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UNIVERSITÉ

L'Université a longtemps constitué l'exemple presque parfait d'une «  institution » au sens traditionnel de ce terme, c'est-à-dire d'une organisation reposant sur des valeurs reconnues comme légitimes et centrales pour la société ; étroitement associée à la classe dirigeante et gérée selon des normes décidées par les autorités politiques centrales. Elle était alors davantage un lieu d'élaboration d'un code culturel qu'un instrument de production de connaissances nouvelles. Elle formait aussi un milieu relativement clos, bien qu'étudiants et enseignants aient toujours constitué dans des sociétés à participation politique très limitée des substituts de forces politiques populaires. Le rôle croissant de la connaissance, la rapidité des changements économiques et sociaux, l'extension de toutes les formes de participation et de contrôle social ont imposé au système universitaire des tâches plus diversifiées, si différentes même les unes des autres qu'on peut se demander si elles continueront à être remplies par la même organisation. N'ayant jamais été aussi puissantes et aussi centrales que dans les sociétés industrielles avancées, les universités n'y sont-elles pas aussi menacées de disparition ?

Les universités aux XIXe et XXe siècles

Le terme « université », en tant qu'il caractérise une organisation d' enseignement, est employé en Europe depuis le Moyen Âge, servant à désigner alors l'Universitas magistrorum et scholarium parisiensium (1215), la future Sorbonne, en France ; Oxford (1249) et Cambridge (1284) en Angleterre ; Heidelberg (1386), Cologne (1388), Tübingen (1477), etc., dans les divers États germaniques ; Bologne en Italie au xiie siècle. Tous ces établissements étaient entièrement dépendants de l'Église, et la création, le développement ou le déclin de nombre d'entre eux ont coïncidé avec des débats théologiques ou de doctrine (cf. universitésmédiévales).

Mais les universités en tant qu'éléments d'un système d'enseignement, supérieur d'une part, pourvu d'une relative autonomie d'autre part, sont nées avec les sociétés industrielles, en une période où l'accumulation du capital et l'organisation de la production constituent le moteur du développement économique et social, l'enjeu des rapports de classe ; période où la bourgeoisie capitaliste est apparue comme une classe dirigeante montante. Nées au moment ou la créativité sociale se définit en termes de progrès – les débats de la philosophie des Lumières au xviiie siècle en avaient déjà montré, sur un plan théorique, nombre d'exigences et de conflits latents –, les universités contribuent à l'élaboration d'un nouveau modèle de connaissance, où la recherche, la diversification des disciplines commencent à jouer un rôle important et qui est plus systématiquement pris en considération.

Les universités créées ou réformées au xixe siècle sont, plus ou moins consciemment, en rupture avec les institutions qui, au Moyen Âge ou au temps de la monarchie absolue, portaient ce nom. La rupture semble, par exemple, très marquée en France, beaucoup moins en Angleterre. Ainsi, le contenu de l'enseignement ne constitue plus seulement un héritage, le but visé n'étant plus de transmettre les éléments d'un système de valeurs dominant, mais de participer au progrès, donc de créer. Le cursus universitaire devient alors plus diversifié. Les professeurs tendent à avoir une profession propre ; ils ne sont plus membres du clergé, mais philosophes, mathématiciens, anatomistes, etc. Enfin, les universités du xixe siècle sont des organisations assez complexes, se situant par rapport à d'autres enseignements, avec lesquels elles forment, de façon plus ou moins intégrée, un système. Dans ce[...]

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Écrit par

  • : professeur de philosophie à l'université de Paris-X-Nanterre
  • : attachée de recherche au C.N.R.S.
  • : président de la Fondation nationale des sciences politiques
  • : directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (E.H.E.S.S.).

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