ABYDOS
Le grand site de Haute-Égypte, Abydos, porte aujourd'hui encore le nom qui lui fut donné par les Grecs, de l'égyptien Abdjou (en copte, Abot). Situé à proximité de l'actuelle ville de Baliana dans la province de Sohag, sur la rive gauche du Nil, il faisait partie du VIIIe nome de Haute-Égypte, Ta-our, « la terre ancienne » ( ?), dont la capitale était Thinis, ville qu'il supplanta assez rapidement sur le plan religieux sinon politique et administratif.
Sa renommée incomparable naquit du rôle primordial qu'y joua le dieu funéraire Osiris dont c'était l'un des lieux de culte majeurs du pays, l'autre étant Bousiris dans le delta. Si l'ensemble du site est aujourd'hui très ruiné et peu spectaculaire, trois monuments n'en offrent pas moins aux visiteurs un témoignage de sa splendeur ancienne : le temple de Séti Ier, considéré à juste titre comme l'un des sommets de la sculpture égyptienne, l'Osireion et le temple-cénotaphe de Ramsès II.
Histoire et mythe
Les origines d'Abydos remontent aux époques les plus anciennes de l'histoire égyptienne puisqu'on y a trouvé des tombes ou cénotaphes des rois des deux premières dynasties, qualifiées de « thinites » par Manéthon. En fait, des traces de la période prédynastique, dite de Nagada, y ont également été mises en évidence. Le rôle dévolu, durant les deux premières dynasties, à chacune des deux cités, Abydos et Thinis, dont le site n'a pas encore été parfaitement localisé, n'est pas totalement clair. On sait, en revanche, que, très vite après l'unification de l'Égypte par le pharaonMénès, Abydos supplantera la capitale du nome, au moins sur le plan religieux.
L'importance du site est liée au rôle que fut amené à y jouer Osiris. À l'origine, le dieu local était Khentamentyou, le chef des Occidentaux, autrement dit le dieu des morts, représenté sous la forme d'un chacal. Dès l'Ancien Empire, en particulier dans les Textes des Pyramides, on le trouve associé à Osiris, sans doute originaire du delta, mais dont la popularité allait se répandre à travers tout le pays. À la XIIe dynastie, sous Sésostris Ier, Osiris a définitivement supplanté le dieu local et Abydos est devenu un grand centre de culte et de pèlerinage ; le dieu est alors fréquemment nommé Osiris Khentamentyou. À l'Ancien Empire, seul le pharaon aspirait à devenir lui-même Osiris après sa mort. Après les troubles de la Première Période intermédiaire et la « démocratisation » de la religion égyptienne, tout individu est soucieux de se préparer une survie comme Osiris, dieu mort, assassiné par son frère Seth et ressuscité par les soins de son épouse, Isis. Désormais, Abydos, plus peut-être que Bousiris, devient la ville sainte par excellence du dieu. L'ancien fétiche servant d'enseigne à la province, une boîte à crâne, surmontée de plumes d'autruche et fichée sur une hampe, fut considéré comme le reliquaire de la tête d'Osiris après le démembrement de son corps ; d'autres villes possédaient d'autres reliques de la dépouille divine. Les textes parlent également d'un cénotaphe du dieu au lieu-dit Poqer. De grandes fêtes, où étaient évoqués les différents moments du mythe osirien, étaient célébrées au début de la saison de l'inondation. La statue du dieu, en tenue d'apparat, était transportée dans la barque divine, la Nechemet, jusqu'à Poqer, après la veillée funèbre commémorant la mort du dieu. Là, il recevait la « couronne de triomphe », avant de revenir au grand temple. La foule participait à ces manifestations qualifiées parfois de « mystères osiriens ».
De cette notoriété naîtra la coutume du pèlerinage à Abydos du mort, transporté dans une barque, alors que des traditions plus anciennes évoquaient le pèlerinage[...]
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Écrit par
- Christiane M. ZIVIE-COCHE : chargée de recherche au C.N.R.S., chargée de conférences à l'École pratique des hautes études, Ve section
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