ADMINISTRATION Les juridictions administratives françaises
Fonctionnement des tribunaux administratifs
Seuls de 10 à 12 p. 100 des jugements des tribunaux administratifs font l'objet d'un appel. C'est dire que, quantitativement, les justiciables ont surtout affaire à ces juridictions. La procédure administrative contentieuse est définie par de grands principes d'origine essentiellement jurisprudentielle et se trouve compilée dans un Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel comportant une partie législative et une partie réglementaire.
Conditions de recevabilité
En fait, les obligations du demandeur devant le tribunal administratif commencent avant même le dépôt de la requête. Le tribunal ne peut en effet être saisi que par la voie d'un recours contre une décision administrative, celle-ci devant être au besoin provoquée par une demande de l'administré. D'une manière générale, le recours administratif préalable est largement encouragé pour son rôle préventif dans le règlement des litiges. En matière fiscale, il est même obligatoire. À défaut d'arrangement amiable, le litige sera alors porté devant le juge. La requête, qui sera déposée ou expédiée au greffe du tribunal, sera rédigée sur papier libre, avec mention du nom et de l'adresse des parties, et devra comprendre des conclusions (ce que demande le requérant) et des moyens (ses arguments). L'original, signé du requérant, sera accompagné d'autant de copies certifiées conformes par lui-même qu'il y a de parties, plus deux. À la requête devra être jointe la décision attaquée et toute autre pièce que le requérant jugera utile de communiquer au juge. Comme devant tout tribunal, la requête doit en principe être déposée par l'intermédiaire d'un avocat. Mais les exceptions sont nombreuses : le recours pour excès de pouvoir en est notamment dispensé depuis 1864. Il n'est toutefois pas inutile, en considération de la complexité de la matière, de s'assurer le concours d'un avocat. Depuis 1972, il existe un bureau d'aide judiciaire devant chaque tribunal administratif. L'ensemble de ces dispositions contribue à faire de la justice administrative une justice peu onéreuse.
Pour éviter que de ces conditions favorables ne résulte un encombrement du prétoire du juge administratif, il est exigé du requérant, outre la capacité ordinaire pour ester en justice, la justification d'un « intérêt à agir », c'est-à-dire la lésion d'un intérêt propre. La jurisprudence sur ce point comporte d'infinies nuances, mais sait faire preuve de libéralisme. Le recours contentieux est enserré dans des délais très stricts : le délai de droit commun est de deux mois, à compter de la publicité qui est donnée à la décision administrative attaquée – publication lorsqu'il s'agit d'un acte réglementaire, notification pour une décision non réglementaire. Mais ces délais ne sont opposables au requérant qu'à la condition qu'ils aient été mentionnés dans la notification de la décision.
Instruction et jugement
L'ensemble des conditions étudiées jusqu'ici concerne la recevabilité de la requête, c'est-à-dire son aptitude à être examinée au fond par le juge. Elle va être instruite par un magistrat désigné par le président du tribunal, le conseiller-rapporteur. L'une des caractéristiques de la juridiction administrative est que la procédure y est écrite. Elle se réalisera par la communication à l'autre partie de chaque pièce déposée par son adversaire. Le juge dispose au besoin de moyens d'investigation tels que l'expertise, le transport sur les lieux pour y effectuer des constatations ou vérifications, l'enquête pour entendre des témoins, les vérifications d'écritures, etc. L'instruction sera parfois close par une ordonnance de clôture d'instruction, fixant une date au-delà de laquelle aucun mémoire, aucune pièce ne[...]
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Écrit par
- Patrice BEAUJARD : docteur en droit, conseiller des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel
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Média
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