JOUARRE ABBAYE DE
Les cryptes de l'ancienne abbaye bénédictine de Jouarre, au sud de La Ferté-sous-Jouarre, demeurent un des témoignages les plus émouvants de l'architecture mérovingienne en France. Le futur saint Adon avait fondé à cet emplacement, entre 630 et 637, un monastère d'hommes qui fut transformé par sainte Théodechilde en monastère de femmes. Ce monastère comprenait trois églises disposées sans plan organique : Notre-Dame, l'abbatiale, Saint-Pierre, qui devait devenir l'église des moines, et Saint-Paul, la basilique funéraire, dont il ne subsiste plus aujourd'hui que les cryptes. Angilbert (ou Agilbert), frère de Théodechilde et évêque de Paris, avait fait édifier de son vivant un caveau funéraire pour y abriter sa propre tombe, à l'est de l'église funéraire. Au viiie siècle, ce petit édifice allait être transformé en lieu de culte et fut profondément modifié : la salle rectangulaire construite par Angilbert, divisée à l'intérieur en neuf travées par six colonnes remployées, surmontées de chapiteaux de marbre, fut pourvue à l'ouest d'un mur au décor réticulé, qui évoque celui de la Torhalle de Lorsch, et dotée d'un accès par un souterrain qui passait sous l'église funéraire. Le tombeau de la première abbesse Théodechilde fut élevé au milieu du viiie siècle et un cénotaphe fut dressé. Ce tombeau est orné d'une magnifique inscription et d'un décor de coquilles marines. Au début du ixe siècle, deux autres tombeaux, celui d'Angilbert et celui de l'abbesse Balde, furent créés. Malgré de nouveaux aménagements entrepris à la fin du xiiie siècle ou au début du xive et la restauration un peu trop systématique du xixe siècle, la crypte Saint-Paul conserve son précieux décor datant de l'époque mérovingienne et du viiie siècle. Les splendides chapiteaux ont été taillés dans le marbre blanc des Pyrénées. Le tombeau d'Angilbert, exécuté vers 673, se rattache encore aux traditions antiques par son style et à l'Orient par son iconographie qui demeure unique. Un petit relief doit être rapproché de ce tombeau dont il est sans doute contemporain : on y voit Angilbert et un ange balançant un encensoir. Le gisant d'Ozanne, reine d'Écosse, est manifestement une œuvre beaucoup plus tardive qui ne peut être antérieure au dernier tiers du xiiie siècle.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Alain ERLANDE-BRANDENBURG : conservateur général honoraire du Patrimoine
Classification
Autres références
-
MÉROVINGIENS
- Écrit par Alain ERLANDE-BRANDENBURG et Patrick PÉRIN
- 15 028 mots
- 4 médias
Fondé vers 630 par l'abbesse Théodechilde, le monastère de Jouarre fut doté, comme c'était alors l'usage, de trois églises, l'une pour les religieuses, l'autre pour les frères ou les fidèles, enfin la troisième à des fins funéraires. Cette dernière basilique, dédiée...