‘ABBĀSIDES
Le califat protégé d'Irak
Le calife passa alors sous le protectorat du souverain bouïde, appuyé par les soldats daylamites. Désormais, les califes, qui conservaient la souveraineté théorique sur tout l'Islam sunnite, furent à la merci des souverains temporels. Quoique shī‘ites modérés, ces bouïdes se gardèrent bien de remplacer le calife sunnite par un imām shī‘ite qui aurait eu trop d'autorité propre. Ils défendirent même sa suprématie ainsi que, bien entendu, leurs intérêts politiques et économiques, contre le califat concurrent des Fātimides, établi en Égypte depuis 969, qui se rattache à l'extrémisme shī‘ite ismaélien.
L'émiettement du pouvoir bouïde aboutit à la victoire des Turcs seldjoukides de tendance sunnite. Leur chef Tugrïl-Beg entra à Bagdad en 1055 et prit le pouvoir avec le titre nouveau de sultan, et la protection du calife. En dépit de l'intermède curieux de l'année 1059, qui vit le chef turc Basāsīrī occuper Bagdad et y faire prononcer le prône au nom du calife fāṭimide, le pouvoir seldjoukide se maintint solidement pendant un certain temps et mena un combat vigoureux pour le sunnisme et contre le shī‘isme. L'immigration des Turcs s'accentua et marqua le début de leur suprématie dans le Proche-Orient, qui devait durer jusqu'en 1918.
L'émiettement de l'État seldjoukide fut la chance des califes qui parvinrent à regagner une partie de leur pouvoir temporel en utilisant les rivalités des Seldjouks et de leurs atabeks. Mustaẓhir (1094-1118) fut le premier à user de cette politique avec quelque succès. En 1171, l'Égypte reconnaissait une nouvelle fois le califat ‘abbāside. Le calife Nāṣir (1180-1225) joua un grand rôle politique et idéologique. Il reconquit certaines régions de l'Iran occidental en combattant le Khwārizm Shāh ‘Alā' ad-dīn. Il se rapprocha des shī‘ites et même des ismaéliens et réorganisa une sorte de franc-maçonnerie (futuwwa) pour servir ses ambitions. Ses faibles successeurs ne purent qu'attendre le coup fatal que leur portèrent les Mongols lorsque Hūlāgū s'empara de Bagdad le 10 février 1258 et fit exécuter le dernier calife, Musta‘sim.
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Écrit par
- Maxime RODINSON : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)
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