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ADMINISTRATION La science administrative

Les principaux courants de la science administrative contemporaine

L'intitulé « science administrative » recouvre aujourd'hui des recherches portant sur des objets variables et entreprises dans des perspectives diverses. On peut, en dépit de la part d'arbitraire qui s'attache à toute classification de ce type, distinguer parmi elles trois courants : un courant juridico-politique dont le but essentiel est de parvenir à une meilleure connaissance des structures et du fonctionnement de l'administration étatique ; un courant axé sur la gestion, publique ou privée, et très proche par ses préoccupations du management moderne ; un courant sociologique regroupant l'ensemble des recherches qui ont en commun d'appréhender les phénomènes administratifs à l'aide des concepts et des méthodes de la sociologie.

Le courant juridico-politique, surtout implanté en Europe peut se réclamer d'une tradition séculaire, remontant, en France, à Vivien et Macarel et, dans les pays germaniques, à Lorenz von Stein. Concevant la science administrative comme l'étude de la seule administration publique, il demeure très imprégné par la doctrine traditionnelle du droit public : l'administration est présentée à la fois comme une instance subordonnée au pouvoir politique, chargée de préparer et d'exécuter des décisions prises en dehors d'elle, et comme une institution spécifique, irréductible à toute autre parce que œuvrant en vue de l'intérêt général et investie à cette fin de prérogatives exorbitantes du droit commun. Cette science administrative, qui prolonge le droit administratif comme la description des institutions politiques prolonge le droit constitutionnel, reflète les préoccupations de juristes soucieux de dépasser le point de vue étroitement juridique dans lequel l'étude de l'administration publique s'est trouvée pendant longtemps enfermée, afin de parvenir à une connaissance plus concrète et plus réaliste des institutions ; elle est également le fait de certains politologues, qui prennent peu à peu conscience de ce que le fonctionnement du pouvoir étatique ne peut être compris en faisant abstraction de l'instance administrative.

En dépit de leur volonté proclamée de faire de la science administrative une discipline positive distincte du droit administratif, discipline normative fondée sur le raisonnement déductif, les tenants de l'approche juridico-politique restent tributaires des schémas et des théories forgés pour les besoins de l'analyse juridique. On trouve la trace de cet attachement dans la définition même de l'objet de la science administrative, dans l'importance accordée aux mécanismes juridiques pour la connaissance et la compréhension du fonctionnement de l'administration, dans l'utilisation de concepts souvent empruntés au droit administratif, enfin dans la liste des questions abordées – structures, moyens d'action, contrôle... –, qui reproduit en grande partie celle des traités classiques de droit administratif.

Le courant « gestiologique » qui, à l'opposé du précédent, assimile l'administration à la gestion, poursuit un objectif essentiellement pragmatique puisqu'il cherche à découvrir et à mettre en œuvre les méthodes les plus rationnelles et les plus efficaces d'organisation en vue d'accomplir dans des conditions optimales une tâche donnée. La science administrative apparaît en somme ici comme un avatar de la science du management, qui elle-même prolonge la réflexion inaugurée par Taylor et Fayol tout en développant l'effort de théorisation et en affinant la formulation de certaines thèses : la notion de profit maximal, en particulier, fait place à celle, plus neutre et plus générale, d'efficience, ce qui, d'une part, concourt à donner aux théories du management l'apparence d'une connaissance scientifiquement élaborée et,[...]

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Écrit par

  • : professeur de droit public et de sciences politiques à l'université d'Amiens
  • : professeur de droit public et science politique à l'université d'Amiens

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