ABD EL-KRIM (1882-1963)
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Symbole de l'indépendance marocaine et de la lutte anticoloniale, Abd el-Krim a lutté, jusqu'à la fin de sa vie, pour la libération de l' Afrique du Nord. Combattant souvent victorieux, diplomate habile, propagandiste avisé, tant par ses méthodes que par son exemple, il a été un des pionniers de la décolonisation.
La république du Rif
Mohamed ben Abd el-Krim naquit vers 1882 chez les Aït Khattab, fraction des Beni Ouriaghel, une des tribus les plus puissantes, les plus belliqueuses du Rif central, où sa famille possédait une forte influence. Après de solides études traditionnelles à Ajdir, Tétouan et Fès, Abd el-Krim s'installe dans le préside espagnol de Melilla où il est, en 1906, rédacteur du journal Telegramadel Rif. Secrétaire du Bureau des affaires indigènes en 1907, puis cadi chef en 1914, sa collaboration avec les autorités espagnoles et ses différentes fonctions le familiarisent avec les méthodes administratives. Ses contacts avec des milieux divers lui permettent de compléter, par une riche information moderne, sa formation de lettré arabe.
Quittant l'administration espagnole, Abd el-Krim se fixe en 1919 à Ajdir et commence, à partir de 1920, à soulever les Beni Ouriaghel contre l'Espagne. La politique de répression, qui suit l'intervention du général Sylvestre, multiplie les ralliements au chef rifain. Aidé de son frère M'hamed, son conseiller politique, Abd el-Krim remporte d'importants succès. La défaite espagnole d'Anoual, le 22 juillet 1921, enflamme le Rif.
Il renforce dès lors son pouvoir. Il crée un État, avec un « makhzen » (gouvernement central) qui, encore assez rudimentaire, présente un mélange de traits traditionnels et modernes.
Ses ambitions augmentent. Après n'avoir envisagé que l'indépendance de sa propre tribu des Beni Ouriaghel, il élargit son champ d'action à tout le Rif qu'il proclame république. Le choix de ce terme doit attirer la sympathie occidentale et flatter les traditions démocratiques berbères. En juillet 1923, il adresse au Parlement français un appel en faveur de la « renaissance nationale » du Rif. Rapidement sa renommée devient internationale : il noue des relations avec un comité britannique, attiré par la richesse minière du Nord marocain, cherche l'appui du Komintern et du Parti communiste français, trouve des aides dans le monde islamique profondément remué par la renaissance arabe.
La proclamation d'une république indépendante du Rif, à l'intérieur des frontières nationales de l'empire chérifien, remet en cause l'autorité du sultan et représente une menace sur la zone du protectorat français, d'où d'inévitables accrochages avec les forces françaises.
Profitant du repli espagnol sur la côte, en 1924, et délivré de son rival Raïssouli, qu'il fait prisonnier en 1925, Abd el-Krim prend les devants. Ses violentes attaques, au printemps de 1925, sont difficilement contenues. Fès est menacée et Abd el-Krim annonce sa prise pour le mois de mai. Bloqué au sud, il envahit l'Est et l'Ouest où le ralliement des Jebala le conduit au seuil du Gharb. Il double ses hauts faits d'une vaste action auprès de l'opinion publique française et internationale.
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Écrit par
- Jean-Louis MIÈGE : professeur émérite d'histoire à l'université de Provence
Classification
Médias
Autres références
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MAROC
- Écrit par Raffaele CATTEDRA , Myriam CATUSSE , Encyclopædia Universalis , Fernand JOLY , Luis MARTINEZ et Jean-Louis MIÈGE
- 20 360 mots
- 22 médias
...traduisaient par des mouvements sociaux et politiques. L'opposition de la domination européenne allait provoquer la révolte des masses paysannes (révolte d' Abd el-Krim, 1921-1926), relayées à partir des années trente par les nouvelles élites urbaines, avant que n'entrent en scène, après la Seconde Guerre mondiale,...