre dont on mesure, avec son ampleur et sa variété,[...]
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Écrit par
- Hervé LE GOFF : professeur d'histoire de la photographie, critique
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