RAZAK ABDUL (1922-1976)
Tun Abdul Razak bin Hussein fut l'un des deux principaux architectes de la Malaisie indépendante.
Né à Pekan, dans une famille assez modeste, il était entré à dix-sept ans dans l'administration après de brillantes études secondaires. Il alla alors se perfectionner à Singapour (1939). Pendant l'occupation japonaise (1941-1945), il participa au mouvement de résistance. Une bourse britannique lui permit en 1947 de faire son droit à Cambridge et à Londres, où il devint le secrétaire de la Malay Society of Great Britain (organisation des résidents malais). Une solide amitié allait s'établir entre lui et le président de l'association, le prince du Kedah, Tunku Abdul Rahman.
Revenu en Malaisie en 1950 pour des raisons familiales, il entre dans le Civil Service et parvient en quelques années aux plus hautes fonctions dans son État, le Pahang ; mais il adhère aussi immédiatement à l'U.M.N.O. (United Malays National Organization), le grand parti nationaliste malais qui lutte pour l'indépendance. Quatre mois après son adhésion, Razak est élu président de l'organisation de jeunesse du parti et lorsque, à la fin de 1951, Abdul Rahman devient président de l'U.M.N.O., Razak en est élu président adjoint. Pour empêcher les Britanniques de retarder l'heure de l'indépendance en profitant de la division des communautés ethniques, l'U.M.N.O. conclut en 1952 un pacte électoral avec les conservateurs chinois et indiens. Ce rassemblement, l'Alliance, l'emporte aux élections générales de juillet 1955. Abdul Rahman, son chef, forme alors le premier cabinet fédéral, où Razak prend le portefeuille de l'Éducation : il s'agit de faire du malais la langue nationale.
L'indépendance obtenue (31 août 1957), Razak est vice-Premier ministre et ministre de la Défense. En trois ans, il liquide l'insurrection communiste que les Britanniques combattaient depuis 1948. Il assume alors la direction du Développement rural, un poste où il gagne la confiance de la paysannerie malaise, c'est-à-dire de la majorité de l'électorat. Son autorité s'affirme, tout comme sa réputation de fermeté et d'efficacité.
Razak va jouer un rôle capital dans les négociations internationales qui précèdent en 1962-1963 l'élargissement de la Fédération de Malaisie à Singapour et à Bornéo (Sarawak et Sabah). Il a perçu que la puissance des Chinois de Singapour mettrait inéluctablement en cause la prépondérance malaise dans la Fédération. Singapour sera expulsé de celle-ci en 1965, mais le succès des partis de gauche chinois aux élections de mai 1969 provoque la colère des conservateurs malais, des émeutes et des massacres. L'état d'urgence est proclamé, la Constitution suspendue, et Razak est investi de pouvoirs dictatoriaux.
C'est alors qu'il entreprend une vaste consultation de tous les milieux et qu'il définit une nouvelle politique visant à réduire les tensions raciales en orientant les énergies de toutes les communautés ethniques vers un développement économique profitable à tous, mais surtout aux plus pauvres.
Abdul Rahman, « père fondateur » de la nation, juge alors le moment venu de passer la main à celui qui, depuis treize ans, le seconde efficacement. Le 22 septembre 1970, jouissant de la confiance de l'U.M.N.O., Razak est nommé Premier ministre. Il met bientôt fin à l'état d'urgence et rétablit, en février 1971, le fonctionnement normal du régime parlementaire. On avait rarement vu un homme politique user aussi discrètement de pouvoirs aussi étendus.
C'est alors que se précise véritablement la « politique Razak », politique habile, subtile même, mais plus dynamique et plus ouverte que celle de son prédécesseur. Un amendement constitutionnel interdit toute contestation de la prépondérance des Malais (islam religion d'État, malais[...]
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Écrit par
- Philippe DEVILLERS : docteur ès lettres (histoire), historien, professeur (relations internationales)
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Autres références
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MALAISIE
- Écrit par Philippe DEVILLERS , Encyclopædia Universalis , Nathalie FAU et Denys LOMBARD
- 17 261 mots
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...Malaisie. L'état d'urgence fut immédiatement proclamé, le Parlement suspendu et le cabinet fut flanqué, pour « rétablir l'ordre », d'un Conseil national des opérations dirigé par le vice-Premier ministre Abdul Razak, qui avait la confiance des nationalistes les plus durs.