ACTUALISME ET CATASTROPHISME
Le catastrophisme du xixe siècle
Au xixe siècle, des évolutions majeures se produisent dans les sciences de la Terre : la longue durée des temps géologiques est établie et la stratigraphie paléontologique se développe ; cette dernière permet des datations relatives des couches et l'identification de la succession d'événements.
L'interprétation de ces « archives de la nature » – comme on les nomme à cette époque – se révèle cependant fondamentalement différente selon les uns et les autres, notamment en raison d'a priori entièrement opposés sur l'histoire de notre globe ; ainsi l'une des divergences majeures concerne la continuité (ou non) et la cyclicité (ou non) des phénomènes géologiques. Les catastrophistes penchent pour le discontinu et l'évolutif alors que les uniformitariens sont plutôt partisans d'une vision continue et cyclique. Pour les premiers, la Terre a un début, elle évolue et son aspect passé, différent de celui d'aujourd'hui, peut s'étudier par les traces qu'il a laissées. Pour les seconds, la Terre subit des changements continus qui se compensent d'un endroit à l'autre : le globe est dans un état d'équilibre permanent.
Les catastrophistes sont principalement Georges Cuvier (1769-1832), Alcide d'Orbigny (1802-1857), Léonce Élie de Beaumont (1798-1874), Louis Agassiz (1807-1873), William Buckland (1784-1856) et Adam Sedgwick (1785-1873). Ils sont persuadés que la Terre a été façonnée par un plus ou moins grand nombre d'événements violents, de « révolutions » – ce terme est notamment employé par Cuvier en 1812 dès la première version du Discours sur les révolutions de la surface du globe.
Cuvier est le « catastrophiste » qui a eu la portée la plus large. Il n'est certes pas le premier à tenter une explication de l'histoire de la Terre fondée sur une série de cataclysmes naturels ; nombre de ses idées sont empruntées à Deluc, comme celle sur les temps anciens gouvernés par des processus géologiques différents de ceux des temps actuels. Pour Cuvier, le monde actuel est stable et sa conception est achevée. Mais il ne doit pas pour autant être considéré comme un savant rétrograde : il envisage des catastrophes ayant ravagé des parties entières du globe pour expliquer des coupures qu'il observe dans la continuité des faunes et des flores fossiles. Il positionne ainsi l'une de ces coupures entre l'époque dominée par les reptiles et celle qui voit l'essor des mammifères ; cette limite est reconnue à présent, avec nuances, comme celle qui sépare le Crétacé du Tertiaire (il y a 65 millions d'années) et elle est, en effet, une période d'extinctions massives d'espèces (dont les dinosaures qui en sont devenus pour le grand public des emblèmes). Deux des hypothèses les plus sérieuses retenues aujourd'hui pour rendre compte de ces extinctions sont d'ailleurs des catastrophes, celle de la collision d'une météorite avec la Terre et celle de gigantesques éruptions volcaniques sur le plateau du Deccan en Inde.
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Écrit par
- Florence DANIEL : docteure en sciences de la Terre
Classification
Média