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ABSOLU

La conception positive de l'absolu

La réflexion qui extrait de nos paroles, de nos discours, la logique formelle qui les règle et les systèmes syntaxiques qui les structurent en diverses langues, risque de s'oublier elle-même devant ses propres produits. Alors ceux-ci apparaissent immédiats, comme des données objectives : les lois et les formes, éléments premiers, commanderaient le langage effectif, décideraient des événements seconds que sont nos propos. Ainsi le logicien ou le linguiste est-il tenté d'inverser l'ordre réel en considérant les résultats de son abstraction méthodique indépendamment de celle-ci qui, pourtant, est l'œuvre de la réflexivité du langage en acte. Mais ce dernier suppose un auteur, il est conduit et engage le sujet qui le parle. Par conséquent, la substitution du système au sujet forge une représentation et non une conception fidèle au statut du langage.

Toutefois, les sciences ne mettent à jour que des systèmes partiels et l'invocation du système, de la totalité des relations coordonnées, ressortit à la métaphysique. Si donc persiste l'oubli de la réflexion dans la représentation d'une structure objective, il faut l'intervention de la catégorie « absolu » pour supposer une nécessaire structure des structures. Ainsi se conjuguent les deux propositions : le système est objet, le système est absolu.

Leibniz

La difficulté demeure ici celle des individus, comme tels. Si l'on refuse de les résoudre dans l'apparence illusoire, il faut montrer que le système absolu, l'absolu comme système, loin de les résorber, leur confère l'être, puisqu'il est posé comme l'unique mesure de ce qui est. Le génie de Leibniz s'y est employé. Chaque être, explique-t-il, est sa détermination propre, intrinsèque, mais puisque toute détermination implique le tout systématique des déterminations, il faut que le système complet soit implicitement présent pour qu'un individu possède une réalité substantielle. Ce qui signifie que chacun d'entre nous exprime et répète à sa manière, d'un point de vue déterminé, selon sa détermination propre, l'unique système qu'est le réel absolu. Ainsi serait résolue l'antinomie de l'Un et du multiple : l'absolu est un, il est système, mais sa lecture est multiple infiniment et donne lieu à la multiplicité des expressions possibles.

Hegel

Cependant, la thèse de Leibniz sur l'absolu, qu'implique toute assertion d'identité, d'hier et d'aujourd'hui, entre l'absolu et le système avive la difficulté qu'elle devait résoudre. Car affirmer que chacun, en soi, est équivalent à chacun, en vertu de l'unicité du système, c'est aussi admettre l'équivalence réelle de l'un absolu et de son contraire. C'est supposer que le système, pour être unique, doit être immédiatement et infiniment multiple. Hegel avait donc raison en affirmant que la philosophie de Leibniz, résumée dans l'assertion : « L'absolu est objet », constituait « la contradiction entièrement développée ».

Mais Hegel entendait réfuter également la thèse négative de l'absolu indéterminé. C'est pourquoi, selon lui, s'il faut dire de l'absolu qu'il est sujet, il faut dire également que l'absolu est système. Mais à condition de comprendre que le système n'est que l'acte d'autodétermination de la liberté absolue se constituant éternellement Verbe divin. Selon cet auteur, qui s'efforce d'exposer la logique absolue de l'absolu, il faut bien tenir que l'absolu est négation infinie. Seulement, une négation qui n'est qu'un rapport formel d'opposition, un renvoi incessant d'une détermination à une autre, ne désigne que la fastidieuse et absurde réitération du relatif, ne signale que la quête toujours insatisfaite d'un absolu inaccessible et impossible. Il n'y a donc négation[...]

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