ACQUISITION DE LA SYNTAXE
Spécifiques de l’espèce humaine, les possibilités créatives infinies du langage s’enracinent dans la grammaire, composante emblématique de l’acquisition du langage. Dans l’appropriation de la grammaire, l’enfant est confronté à deux tâches : d’une part, isoler les éléments grammaticaux de la langue et les règles qui président à leur ordre et, d’autre part, déterminer la signification des différentes structures syntaxiques de sa langue. Aux environs de quatre ans, la plupart des enfants maîtrisent la grammaire de base de leur langue. Ce rapide et impressionnant développement a reçu deux grands types d’explications.
L’explication formelle de l’acquisition syntaxique
Le premier courant, issu de la linguistique formelle, s’inspire fortement des travaux de Noam Chomsky (1981-1991) relatifs à la grammaire universelle (GU) qui renvoie aux capacités cognitives propres à l’espèce, telle la faculté de langage. La théorie des principes et des paramètres distingue des principes communs à toutes les langues humaines et des principes paramétrisés qui rendent compte de variations systématiques entre les langues. Certains aspects de la langue seraient ainsi acquis sans apprentissage inductif. En revanche, pour les principes paramétrisés, l’enfant doit découvrir quelle option offerte par la grammaire universelle concerne la langue particulière qu’il doit s’approprier. Prenons l’exemple du paramètre prodrop de structuration des phrases qui permet de distinguer les langues à sujet pronominal obligatoire, comme le français ou l’anglais (il chante ; hesings), des langues à sujet pronominal facultatif, comme l’espagnol ou l’italien (canta). Ce paramètre serait initialement réalisé par l’omission libre du sujet. Comme des recherches l’ont montré, il serait directement confirmé pour les enfants italiens, alors que c’est l’expérience linguistique qui conduirait les enfants anglais à la nécessité d’un sujet pronominalisé. La nature des paramètres a fait l’objet de très nombreux débats ainsi que l’analyse des productions précoces de l’enfant comme traces des contraintes imposées par les paramètres. Au-delà des divergences restent affirmées l’idée d’un équipement inné pour l’acquisition de la grammaire et celle de l’autonomie du savoir grammatical fonctionnant de manière modulaire au regard des autres domaines de la cognition.
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Écrit par
- Michèle KAIL : directrice de recherche émérite au CNRS
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Média