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ADMINISTRATION Le droit administratif

Les grands systèmes de droit administratif

Le droit administratif français fait figure de prototype par son ancienneté, son degré d'élaboration, et surtout par l'ampleur du domaine auquel il impose des règles propres, différentes de celles du droit privé.

À partir de ce prototype, on peut, sans trop d'arbitraire, classer en trois grands groupes les droits administratifs nationaux. Le premier, si vaste et si hétérogène géographiquement qu'il est difficile à qualifier, a pour berceau la partie occidentale de l'Europe continentale : il réunit des droits qui, s'ils s'écartent sur de nombreux points du système français, reposent sur les mêmes principes et adoptent des catégories identiques, ou au moins comparables.

Le second groupe est celui des États anglo-saxons. Si les postulats idéologiques y sont les mêmes que dans le groupe précédent – ceux de l'État libéral – la position du problème est, du point de vue juridique, si radicalement différente, que les solutions, longtemps opposées, commencent seulement à se rapprocher de celles des États continentaux.

Enfin, avant qu'on assiste à son complet éclatement, le groupe des États d'obédience marxiste s'inspirait de l'idéologie qui lui était propre. Mais, paradoxalement, les techniques et les modes de raisonnement étaient peut-être moins éloignés de ceux de l'Europe continentale que ne le sont les systèmes anglo-saxons.

Droits administratifs de l'Occident européen continental

L'Europe continentale

Dans ce premier groupe, l'influence française s'est fait sentir de façon directe, soit à travers la domination napoléonienne, qui a imposé des schémas administratifs qui lui ont souvent survécu, soit, au long du xixe siècle, par la vertu de l'exemple, lié à l'ancienneté, si relative qu'elle fût.

Le droit administratif, en effet, pouvait difficilement s'implanter dans des États où l'absolutisme monarchique et les survivances du système féodal n'avaient pas été éliminés. De plus, le cadre des petites principautés était trop étroit pour permettre son essor. C'est seulement après que l'Allemagne et l'Italie eurent accédé à l'unité qu'elles purent développer leur droit administratif.

L'unité du groupe est certaine : l'administration y est soumise au droit, mais le droit consacre ses prérogatives et établit sur une base d'inégalité ses rapports avec les administrés.

Les divergences portent d'abord sur le degré de cette soumission au droit. Là où s'est maintenue plus longtemps la tradition autoritaire, des étapes déjà dépassées en France restent à franchir. L'acte réglementaire, en Allemagne, en Espagne, n'est pas assimilé, quant au contrôle de légalité, à l'acte individuel. En Espagne encore, la responsabilité de l'État est récente et encore partielle.

Mais les divergences essentielles entre les États continentaux portent sur l'existence et le rôle de la juridiction administrative. Très rares, en effet, sont ceux qui ont donné, à leur juridiction administrative, le statut et surtout le rôle très vaste qui sont les siens en France.

Les plus proches du modèle français sont la Grèce et la Turquie, dont les Conseils d'État s'inspirent très directement du prototype français.

L'analogie est un peu moins accusée dans le cas de la Belgique. Celle-ci, lorsqu'elle parvint à l'indépendance, entendit écarter la dualité de juridictions dont elle avait fait l'expérience sous les dominations française et hollandaise, et qui, en 1830, encourait la suspicion des libéraux en raison de son origine napoléonienne. Le système anglais, qui excluait toute juridiction administrative, semblait alors le plus favorable à la protection des citoyens contre l'arbitraire de l'administration. L'expérience belge démentit cet a priori[...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris

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