WILLAERT ADRIAN (1490 env.-1562)
Musicien flamand, à l'origine de la prestigieuse école vénitienne. Willaert a réuni en une heureuse synthèse les apports esthétiques néerlandais, français et italiens. À Paris, il fut l'élève de Jean Mouton ; il aurait, selon certains, fréquenté Josquin. Son titre de cantor regis Hungariae, attribué par son contemporain J. de Meyere (Res flandricae, 1531), signifie, semble-t-il, qu'il fit partie de la chapelle de Ferdinand Ier qui fut gouverneur des Pays-Bas avant son élection comme roi de Hongrie (1526). De 1525 à 1527, Willaert est chantre à la chapelle d'Hippolyte II d'Este à Milan ; c'est à la fin de 1527 qu'il succède à Petrus de Fossis (Pietro da Fossa), Flamand comme lui, à Saint-Marc de Venise où il sera maître de chapelle pendant plus de trente ans, jusqu'à sa mort. Avec lui Venise commence à devenir l'un des centres les plus renommés de la musique européenne. Dans ses œuvres, la structure essentielle de la polyphonie néerlandaise est respectée, mais les couleurs de l'harmonie s'enrichissent. Reprenant une manière déjà pratiquée dans l'Italie du Nord, Willaert écrit souvent à deux chœurs (cori spezzati, chœurs rompus), utilisant en cela les deux tribunes de Saint-Marc, dotées de deux orgues. Les chœurs tantôt dialoguent, tantôt chantent en tutti (Salmi spezzati, 1550). Ses motets (plus de trois cent cinquante, de quatre à sept voix) sont au centre esthétique de sa production religieuse. Plusieurs techniques y sont employées (cantus firmus et écriture en canon, imitation libre, déclamation juste et claire sans ornement mélismatique et aux phrases courtes) et dénotent l'influence française. Les neuf messes de Willaert sont du type messe-parodie. Dans ses compositions vocales profanes, on retrouve la prosodie typique de l'esthétique française (plus de soixante-cinq chansons françaises) ainsi que la mélodie et la carrure rythmique des chants populaires italiens (quatorze Canzone villanesche alla napolitana, 1545). Toutefois, le sommet de sa musique profane réside dans ses madrigaux (une soixantaine de madrigaux italiens) ; il fut l'un des créateurs du genre avec P. Verdelot, C. Festa, J. Arcadelt. C'est pour eux qu'il mérite d'être appelé « ce maître à la fois de la musique sensuelle et de la science » (N. Bridgman). Son dernier recueil, Musica nova (1559), réunit madrigaux (textes de Pétrarque) et motets. Enfin, il écrivit une douzaine de ricercari instrumentaux (trois et quatre voix), genre dont il est le créateur à l'orgue, et transcrivit pour le luth vingt-deux madrigaux de Verdelot, introduisant ainsi le madrigal dans l'art instrumental (Intavolatura de li madrigali di Verdeletto da cantare e sonare nel lauto).
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Pierre-Paul LACAS : psychanalyste, membre de la Société de psychanalyse freudienne, musicologue, président de l'Association française de défense de l'orgue ancien
Classification
Autres références
-
GABRIELI ANDREA (1533 env.-1586) & GIOVANNI (1555 env.-1612)
- Écrit par France-Yvonne BRIL
- 2 395 mots
Adrian Willaert (1490 env.-1562), quittant la Flandre, son pays d'origine, séjourna à Paris où il fut l'élève de Jean Mouton, disciple de Josquin Des Prés, à Bologne, Rome, Ferrare, Milan, avant de s'installer à Venise où il occupa durant trente ans le poste de maître de chapelle... -
RORE CYPRIEN DE (1516-1565)
- Écrit par Pierre-Paul LACAS
- 376 mots
Ce musicien flamand, né à Anvers ou à Malines et venu très tôt se fixer à Venise, est l'un des madrigalistes les plus fameux de sa génération (surnommé « Cypriano il Divino »). Alors que le genre madrigal n'était apparu que depuis vingt ans à peine, Rore, sous l'influence de Nicola...
-
SACRAE SYMPHONIAE (G. Gabrieli)
- Écrit par Juliette GARRIGUES
- 240 mots
La publication, en 1597, des Sacrae Symphoniae de Giovanni Gabrieli constitue une étape capitale dans l'histoire de la musique. Ce recueil de 62 pièces pour chœurs et ensembles instrumentaux marque en effet un profond bouleversement : le passage du monde ancien de la polyphonie a cappella...