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SHARQĀWĪ ‘ABD AL-RAḤMĀN AL- (1920-1987)

Représentant de l'école réaliste égyptienne, ‘Abd al-Raḥmān al-Sharqāwī a publié en 1951 un vibrant poème, Message d'un père égyptien au président Truman, où il exprime son angoisse devant les dangers qu'encourt l'humanité en entassant les bombes atomiques. En 1954, il publie un roman, La Terre (al-Ardh), qui a été traduit dans plusieurs langues. En 1957 paraît Cœurs vides (Qulūb khawiyah), qui brosse un tableau de la vie des paysans pendant la Seconde Guerre mondiale. L'année suivante, Chemins détournés (As-Shawāri‘ Al-Khalfiyya), qui raconte l'histoire d'une petite rue et de ses habitants. On lui doit également des pièces de théâtre, des nouvelles, des réflexions politiques, ainsi qu'une biographie de Mahomet, intitulée Mahomet, héraut de la liberté (Muḥammad Rasūl al-Ḥuriyya, 1962).

La Terre a exercé une influence marquante sur la littérature arabe moderne. Ce roman met fin à la vision idyllique de la vie paysanne mise en vogue par Muḥammad Ḥusayn Haykal. Il présente de façon réaliste les rapports sociaux dans la campagne égyptienne des années 1940. Les paysans sont exploités par le pacha, grand propriétaire soutenu par un gouvernement à la solde des Anglais. Mais les fellahs ne supportent plus les misères et les humiliations que le pacha et son instrument, l'omdeh, leur font endurer. Menés par ‘Abd al-Hādī, un homme robuste, fier et généreux, ils se révoltent. Mais leur mouvement est vite écrasé, et leurs terres sont en partie usurpées. Les hommes les plus courageux baissent désormais l'échine, alors que l'orgueilleuse et belle Waṣīfa est obligée d'exercer les travaux les plus humiliants.

Outre une fameuse adaptation cinématographique par Yūsuf Chāhīn, La Terre a inspiré nombre d'auteurs dramatiques et de romanciers (Tawfīq al-Hakīm, Aṣ-Ṣafqah, 1956 ; Yūsuf Idrīs, Arkhaṣ Layālī, 1957 ; Husayn Mu'nis, Adam Ya‘ūd ila al-Gannah, 1972), mais ils donnent en général à leurs ouvrages un dénouement plus heureux : le grand propriétaire est toujours vaincu grâce à la volonté et à la solidarité des paysans, ce qui annonce la fin de la féodalité et l'avènement tout proche de la révolution de 1952.

Chemins détournés n'a pas eu le succès qu'il mérite. L'auteur y décrit la lutte des habitants d'une petite rue contre le Cabinet de Nessim et les Anglais qui le protègent.

Un style aisé, le refus de l'outrance, la rigueur de l'observation jointe à une tendresse réelle pour les humbles confèrent aux romans de ‘Abd al-Rahmān al-Sharqāwī leur puissance d'envoûtement.

— Sayed Attia ABUL NAGA

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Écrit par

  • : docteur ès lettres (Sorbonne), agrégé de l'Université, interprète à l'O.N.U., Genève

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