HITLER ADOLF (1889-1945)
Le chef de guerre
Le déclenchement du conflit fut accueilli avec morosité par la population allemande. La victoire sur la Pologne était prévisible, mais qu'allait-il se passer avec la France et le Royaume-Uni ? Après les mois d'inactivité de la « drôle de guerre », la série de victoires allemandes du printemps et de l'été 1940, qui aboutirent à l'occupation de la Norvège, du Danemark, de la Belgique, des Pays-Bas et de la France, fit atteindre à la popularité de Hitler son zénith. La défaite de la France était largement due aux erreurs et aux impérities du haut commandement français, mais Hitler avait eu du flair en faisant confiance aux chefs militaires qui prônaient une percée motorisée par les Ardennes.
Cette victoire lui donna l'aura d'un génie militaire, et il se persuada lui-même qu'il en était un. Sa confiance en soi, fondée sur un égocentrisme ancien, s'était amplifiée depuis le milieu des années 1930. Elle prenait à présent une ampleur qui le rendait intolérant aux avis de son entourage, y compris de ses conseillers militaires. Le chef nazi avait indubitablement l'intelligence des choses militaires, il était intéressé par la technique et la stratégie. Mais, avec le temps, il se substitua toujours davantage à ses généraux, refusant d'entendre les avis discordants et transformant ses conseillers en courtisans, dans l'ambiance suffocante des bunkers où il séjourna à partir de 1942. Le politique cédait le pas au chef de guerre et ne gardait plus le contact avec la population qu'à travers des discours radiodiffusés.
Or, dans cette guerre, l'Allemagne perdait progressivement sa capacité d'initiative. La Grande-Bretagne ayant refusé de déposer les armes, Hitler réagit en joueur qui accroît la mise dans l'espoir de se refaire d'un coup : il voulut emporter la décision en élargissant le conflit. Ses campagnes en Yougoslavie et en Grèce au printemps de 1941 et l'envoi d'un corps expéditionnaire en Afrique du Nord visaient à assurer ses arrières dans des régions déstabilisées par les insuccès italiens. Mais la campagne contre l'U.R.S.S., déclenchée en juin 1941, résultait, elle, d'un choix délibéré qui visait à produire le tournant attendu et dont les motifs étaient indissociablement stratégiques (abattre la dernière puissance continentale et forcer Londres à faire la paix), économiques (assurer une base suffisante en cas de prolongation de la guerre) et politico-idéologiques (la conquête de l'« espace vital »).
Or, loin de se terminer par une victoire rapide, cette campagne se révélait extraordinairement coûteuse en hommes et en matériel. Et voilà qu'à l'adversaire soviétique dangereusement sous-estimé, Hitler en ajoutait un autre de taille en déclarant, le 11 décembre 1941, la guerre aux États-Unis par solidarité envers l'allié japonais qui venait de les agresser à Pearl Harbor. La guerre sur deux fronts, la guerre devenue totale : Hitler avait créé par ses coups de poker la situation à laquelle il était préparé par toute sa psychologie, celle dans laquelle ne devait valoir que l'alternative de la victoire ou de l'anéantissement.
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Écrit par
- Philippe BURRIN : professeur d'histoire à l'Institut de hautes études internationales, Genève (Suisse)
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