ABOLITIONNISME, histoire de l'esclavage
Le problème aux États-Unis
Aux États-Unis, la question de l'abolitionnisme ne se pose pas dans les mêmes termes qu'en Angleterre ou en France. Ce n'est pas un problème colonial (c'est-à-dire extérieur) mais un problème national. Il oppose deux zones géographiques, le Nord et le Sud, et, à la différence de ce qui s'est passé dans les colonies anglaises et françaises, il s'aggrave avec le temps. En effet, dans le Nord, où l'esclavage n'avait jamais été lié à l'économie du pays, les sectes protestantes avaient pu obtenir son abolition sans grande difficulté. Dans le Sud, la prospérité économique due à la culture du coton semblait aux planteurs inséparable du système servile. Les États-Unis se trouvent donc séparés en deux camps : les abolitionnistes au Nord et les esclavagistes au Sud. On tente des compromis dont l'application, à la lumière de l'expérience, se révèle difficile, voire impossible. C'est dans ces conditions que se développe le mouvement abolitionniste aux États-Unis. Sans doute a-t-il subi l'influence des abolitionnistes anglais, mais il présente des caractères spécifiques.
En 1817 avait été créée une Société de colonisation américaine dont le but était de transporter les Noirs des États-Unis en Afrique. C'est un échec presque total en raison de l'opposition des Noirs. Le véritable mouvement abolitionniste se développe surtout vers 1830. Il ne s'agit pas pour lui de limiter l'extension géographique de l'esclavage (objectif des compromis), mais de l'abolir dans toute l'étendue de l'Union. Garrison, un ouvrier typographe du Massachusetts, fonde en 1831 le journal The Liberator. La propagande orale est surtout le fait de Wendell Philipps. En 1833, est créée dans la Nouvelle-Angleterre la Société américaine antiesclavagiste. Son exemple est suivi ailleurs, et vers 1840 les sociétés anti-esclavagistes rassemblent environ deux cent mille adhérents. Leur action trouve un appui chez les Noirs dont les révoltes, sans doute localisées et immédiatement réprimées, sont de plus en plus fréquentes. Des Noirs instruits participent à la rédaction du Liberator, qui compte parmi les gens de couleur son plus gros contingent d'abonnés.
Parmi les abolitionnistes noirs, on peut citer David Walker, auteur d'un appel aux Noirs libres lancé dès 1829, Richard Allen, Abraham Jones, Prince Hall, Sojourner Truth, Robert Purvis, Charles L. Remond, Henry H. Garnet, David Ruggles, Theodore S. Wright, une femme, Harriet Tubman, et Frederic K. Douglass dont l'autobiographie publiée en 1845 eut un succès qui s'étendit largement au-delà des États-Unis. Au côté de Garrison, les abolitionnistes blancs les plus ardents sont Susan B. Anthony, Theodore D. Weld, Elizabeth C. Stanton, Prudence Crandall, Charles Sumner, Lucrecia Mott.
Il y avait parmi eux, Noirs ou Blancs, des divergences quant aux méthodes (« non-violents » et partisans de la force). L'équipée tragique de John Brown avait eu un grand retentissement. De formation puritaine, il avait cherché à organiser en Virginie des maquis pour esclaves fugitifs et s'était, dans ce dessein, emparé en 1859 de l'arsenal de Haper's Ferry. Fait prisonnier, il fut jugé et pendu. D'autres abolitionnistes organisent le « chemin de fer souterrain » ( Underground Railway), grâce auquel des esclaves peuvent passer du Sud au Nord. En 1852, l'énorme succès de La Case de l'oncle Tom témoigne de l'influence grandissante de l'abolitionnisme. L'auteur, Mrs. Beecher-Stowe, n'avait pas vécu dans les États esclavagistes, mais son père avait été un des organisateurs de l'Underground Railway. Toutefois, à lui seul, le mouvement abolitionniste n'aurait pu atteindre son objectif. Sa force fut de coïncider avec les ambitions des capitalistes du Nord, désireux de soumettre le[...]
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Écrit par
- Jean BRUHAT : maître assistant à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris
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