LANGAGE ACQUISITION DU
Des méthodes d’investigation innovantes
Les méthodes expérimentales d’étude de la perception, compréhension et production sont devenues de plus en plus sophistiquées, donnant accès à des capacités jusque-là insoupçonnées. L’avènement et les progrès de l’imagerie cérébrale fonctionnelle, ainsi que les études sur les jeunes enfants ayant des lésions cérébrales précoces, apportent de nouveaux éclairages sur l’organisation fonctionnelle du langage et les bases cérébrales qui sous-tendent son acquisition.
Méthodes d’étude de la perception précoce du langage
Dés le dernier trimestre de la grossesse, alors que le système auditif est déjà fonctionnel, dans le vacarme du ventre maternel, le fœtus se familiarise avec certains sons et rythmes de sa langue maternelle. La méthode de recueil des variations du rythme cardiaque fœtal a permis d’identifier les sons auxquels le fœtus est réceptif. Ces premiers contacts avec la parole laissent une empreinte mnésique attestée par la reconnaissance de la voix maternelle par le nouveau-né, dès la naissance. La méthode de succion de haute amplitude a révélé d’étonnantes capacités de discrimination auditive chez le nouveau-né, et à quatre mois, la discrimination de contrastes phonétiques non présents dans leur langue maternelle, quelle que soit la voix du locuteur ou les variations de l’intonation. Autour de huit mois, on a mis en évidence le déclin de la sensibilité du bébé à certains contrastes phonétiques non présents dans sa langue. Avec l’exposition croissante à la langue maternelle, le nourrisson « citoyen du monde » devient le bébé « expert de sa langue ».
Méthodes d’étude de la compréhension
Jusqu’aux années 1990, les informations sur la compétence langagière de l’enfant provenaient essentiellement de sa production directement accessible. Avec l’étude de la compréhension précoce, on peut avoir accès à une représentation plus complète du système langagier émergent. Ainsi s’ouvre une nouvelle fenêtre sur le processus d’acquisition lui-même : quand un enfant produit un mot ou une structure linguistique, on peut penser qu’il les a déjà acquis, mais on ignore par quels cheminements. Les paradigmes expérimentaux les plus récents dans l’étude de la compréhension précoce permettent de suivre les processus mis en jeu au moment même où s’effectue la construction du sens. Les méthodes dites « on-line » sont dévolues à l’étude des processus très rapides et automatisés du traitement du langage qui interviennent en temps réel dans la compréhension des mots ou des phrases.
L’analyse des mouvements des yeux, lors de la présentation d’images vidéo couplées à des sons, mot ou phrase a clairement mis en évidence que des mots et des phrases simples sont compris bien avant d’être produits. Les méthodes d’imagerie cérébrale, en particulier les potentiels évoqués (PE), sont à l’origine des progrès les plus marquants de ces dernières années dans l’étude des fonctions cognitives et langagières. La méthode des PE, fiable, facile d’application et non invasive, montre que des changements dans les processus cérébraux peuvent intervenir avant les manifestations comportementales. Son utilisation chez les bébés est fondamentale pour comprendre le lien entre plasticité cérébrale et développement du langage.
Méthodes d’étude de la production du langage
Les études de production se sont considérablement renouvelées grâce aux moyens audio-visuels et à l’avènement de la micro-informatique. Au recueil des données langagières s’ajoutent des indications concernant les gestes et les regards ainsi que les phénomènes d’interaction avec l’entourage. L’informatique permet le stockage, le traitement automatique et le transfert des données, entraînant un véritable changement d’échelle dans les pratiques de recherche. L’étude des productions des jeunes[...]
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Écrit par
- Michèle KAIL : directrice de recherche émérite au CNRS
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