ABBAYE
Le déclin de l'institution
Innombrables et ferventes jusqu'au xiiie siècle au moins, les abbayes connurent ensuite, jusqu'au xvie siècle, un lent déclin dont les causes sont multiples. Depuis longtemps déjà, elles refusaient d'assumer la double tâche qui avait d'abord été la leur : le travail et l'enseignement. Elles se repliaient sur elles-mêmes, abandonnant un rôle social actif, considérant que les moines sont avant tout des serviteurs de Dieu et que leur participation à la civilisation contemporaine reste secondaire. Ce qui compte pour l'Église, c'est leur ferveur dans la vie religieuse. En fait, il était loin d'en être ainsi ; l'abbatiat et les offices étaient de plus en plus considérés comme des bénéfices dispensateurs de « profit pécuniaire, d'avantage social, de distinction honorifique », les moines eux-mêmes demandant parfois à l'abbaye de leur offrir une « vie quiète, réglée, sans soucis matériels, et facile ». Enfin, malgré une apparente prospérité, les abbayes traversaient depuis le xiiie siècle une crise économique parce qu'elles étaient organisées pour une époque d'économie fermée uniquement agricole, alors que villes et commerce donnaient désormais le ton et que la rente de la terre perdait sans cesse de sa valeur.
Arrivées doucement au xvie siècle, toujours très nombreuses, mais chacune moins peuplée, les abbayes subirent la grande crise de la Réforme qui sécularisa beaucoup d'abbayes en Allemagne, aux Pays-Bas et dans les îles Britanniques. Mais le xviie siècle fut marqué par une renaissance du monachisme, dans le sens de l'organisation de congrégations sur le modèle donné dès la fin du xve siècle par celles de Sainte-Justine de Padoue en Italie, de Bursfeld en Allemagne, de Valladolid en Espagne. Les plus importantes furent, en Lorraine, celle de Saint-Vanne de Verdun, et surtout, en France, celle de Saint-Maur. Elles s'efforcèrent de trouver une solution à la coexistence d'abbés commendataires qui, pour la plupart, ne s'intéressaient qu'aux revenus de l'abbaye, et de communautés monastiques souvent ferventes. Toutes deux devaient être rongées par le jansénisme, et le xviiie siècle marqua une nouvelle décadence, sanctionnée par les révolutions qui semblèrent sonner le glas du monachisme et des abbayes.
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Écrit par
- Pierre-Roger GAUSSIN : maître de conférences à la faculté des lettres et sciences humaines de Lyon, directeur du Collège littéraire universitaire de Saint-Étienne
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