ADMINISTRATION Les juridictions administratives françaises
Le contentieux administratif
La définition du contentieux administratif recouvre une double question : celle de l'objet des requêtes, et celle des différents critères d’attribution des litiges entre juge administratif et juge judiciaire.
Contentieux de la légalité et plein contentieux
Le contentieux traité devant les juridictions administratives peut être réparti entre deux grands blocs, selon l'objet de la requête et les pouvoirs que se reconnaît le juge. Dans le contentieux de la légalité, le juge peut annuler à la demande du requérant un acte administratif dont l'auteur a commis, selon la terminologie en vigueur, « un excès de pouvoir » : soit parce qu'il était incompétent ; soit parce que les formalités nécessaires à l'élaboration de l'acte n'ont pas été respectées ; soit encore parce que l'acte méconnaît un texte ou un principe juridique supérieur (il y a alors « violation de la loi », le terme « loi » étant entendu dans un sens très large) ; soit enfin parce que l'auteur de l'acte a utilisé ses pouvoirs dans un but autre que la défense de l'intérêt public dont il est chargé (il y aura « détournement de pouvoir »).
Par contre, dans le « contentieux de pleine juridiction », le juge dispose des plus larges pouvoirs : il peut prononcer des condamnations pécuniaires à la demande d'un requérant qui estime avoir été lésé par une activité de l'administration ; il peut également prononcer des annulations (par exemple en matière contractuelle, ou en matière électorale dans laquelle il peut même prononcer l'inversion du résultat d'une élection) ; en matière fiscale enfin, il peut décider une décharge. La seule limite aux pouvoirs du juge administratif dans cette branche contentieuse – mais il vaudrait mieux parler d'autolimitation – réside dans son refus d'adresser à l'administration des injonctions de faire ou de ne pas faire, pour rester fidèle à la conception de la séparation des pouvoirs qui a présidé à sa naissance.
Il faut mentionner enfin deux branches mineures du contentieux administratif : dans le contentieux de l'interprétation et de l'appréciation de la légalité, le juge doit apprécier la valeur juridique ou donner le sens d'un acte, en dehors de toute idée d'annulation, généralement sur renvoi d'un tribunal judiciaire qui n'a pas le pouvoir d'apprécier ou d'interpréter lui-même ce texte ; dans le contentieux répressif, le juge sanctionne les atteintes matérielles au domaine public en prononçant des amendes ou en contraignant les contrevenants à acquitter les frais de remise en état du domaine.
Critères de la compétence administrative
Définir concrètement le domaine d'élection du juge administratif revient en fait à tracer la frontière qui sépare ses compétences de celles du juge judiciaire. À cette question bientôt bicentenaire il est toujours difficile d'apporter une réponse tant la délimitation de cette frontière va sans cesse dans le sens d'une complexité croissante. On pourrait penser que le juge administratif est compétent pour connaître des litiges dans lesquels est impliquée l'administration. Mais cette définition est à la fois trop étroite et trop large.
Elle est trop étroite, car si se trouvent normalement exclus du prétoire du juge administratif les litiges entre particuliers, cet axiome admet des exceptions, peu importantes il est vrai : citons surtout, pour son intérêt pratique, l'action des particuliers contre les entrepreneurs ou concessionnaires de travaux publics pour des dommages causés à l'occasion de ces travaux. De même, la compétence du juge administratif s'étend parfois au-delà du pouvoir exécutif, auquel est rattachée l'administration : l'ordonnance du 17 novembre 1958 lui donne compétence pour les litiges individuels relatifs[...]
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Écrit par
- Patrice BEAUJARD : docteur en droit, conseiller des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel
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