AFRIQUE (Histoire) De l'entrée dans l'histoire à la période contemporaine
L'histoire du continent tout entier apparaît comme une entreprise récente et difficile. Pendant longtemps, seules l'égyptologie, l'islamologie et l'histoire coloniale l'ont, chacune de son point de vue, abordée ; il faut noter du reste que les très anciens systèmes d'écriture, en Égypte, à Méroé, en Éthiopie, sont encore loin d'avoir apporté toutes les informations attendues. Les sources rédigées en arabe, par des auteurs qui n'ont qu'exceptionnellement connu l'ensemble du continent, les archives européennes et les récits des explorateurs constituent des sources souvent critiquables, même si l'on ne peut se dispenser de faire appel à elles. On sait maintenant utiliser de manière scientifique et critique les sources orales, si utiles lorsqu'elles sont exploitées avec précaution. L' archéologie, principalement depuis le début de années 1970, est venue enrichir parfois considérablement la connaissance de ce qui s'est passé sur le continent africain, surtout durant les dix mille dernières années. Les compléments d'information qu'il a fallu demander aux laboratoires scientifiques, aux géographes, aux botanistes, aux zoologues et à un grand nombre d'autres disciplines ont permis la mise au point d'une méthodologie historique très neuve, dont témoigne la monumentale Histoire générale de l'Afrique qu'a publiée l'UNESCO.
La situation si particulière de l'Afrique, en symétrie presque totale de part et d'autre de l'équateur, lui a fait subir, au même titre que les ont subis les zones polaires, les plus spectaculaires des grands changements climatiques survenus sur notre planète depuis que l'Homo sapiens sapiens y vit. Parfois barrière infranchissable à cause de son étendue et de son aridité (par exemple, il y a vingt-cinq mille ans), le Sahara, à d'autres moments, il y a huit à dix mille ans, a accueilli des pasteurs et leurs troupeaux, au voisinage de chasseurs, pêcheurs, cueilleurs, à la condition, très vite fortement ressentie, de ne pas gaspiller l'eau. De même, la forêt, tantôt beaucoup moins étendue, tantôt plus, n'a pas constamment constitué un milieu dangereux que l'homme fuit. Tout ce que nous savons aujourd'hui du passé du continent permet de dire que, jusqu'aux cinq mille dernières années, il a été tantôt beaucoup moins hostile, tantôt bien plus pour la vie de l'homme ; en tout cas, les environnements africains ne sont nulle part dénués de périls. Il faut aussi prendre en compte l'existence des plateaux et des grands accidents faillés de l'Est, opposés à la massivité morne de l'Ouest, et aussi la différence entre les côtes de l'océan Indien et celles de l'Atlantique. Pour toutes ces raisons, il est imprudent de projeter vers le passé, pour les idéaliser ou pour les dénigrer, les situations culturelles, politiques ou économiques actuelles ou récentes.
Il reste nécessaire de noter que les groupes d'Africains noirs – que des classifications linguistiques variables et toujours remises en cause organisent par grands groupes, dont le plus important est celui des Bantouphones – ont connu, entre le 18e parallèle Nord et le 34e sud, des évolutions plus comparables entre elles qu'avec n'importe quelle autre zone du continent. Le Nord, berbérophone, puis arabophone, mais où l'on parle encore le copte, a reçu depuis douze siècles une marque très profonde de l'islam. Les cultures de l'Afrique orientale, imprégnées d'influences asiatiques, proches (Arabie, Yémen) ou lointaines (Austronésie), ont leurs originalités irréductibles.
Il y a historiquement une telle profusion d'Afriques, de cultures diverses, d'évolutions à des niveaux différents que toute étiquette devient trahison. Un tel foisonnement de vie échappe à une classification[...]
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Écrit par
- Hubert DESCHAMPS : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris
- Jean DEVISSE : professeur émérite à l'université de Paris-I
- Henri MÉDARD : maître de conférences en histoire à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, centre de recherches africaines
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Médias