ACHÉENS
Émigration et colonisation
Nous ne jugerons complètement de l'originalité de la civilisation mycénienne qu'après le déchiffrement du linéaire A, qui nous permettra de la comparer à la civilisation crétoise dont elle s'est très tôt et profondément inspirée. Bien des obscurités demeurent donc qui expliquent les divergences des historiens. L'accord est toutefois général sur l'œuvre civilisatrice des Achéens. Ces guerriers, devenus d'audacieux marins, ont pris le relais de la Crète et assuré l'unité de culture du monde égéen. Leur plus belle conquête est, sans nul doute, la Crète. L'archéologie fixe aux environs de 1400 la destruction de Cnossos ; l'île, dont les trésors vinrent enrichir Mycènes, devient alors un royaume achéen. Ailleurs, par la conquête ou par le commerce, les Achéens s'installent fort loin. Vers l'ouest pour la première fois, la Sicile est atteinte avec Syracuse, l'Italie du Sud avec Tarente, puis Malte et peut-être l'Ibérie. En Égypte, les Achéens vont plus avant que les Crétois : ils remontent le Nil jusqu'à Assouan. Ils touchent la Syrie et la Palestine. À Rhodes, est créé le puissant royaume d'Achaïe, dont parlent les tablettes hittites de Bogazkeui. À Chypre, ils bâtissent la forteresse d'Enkomi et contribuent à l'élaboration d'un syllabaire encore inconnu, dérivé du syllabaire achéen et utilisé jusqu'au ixe siècle. En Asie Mineure, en dépit des Hittites, les Achéens atteignent la Pamphylie, la Cilicie : Milet, Éphèse, Colophon sont fondées au xive siècle. Ils ne se bornèrent pas à l'occupation d'une simple frange côtière : en 1966, des fouilles américaines révélèrent leur présence à Sardes, à une centaine de kilomètres à l'intérieur des terres.
Lorsqu'ils attaquent Troie (1280, 1200, 1180 ?), les Achéens ont atteint les limites de leur puissance. On ne doute plus, aujourd'hui, de la réalité de la guerre. Les Achéens, appauvris, convoitaient les richesses accumulées par Troie, grand centre commercial et gardienne de la route du fer ( ?). Une coalition d'Achéens fit le siège de la ville, défendue d'elle-même par toute une ligue de peuples asiatiques, et l'emporta au cours de luttes dont l'épopée a gardé le souvenir. Ces épreuves précipitèrent la fin de la souveraineté achéenne : affaiblis à l'intérieur par des rivalités de chefs, menacés par les premières infiltrations doriennes, ruinés par la cessation de tout commerce avec l'Égypte et avec les Hittites déjà entrés en décadence, épuisés par les expéditions lointaines, les Achéens furent balayés, à la fin du xiie siècle, par le flot des Doriens. Grâce à eux, l'héritage crétois avait été transmis à la Grèce et au monde égéen. « Sans la civilisation mycénienne et le souvenir qu'elle a laissé, la culture hellénique aurait été impossible » (Nilsson).
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Écrit par
- Andrée POUGET : agrégée de l'Université
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