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DECAUX ABEL MARIE (1869-1943)

Né à Auffay (aujourd'hui en Seine-Maritime), dans le pays de Caux, le compositeur et organiste français Abel Marie Decaux effectue ses études d'harmonie auprès de Théodore Dubois et d'Albert Lavignac, de composition auprès de Jules Massenet et de piano auprès de Charles-Wilfrid de Bériot et de Garnier-Marchand. Mais son instrument de prédilection est l'orgue, qu'il travaille dans les classes d'Alexandre Guilmant et de Charles Marie Widor à la Schola Cantorum (où il enseignera par la suite, entre 1898 et 1923). Il est nommé en 1903 titulaire du nouvel orgue du Sacré-Cœur de Montmartre puis, de 1923 à 1937, il enseigne l'art de son instrument à l'Eastman School of Music de Rochester (État de New York, États-Unis). De retour dans la capitale française, il achève sa carrière de professeur à l'école César-Franck et à l'Institut grégorien, tout en tenant l'orgue de l'église des Carmes. Il meurt à Paris le 19 mars 1943.

Son œuvre, peu abondante, comporte quelques mélodies de jeunesse (C'est la Nuit, Lune blanche, Chanson), une Gigue en sol mineur, des Variations brillantes pour piano sur Ah ! vous dirai-je, maman !, quelques piécettes pour orgue et des transcriptions d'œuvres de César Franck, de Camille Saint-Saëns, de Richard Wagner et d'Isaac Albéniz.

Si Decaux s'en était tenu à ces compositions, nul doute que son nom serait tombé dans l'oubli. Mais, en 1913, paraissent ses quatre Clairs de Lune (Minuit passe, La Ruelle, Le Cimetière, La Mer), composés entre 1900 et 1907 et auxquels aurait dû s'ajouter une cinquième pièce, dont il ne reste que des ébauches. En effet, dans ces quatre pages pour piano, Decaux pressent l'atonalité à travers le traitement de la cellule de trois notes qui génère le cycle tout entier en engendrant, dans le même temps, et la thématique et l'harmonie. Une telle approche, qui est le fondement même du sérialisme (défini comme une synthèse entre le vertical et l'horizontal) le fera surnommer le « Schönberg français ». Ce qualificatif peut sembler exagéré, car il ne concerne qu'une seule œuvre ; mais il faut se souvenir qu'à l'époque où celle-ci est éditée, Schönberg vient à peine de terminer son Pierrot lunaire (dont la première audition date du 16 octobre 1912). En outre, il faut rendre à César ce qui appartient à César : en ces pages, Decaux, verticalise bel et bien sa thématique, use de notes pivots, exploite les ressources du contrepoint sur sa cellule génitrice (récurrence, renversement, permutations), transpose des sections entières, emploie une rythmique fractionnée (où le silence devient un rythme à part entière) ; autant de nouveautés qui font déplorer la stérilité qui frappa ensuite ce créateur météore.

— Alain FÉRON

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Écrit par

  • : compositeur, critique, musicologue, producteur de radio

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