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AGENCES DE NOTATION

Remises en cause

La crise financière de 2007-2008, dite crise des subprimes (par référence aux emprunts immobiliers hypothécaires à risque aux États-Unis), puis la crise de la dette souveraine qui la suit immédiatement en 2009-2010 ont conduit à la mise en cause des agences de notation des deux côtés de l'Atlantique. Cette mise en cause porte sur au moins trois arguments : l'incapacité des agences à prévoir des crises ; leur capacité à les amplifier ; leur modèle économique propre à favoriser les conflits d'intérêts.

De fait, alors que les modèles de notation sont supposés être prédictifs, ils ont de nombreuses fois failli : de la crise de 1929 à la chute de Lehman Brothers en 2008, en passant par les faillites d'Enron (2001) ou de Parmalat (2003), les agences ont régulièrement accordé d'excellentes notes à des entreprises au bord de la faillite. Brusquement dégradées par la suite, lorsque la crise éclate, ces notes compromettent les possibilités de refinancement pour les structures concernées. Les agences sont donc accusées d'avoir un comportement pro-cyclique, aggravant les crises ou, à l'inverse, favorisant les bulles spéculatives en période de croissance. La crise de la dette souveraine en Europe en 2009 et 2010 relève bien de cette explication : intensité et concentration des dégradations sur une courte période, instabilité des notations, enfin interactions entre l'action des agences de notation et les perceptions du marché. Le caractère pro-cyclique des notations entretient un cercle vicieux, les taux d'intérêt sur les titres obligataires augmentant du fait de l'anticipation de nouvelles dégradations des notes, les agences dégradant effectivement leurs notes compte tenu de la détérioration des conditions de financement des États.

Une troisième critique a porté sur le modèle économique des agences et leur gestion des conflits d'intérêts. Elles ont été accusées d'avoir « mélangé les genres » en ajoutant à leur activité de notation des activités de conseil, notamment pour la création de produits structurés. Michel Prada, président de l'A.M.F., soulignait ainsi en décembre 2007 que si, dans le cas d'une notation de dette d'entreprise ou souveraine, la notation intervient a posteriori comme évaluation du risque de défaut, dans le cas de la titrisation la notation est un objectif fixé a priori pour un produit financier à créer. Étant donné la complexité des produits titrisés, « un grand nombre d'investisseurs se sont reposés largement sur l'analyse réalisée par les agences » pour prendre des risques au-delà du raisonnable. Cette activité s'est révélée fort lucrative pour les agences, puisque la notation des produits structurés représentait alors la moitié de leur chiffre d'affaires.

Le Sénat américain a publié le 22 avril 2010 le rapport d'une sous-commission d'enquête, présidée par le sénateur démocrate Carl Levin, sur le rôle des agences de notation dans la crise financière. Ses conclusions sont accablantes, tant sur les méthodes que sur la déontologie. Selon ce rapport, la qualité des notations a été affectée par la recherche du profit et des parts de marché des agences, qui ont utilisé des « données inadéquates et des modèles dépassés ». Certaines erreurs dans la notation de produits structurés étaient connues dès 2006, mais les agences ont attendu la mi-2007 pour dégrader les notes, après avoir encaissé de substantiels profits liés à ces notations.

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Écrit par

  • : docteur ès sciences économiques, manager Reporting et Etudes

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