ABSINTHE
Sa senteur puissante et son amertume extrême ont signalé très tôt l'absinthe (Artemisia absinthium L.) ou les armoises voisines à l'attention de l'homme en quête de remèdes. Mille six cents ans avant notre ère, un papyrus égyptien fait mention d'une plante dans laquelle certains ont reconnu l'absinthe (bien qu'elle ne pousse pas en Afrique). Tous les médecins de l'Antiquité la prescrivaient avec des indications que l'expérimentation moderne confirmera en bonne partie. « Herbe sainte » des empiristes médiévaux, l'absinthe a connu la gloire des panacées aux côtés de la sauge et de la sanicle. Elle entrait dans un grand nombre de ces drogues composées que les apothicaires, jusqu'au xviiie siècle, offraient comme des remèdes miracles : « confection hamech », « pilules de Nicolas de Salerne », « sirop cachectique de Charas ». Au xixe siècle, il reste encore des Cazin pour affirmer que l'absinthe est l'une des plantes indigènes les plus précieuses.
L'absinthe renferme un principe amer, l'absinthine, et de 0,20 à 0,50 p. 100 d'une huile essentielle très aromatique, aux composants nombreux, les plus notables étant un alcool, le thuyol, et le produit de son oxydation, la thuyone. Cette dernière substance, poison du système nerveux, convulsivante (12 g d'essence provoquent une crise épileptiforme chez l'homme), fait de l'absinthe une plante toxique à forte dose. L'absinthe des cafetiers du temps de Zola, qui associait l'essence de l'armoise à celles, non moins dangereuses, de l'anis, du fenouil, de l'hysope, etc., était un vrai cocktail de poisons responsable de bien des delirium tremens.
Aux doses médicinales, grâce à l'absinthine non toxique, l'absinthe est l'un des meilleurs toniques amers. C'est par excellence la plante apéritive « propre à réveiller l'appétit, à rétablir le levain de l'estomac et à fortifier cette partie » (Chomel), très utile dans l'atonie digestive avec constipation, flatulences, nausées (contre-indications : irritations ou lésions gastro-intestinales). Utilisable dans l'anémie, l'asthénie, très souvent prescrite avec succès, autrefois, dans les fièvres intermittentes, l'absinthe ne s'administre qu'en vin ou en teinture.
Pour obtenir le vin de Chaumeton : faire macérer pendant une nuit, à 30 0C, 30 grammes de sommités d'absinthe dans 1 litre de vin blanc ; passer et filtrer ; 1 à 2 verres à liqueur par jour, au début des repas (en une à trois cures de 15 jours alternant avec une semaine de repos).
Il faut proscrire l'usage de l'absinthe chez les enfants et chez les femmes enceintes.
L'absinthe est insectifuge : on en met dans les armoires à linge contre les mites. La décoction concentrée additionnée d'un produit mouillant (savon noir) s'utilise au jardin, en pulvérisation contre les pucerons, les chenilles, etc.
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Écrit par
- Pierre LIEUTAGHI : écrivain, lauréat de la Société botanique de France
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