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ACQUISITION DU NOMBRE ET DU CALCUL

Les nombres entiers naturels sont à la base de l’édifice arithmétique. Mais ils résultent déjà d’une abstraction : on ne voit jamais « trois », mais des collections de « trois arbres », « trois vaches », etc. Ensuite, les calculs élémentaires s’opèrent sur les nombres, et les décompositions canoniques des nombres peuvent s’appuyer sur les opérations (addition et multiplication) : 324 = 3 × 100 + 2 × 10 + 4. Bien que cette interdépendance des nombres et du calcul soit profonde, un souci pédagogique conduit à présenter leurs acquisitions séparément.

Le nombre

Pratiquement dès leur naissance, les bébés ont une capacité attentionnelle qui leur permet de marquer leur surprise lorsqu’ils voient qu’une collection de trois objets succède à plusieurs collections de deux objets. Âgés de quelques mois, ils arrivent aussi à différencier deux collections plus grandes, par exemple de huit et seize objets, d’après l’impression de quantité ou de grandeur que donnent ces collections. C’est seulement avec le développement du langage (premiers mots vers un an) que les nombres symboliques pourront se développer. Les mots de nombre fréquemment utilisés par leur entourage (notamment « deux » : chaussures, mains, etc.) permettent aux enfants, vers trois ans, d’utiliser adéquatement les premiers nombres (« deux », « un », éventuellement « trois »). La lente mémorisation de la suite des mots de nombres (arbitraire jusqu’à seize), souvent accompagnée d’un comptage par pointage avec un doigt (« un », « deux », « trois », « quatre »…), permet ensuite de dénommer des nombres supérieurs à 3.

Le comptage par pointage est le prolongement naturel du pointage (du doigt) qui, à la fin de la première année de vie, constitue une étape fondamentale du développement de l’enfant. Vers quatre ans, on rencontre toutefois des enfants qui comptent en pointant mécaniquement « un », « deux », « trois », « quatre » par exemple : ils ne savent pas encore que « quatre », le dernier mot de nombre utilisé lors du comptage, a un statut particulier, à savoir désigner le nombre d’éléments de la collection comptée. Lorsqu’on leur demande combien ils ont trouvé à l’issue de leur comptage, souvent  ils répètent : « un », « deux », « trois », « quatre ». L’une des raisons pour laquelle le sens quantitatif du nombre échappe à l’enfant, dans de tels comptages par pointage, est que pour le deuxième objet il dit « deux » en pointant un seul objet, et ainsi de suite « trois », puis « quatre », toujours en pointant un seul objet.

L’école, par une étude systématique des compositions additives des nombres, d’abord inférieurs à 10, puis à 20, approfondit la connaissance des nombres. L’une des compositions additives, à savoir celle qui lie un nombre au précédent, 4 c’est 3 + 1 par exemple, est particulièrement importante, car un tel lien n’apparaît pas dans le comptage verbal et n’existe pas pour une autre suite importante apprise par l’enfant, à savoir les lettres de l’alphabet.

L’écriture des chiffres, si l’on fait abstraction de quelques miroirs (Ɛ pour 3), est en général facilement apprise dès avant l’école obligatoire. Mais avec le passage à l’écriture « 10 » de dix, la base de notre système de numération, qui reprend des chiffres déjà utilisés, les élèves sont confrontés au subtil principe de position : le même symbole « 1 » représente dix unités dans l’écriture « 12 » mais seulement une unité dans l’écriture « 21 » par exemple. La difficulté de compréhension de ce principe, avec la distinction entre chiffre et nombre qui lui est associée, sera ensuite complexifiée par l’écriture et la prononciation des nombres décimaux.

Si les nombres entiers (positifs) ont été qualifiés de « naturels[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite de psychologie du développement, université de Lorraine

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