1975 62e Tour de France
La course
Le Belge Eddy Merckx se présente en immense favori au départ du Tour de France. Il semble avoir retrouvé sa meilleure forme : à preuve la domination qu'il a exercée dans les classiques printanières. De plus, le défi qu'il relève – remporter une sixième fois la Grande Boucle, dépassant ainsi le Français Jacques Anquetil – permettrait à celui qui possède déjà le plus beau palmarès de l'histoire du cyclisme de forger encore un peu plus la légende du « Cannibale ».
Les organisateurs proposent de leur côté une prestigieuse innovation : la dernière étape du Tour de France s'achèvera sur les Champs-Élysées. Mais ils proposent également un parcours difficile, et notamment quatre arrivées en altitude, un terrain plus favorable aux purs grimpeurs, comme le Belge Lucien Van Impe ou le Français Bernard Thévenet, qu'aux hommes puissants, tel Eddy Merckx.
Le jeune Italien Francesco Moser, vainqueur du prologue, porte le maillot jaune durant les cinq premières étapes. La sixième (un circuit de 16 km contre la montre à Merlin-Plage) est remportée par Eddy Merckx, qui endosse le maillot jaune. Le Belge s'impose également dans le second tronçon de la neuvième étape (Fleurance-Auch, 37,4 km contre la montre), mais Bernard Thévenet ne lui concède que 9 secondes et, au pied des Pyrénées, son retard sur le Belge ne s'élève qu'à 2 min 20 s.
Le Néerlandais Joop Zoetemelk remporte la onzième étape (Pau - Saint-Lary-Soulan, 160 km), devant Bernard Thévenet, alors qu'Eddy Merckx a faibli dans la montée finale. La quatorzième étape conduit les coureurs d'Aurillac au Puy de Dôme (173,5 km). À 5 kilomètres du sommet, Bernard Thévenet démarre, seul Lucien Van Impe l'accompagne. Eddy Merckx fléchit de nouveau ; il est de plus victime d'un coup de poing au foie asséné par un spectateur. Lucien Van Impe gagne l'étape, Merckx termine à 34 secondes ; Thévenet s'est rapproché à 58 secondes de Merckx au classement général.
Le Tour se joue au cours de la quinzième étape (Nice - Pra-Loup, 217,5 km). Bernard Thévenet multiplie les attaques dans le col des Champs, mais Eddy Merckx répond à chaque fois. Dans l'avant-dernière ascension de la journée – le col d'Allos –, c'est le Belge qui passe à l'offensive ; il poursuit son effort dans la descente, prenant tous les risques. Au pied de la montée vers Pra-Loup, Eddy Merckx possède une avance d'1 min 10 s sur Bernard Thévenet ; il ne reste que 6 500 mètres pour rallier l'arrivée et la victoire lui semble promise. Mais, à 4 kilomètres du but, Eddy Merckx connaît une terrible défaillance ; l'Italien Felice Gimondi le rejoint le premier, puis Thévenet le dépasse. Bernard Thévenet accentue son effort et s'impose. Eddy Merckx concède 1 min 56 s et cède son maillot jaune au Français. Même si son retard au classement général (58 s) n'a rien d'insurmontable, le Belge a compris qu'il vient de perdre le Tour.
Le lendemain, entre Barcelonnette et Serre-Chevalier (107 km), Bernard Thévenet met un point d'honneur à passer en tête au sommet de l'Izoard et remporte la grande étape alpestre. Victime d'une chute lors de la dix-septième étape (Valloire - Morzine-Avoriaz, 225 km), Eddy Merckx aurait pu suivre les conseils des médecins et abandonner. Il préfère continuer jusqu'à Paris, rendant une sorte d'hommage à son vainqueur : la marque des plus grands. La première arrivée sur les Champs-Élysées voit le succès au sprint du rapide Belge Walter Godefroot, l'un des meilleurs spécialistes du genre.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
Classification