AÉROBIOSE & ANAÉROBIOSE
L' aérobiose est la vie en présence d'air, l'anaérobiose est la vie en absence d'air. En fait, c'est la présence ou l'absence d'oxygène qui importe : certains organismes, dits aérobies stricts, ne peuvent vivre qu'en présence d'oxygène ; d'autres, dits anaérobies stricts, sont tués en présence d'oxygène ; enfin les organismes aérobies ou anaérobies facultatifs vivent, selon des modalités différentes, en présence ou en l'absence d'oxygène.
L'étude des besoins en oxygène associés aux processus vitaux a permis d'approfondir la connaissance des manifestations énergétiques des êtres vivants.
Historique
Les Anciens liaient de façon significative les notions d'âmes, de vie, avec celles de souffle, d'haleine, et employaient le même mot pour les désigner : ψυχ́η chez les Grecs, spiritus chez les Latins. Il fut très tôt évident que la vie des hommes et des animaux était liée aux mouvements de la cage thoracique. Mais ce n'est qu'en 1663 que Robert Hooke prouve que la respiration assure la fourniture d'air frais indispensable à la vie : il réussit à maintenir vivant un chien dont il avait sectionné les côtes et le diaphragme, en lui insufflant de l'air à l'aide d'un soufflet. Au xviiie siècle, Black, Priestley, Scheele établissent, indépendamment, que les animaux modifient la composition de l'atmosphère qui les entoure. Ainsi, un animal, maintenu dans une enceinte close, y appauvrit l'atmosphère en « air déphlogistiqué » ou « air de feu » (l'oxygène), et l'enrichit en « air fixe » ou « air acide » (l'anhydride carbonique). Quand la teneur en « air fixe » est trop élevée, l'animal meurt ; si l'on opère en présence de chaux, absorbant l'« air fixe », l'animal vit plus longtemps, mais finit par mourir par manque d'« air de feu ». En 1780, Lavoisier précise que l'oxygène est utilisé pour la combustion de l'hydrogène et du carbone de l'organisme, l'anhydride carbonique et l'eau étant les produits de cette combustion qui définit alors la respiration. Vers la même époque, Ingenhousz puis Senebier montrent que les végétaux réalisent de tels échanges gazeux.
On s'aperçut très tôt que les fermentations, en particulier celles du jus de raisin, se déroulent en absence d'aération. En 1837, Schwann avance que des micro-organismes jouent un rôle. Ce point de vue est combattu par Liebig. À partir de 1860, Pasteur entreprend ses travaux sur les fermentations et montre successivement : 1. que la fermentation alcoolique, c'est-à-dire la transformation des sucres en alcool éthylique et en CO2, se déroule en absence d'oxygène, qu'elle est due à des levures qui demeurent parfaitement vivantes et peuvent même se multiplier au cours du processus ; 2. que ces mêmes levures peuvent vivre et se multiplier en aérobiose, mais les sucres sont alors complètement oxydés en CO2 (l'alcool ne s'accumulant pas) et la quantité de sucre consommé par une même quantité de levures pendant une même période est beaucoup plus faible qu'en anaérobiose ; 3. que différentes fermentations aboutissant à l'accumulation d'acide butyrique ou d'acide lactique sont provoquées par des micro-organismes, que cette accumulation ne se fait qu'en anaérobiose, et que l'oxygène tue les micro-organismes responsables ; 4. que la transformation de l'éthanol en acide acétique, lors de la fabrication du vinaigre, ne peut avoir lieu qu'en présence d'une forte aération et qu'elle est due à un micro-organisme détruit dès que l'aération cesse. Ainsi, en quelques années, l'ensemble des faits établissant la diversité des besoins d'oxygène pour les êtres vivants est parfaitement établi. Deux modes de vie coexistent, « avec air » et « sans air ». Pasteur définissait la fermentation[...]
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Écrit par
- Claude LIORET : professeur à l'université de Paris-Sud
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