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MOIVRE ABRAHAM DE (1667-1754)

Mathématicien né en France et émigré en Angleterre suite à la révocation de l’édit de Nantes, Abraham de Moivre est connu pour ses travaux en analyse et en calcul des probabilités.

Abraham de Moivre naît le 26 mai 1667 dans la petite ville de Vitry-le-François, en Champagne, où son père exerce comme chirurgien. Sa famille étant originaire de Moivre, village proche de Vitry, Abraham ajoutera une particule à son nom, sans signification nobiliaire. De famille protestante, sa jeunesse est marquée par les tensions religieuses qui aboutiront, quatre-vingt-sept ans après l’édit de Nantes, à sa révocation par Louis XIV en 1685. Ainsi, l’académie protestante de Sedan doit fermer ses portes en 1682, quatre ans après que Moivre y a commencé ses études secondaires en 1678. Il poursuit celles-ci à Saumur où il découvre le traité De ratiociniis in ludoaleae de Christiaan Huygens (1629-1695) qui fonde l’étude mathématique des jeux de hasard. En 1684, il rejoint ses parents à Paris et étudie au prestigieux collège d’Harcourt, bénéficiant par ailleurs de cours particuliers du mathématicien Jacques Ozanam (1640-1718), dont les talents pédagogiques sont fort renommés. La révocation de l’édit de Nantes conduit de Moivre à un emprisonnement au prieuré Saint-Martin puis à un exil à Londres. Rapidement reconnu comme un mathématicien compétent, il y donne des cours particuliers dispensés soit au domicile de ses élèves, soit dans des brasseries.

En 1688, de Moivre découvre les Principia qu’Isaac Newton (1642-1727) vient de publier et il reconnaît immédiatement l’importance de cet ouvrage sur le développement des méthodes mathématiques. À partir de 1692, il fréquente l’astronome Edmund Halley (1656-1742) et engage des relations amicales avec Newton. En 1695, il consacre son premier article mathématique au calcul des fluxions inventé par Newton et précurseur du calcul différentiel. Deux ans plus tard, de Moivre est élu fellow de la Royal Society, mais il ne parviendra jamais à obtenir une chaire universitaire, sans doute à cause de ses origines françaises.

De Moivre est connu pour l'introduction des nombres complexes dans le calcul trigonométrique. C'est dans un mémoire de 1722 (« De sectioneanguli ») publié dans les Philosophical transactions of the Royal Society, qu'apparaît la formule exprimant un sinus en termes de nombres complexes. Une forme voisine avait déjà été proposée en 1707, mais sa généralisation a été plus tardive. Dans cet article, on trouve la célèbre formule (qui portera son nom) permettant de calculer aisément le cosinus ou le sinus des angles multiples d’un angle donné :

(cosx+isinx)n=cosnx+isinnx.

Le calcul des probabilités retiendra l’attention de de Moivre pendant toute sa vie, comme le montrent les versions successives de son ouvrage majeur sur le sujet. Après une première version (en latin) présentée en 1711 à la Royal Society et éditée dans les PhilosophicalTransactions, le texte anglais de The Doctrine of Chances:Or,aMethod of Calculating the Probabilityof Events in Play paraît en 1718. Le texte, remanié et complété, sera de nouveau publié en 1738 et 1756 ; cette dernière édition contient la célèbre approximation de la loi binomiale par la loi de distribution normale, valable pour de grands nombres d’essais. Cette découverte, qui améliore considérablement la « loi des grands nombres » du mathématicien suisse Jacques Bernoulli (1654-1705) et la compréhension des probabilités composées, place de Moivre parmi les fondateurs de la théorie mathématique des probabilités.

De Moivre appliqua ces techniques aux études statistiques, en particulier à travers l’étude des tables de mortalité et l’établissement d’une théorie des annuités. Son ouvrage Annuitiesupon Lives (1724) constitue le fondement mathématique des assurances sur la vie.

Malgré ces succès, de Moivre ne réussit jamais à obtenir[...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau

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  • MARTINGALES THÉORIE DES

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